dBD: une vraie réussite de la presse BD
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dBD: une vraie réussite de la presse BD

Parler et faire connaître le monde de la BD, voilà les vocations premières du groupe dBD qui a en son sein deux revues : dBD [crée en 1999] et L’Immanquable [crée en 2011].

Vous êtes passionné par la BD, vous attendez de vraies interviews d’auteurs connus ou inconnus, vous voulez connaître les dernières nouveautés parues et les critiques afférentes…alors ne cherchez plus, ces deux magazines sont faits pour vous. Voilà un modèle d’édition de presse-papier avec des couvertures luxueuses et un graphisme très étudié. Des magazines pas neutres aussi, qui donnent de vrais points de vue et des avis avisés sur les dernières nouveautés. Rencontre avec son talentueux créateur Frédéric Bosser…

Quelle  est votre place en % sur le plan du marché des revues BD et vous en vendez combien en moyenne?

On met en place 15000 exemplaires de dBD à chaque numéro et 18 000 exemplaires de l’Immanquable. Difficile de dire quel est notre pourcentage car nous ne connaissons pas les chiffres de notre concurrent le plus directe à savoir Casemate. On peut penser que l’on se partage le marché encore que notre ancienneté voudrait que l’on soit devant.

Quand on regarde vos archives sur votre site internet, on est impressionné par la qualité de vos interviews ; rencontrez-vous personnellement les auteurs à interviewer ?

 

La plupart du temps, oui ! Quand l’auteur n’est pas présent sur Paris et qu’il est en province, c’est par téléphone voir par mail. Mais dans le cas présent, je me débrouille pour aller les voir personnellement. La rencontre est indispensable dans notre métier.

Et dans les festivals?

C’est plutôt pour des prises de contact, qui serviront pour plus tard. De mon point de vue, ce ne sont pas des endroits idéaux pour faire des interviews. Les auteurs sont trop occupés et pour cause.

Vous passez donc par des maisons d’édition la plupart du temps?

Forcément sauf pour des auteurs que je connais très bien.

D’ailleurs pour « L’Immanquable » qui procède à des prépublications, vous êtes obligé de passer des accords avec les maisons d’édition?

 


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Les maisons d’édition me proposent des albums en prévision et nous en discutons. Sur foi de les demandes, elles demandent à leurs auteurs ou dessinateurs, s’ils sont d’accord de passer dans le magazine. Pour des grosses séries comme « Blake et Mortimer », ils vont d’abord essayer de le proposer à des journaux plus importants comme « Le Figaro ». mais s’ils venaient à nous le proposer, on le passerait bien volontiers !

Les succès de vos revues mettent cette idée à mal qu’il n’y aurait plus d’avenir dans la presse-papier, face aux webzines, fanzines ou sites BD Internet…

C’est vrai qu’on n’est plus dans les chiffres d’antan, où l’on vendait 100000 à 120000 exemplaires par numéro. Il y a 20 ans, je pense que l’on aurait mieux gagné notre vie, mais il faut vivre avec son temps et l’accepter.

Vous ne semblez pas avoir de problèmes de distribution puisque vous êtes partout distribué en France?

Cela ne sert à rien d’être distribué partout ! On est dans la majorité des endroits où l’on a des chances de vendre. En même temps, s’il on fait des tirages de 50000 pour en vendre 10000, ce n’est pas la peine.

De par vos interviews, vous avez fait de sacrées rencontres ; vous avez remis à l’honneur des auteurs BD ou des albums cultes, je pense à « Partie de chasse » de Bilal-Christin pour le dBD74.

 


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Dans chaque numéro de dBD, j’essaie de composer avec de l’ancien et du nouveau. Cet album de Bilal-Christin est charnière dans l’histoire de la bande dessinée contemporaine (album sorti en 1983). J’ai retranscrit une rencontre que j’avais animé à Lyon, c’est aussi le rôle d’une revue que de faire redécouvrir ce type d’album.

Avec vos revues, vous déclariez que votre modèle de magazine, c’était le magazine cinéma « Studio » des années 1980. Vous confirmez?

 


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Oui, on est peu dans des clichés tout faits: « Casemate » ce serait « Première » et « dBD » « Studio » . Moi, personnellement je trouve mon journal beau, alors que « Casemate », je le trouve assez laid au niveau de la maquette. Il y a cette idée de réaliser un magazine avec de belles photos et de belles images. Il y a cette idée surtout de publier aussi de belles couvertures et de belle pagination ; mon graphiste fait un gros travail derrière d’ailleurs. Je suis très à cheval sur la beauté formelle de mon magazine car j’estime que la lecture doit être un moment agréable de l’existence. Je préfère ne rien faire, plutôt que de faire un truc moche.

Vous avez parfois des retours d’auteurs qui vous remercient car cela met bien en relief leurs travaux, plutôt mieux même que les maisons d’édition.

