Qu’il est parsemé d’embûches le destin des Mousquetaires de Mazel et Cauvin ! Acte deux sur trois des aventures mouvementées de Messieurs de Château-Neuf-du-Pape, de Saint-Emilion et Calebasse. Avant de résumer tout ça dans un Case à Part spécial, retour sur la décennie 1974-1984.

Gags et histoires courtes, deux grands récits de 44 planches et deux de 22 accompagnent un riche dossier orchestré par Patrick Gaumer, qui est, avec Hugues Dayez et le couple Pissavy-Yvernault, parmi les meilleurs historiens de la BD. On y suivra la carrière des auteurs et les avatars de la série. Luc Mazel a toujours su ce qu’il a voulu. Tout n’a pas été simple dans ses relations avec Charles Dupuis. Ceci explique sans doute les aléas éditoriaux de la série. La photo-BD (à la Léandri) « Au fil de l’épée », parue dans Spirou en 1974, est un petit bijou d’humour et démontre la puissance de création de la presse, média qu’il est nécessaire de préserver pour pouvoir encore lire des ovnis de ce genre. (Eviv Uorips !) Au fil de la décennie, la jument Câline s’efface de plus en plus au profit des Mousquetaires du Roi. Mazel prend de plus en plus d’autonomie, introduisant des éléments historiques qui lui sont chers. C’était le principal point de divergence avec le grand Raoul qui privilégiait l’humour au détriment de la réalité historique. Mazel tout seul n’a cependant pas délaissé l’humour ; on le verra lors de la parution du troisième et dernier volume de cette intégrale.

 

 

 

 

La marquise d’Aubray inaugure cet opus. Récit publié en noir et blanc aux éditions Points Image en 1998, il est présenté ici dans sa version colorisée. La cour n’a d’yeux que pour cette belle courtisane dont la tête en fait tourner plus d’une.

Les avatars de Monsieur de Saint-Emilion mettent au premier plan le mousquetaire au plus fort caractère, le mettant à la fois sous le charme et aux prises avec Milady.

Le vaisseau des brumes est certainement le meilleur récit de la période Mazel/Cauvin. C’est certainement pour cela qu’il fut repris dans la collection Péchés de jeunesse en 1984 (mais quand même neuf ans après sa prépublication !). Vaisseau fantôme ou flibustiers ? Toujours est-il que les navires disparaissent corps et biens. Louis XIII charge ses mousquetaires de démêler l’intrigue. Les femmes sont encore au cœur de l’intrigue. Mazel aime les dessiner et, chose plutôt rare chez un dessinateur au style franco-belge, le fait bien (tout comme l’ami Walthéry évidemment). Ce récit aurait plu aux chiennes de garde. On y fait la connaissance de Framboise, chef des rebelles, qui reviendra dans l’épisode suivant.

 

 

 

 

L’affaire des fuites est une aventure de transition. On sent les divergences d’orientation entre le dessinateur et le scénariste dont il est question dans le dossier de présentation. Histoire politique entre la France et l’Espagne, Calebasse et Framboise mènent l’enquête. Le duo est bancal ; la blonde pirate est placée dans un rôle différent qui n’apporte pas de plus-value à la série. D’ailleurs, elle ne réapparaîtra plus. Le principal intérêt de l’histoire est l’utilisation de Théophraste Renaudot et de sa gazette. Avec le recul, on pense aux Paparazzi que Mazel animera pendant dix albums avec Cauvin dans les années 90-2000.

La série a le mérite d’être aussi efficace sous d’autres formats. Les histoires courtes sont efficaces. Elles mettent souvent nos mousquetaires aux prises avec les gardes du Cardinal. Les running gags de Monsieur de Saint-Emilion avec les voyantes et autres astrologues sont bien amusants, ainsi que les soucis du trio avec les colères de Monsieur de la Pétaudière.

Dupuis Patrimoine, plus que de rendre hommage à la série ou aux auteurs, offre aux Mousquetaires l’honneur qu’ils auraient dû avoir à l’origine dans une vraie collection digne de ce nom.

 

Laurent Lafourcade

 

Câline et Calebasse intégrale 1974-1984 par Cauvin & Mazel, Dupuis

264 pages, 28 €

ISBN : 9782800157481

Publié le 18/06/2014.