Oui, ils sont contents de voir que leurs albums sont défendus dans nos pages. On va parler de leurs bouquins, ils sont donc contents quand on va les voir et ils vont nous dire après qu’ils ont apprécié la maquette de la revue lorsque nous publions leurs dessins.

Vous avez parlé aussi bien des mangas et des comics dans vos hors-séries.

 


dBD HS #10 - Manga

 

 

On défend toutes les formes de création, mais on défend d’abord les auteurs francophones. On est assez « franchouillard » sur ce plan-là car je trouve normal de défendre d’abord notre création. Et puis, je n’ai pas spécialement de fascination pour les auteurs japonais qui peuvent raconter toujours les mêmes choses dans leurs interviews. On a malgré tout, réaliser un dossier, pour les américains, sur Art Spiegelman (« dBD62 ») par exemple ;  mais on défend d’abord les créateurs français ou les maisons d’édition française qui prennent de vrais risques financiers ou artistiques sur de nouveaux albums, plutôt qu’un éditeur français qui va simplement acheter des droits américains sur un album de Crumb par exemple. On va d’abord défendre une maison d’édition française qui a pris des risques pour sortir des albums originaux et créatifs.

Et les maisons d’édition, elles vous posent des problèmes sur le plan des droits?

Avec les américains, on en n’a pas ; avec les Japonais, on en a, mais on passe outre sinon on ne pourrait jamais rien faire. On ne leur demande plus leur avis sinon on en parlerait tous les dix ans (Rires).  Avec les descendants de Hergé, ça devient carrément impossible de publier du « Tintin », on a donc laissé tomber. Je suis un passionné, je veux prendre du plaisir à ce que je fais et s’il n’y a pas de plaisir, on préfère ne rien faire.

Votre hors-série hommage à Jean Giraud-Moebius (« dBD Hors-série9 ») était assez génial.

 


 

 

Jean Giraud, c’était un grand bonhomme ! On a fini peu à peu par se connaître. A la fin de sa vie, on a passé des moments très agréables ensemble ; quand on a appris sa mort, on était sous le choc même si on s’y attendait. Comme on ne pouvait pas rester les bras ballants, on a voulu marquer le coup et faire dans l’urgence ce hors-série hommage.

Du fait de vos diverses interviews et expériences BD, considérez-vous que le marché BD est devenu de plus en plus difficile?

http://www.acbd.fr/category/les-bilans-de-l-acbd/

C’est vrai que le marché BD a changé, rien que sur le plan de la distribution. De véritables réseaux de distribution se sont développés avec la FNAC, le réseau Album par exemple ; de jeunes auteurs ont pu ainsi s’exprimer et sortir du lot. De mon temps, il n’y avait pratiquement que le réseau des maisons de la presse qui distribuait quasi uniquement des classiques comme « Blake et Mortimer », « Boule et Bill »… C’est sûr qu’actuellement, il y a moins d’auteurs qui peuvent vivre de la BD surtout après la disparition de la presse, mais c’est aussi le cas en littérature.

Constatez-vous des tendances actuelles en BD? Tendances liées aux publications des maisons d’édition d’ailleurs, je pense à « Delcourt » ou « Soleil ».

 


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Je constate qu’il y a toujours, à l’heure actuelle,  des auteurs pétris de talents et très bien formés d’ailleurs par des écoles spécialisées. Avant, il n’y avait pas d’école ou de formation à proprement parler ; maintenant, les trois quarts des auteurs sortent des écoles ; ils ont peut-être moins de choses à raconter sur le plan scénaristique mais d’un point de vue graphique, c’est assez formidable et cent fois supérieur à ce que qui se faisait avant.

Vous éditez des magazines, mais ne voudriez-vous pas aussi créer une maison d’édition BD?

On en a fait mais on a arrêté. Ce n’est pas mon métier, je ne suis pas éditeur. Je préfère aller voir des gens que j’admire, les interviewer et m’enrichir intellectuellement. L’édition c’est un autre métier. Je prends du plaisir à faire ces revues, je ne vois pas l’intérêt de faire de l’édition ; d’autant plus que l’édition BD ou la création BD, il faut s’y consacrer à 100 %.

Vous êtes trois à dBD, A savoir: un graphiste, une secrétaire et vous, c’est toujours le cas?

 


FREDERIC BOSSER:

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Oui, on fonctionne encore à présent comme cela.

A « Casemate », ils seraient une quinzaine…

Je ne connais pas leur organisation !

Une question un peu polémique ; avez-vous vocation à être racheté à terme?

Il ne faut jamais dire non dans ce métier !

Vous avez commencé dans le marché de la BD, en vendant des originaux BD. C’est un drôle de marché, non?

Oui c’est vrai, c’est un marché qui s’est développé au fil des années, avec de vraies côtes pour les dessinateurs connus.

Sur le plan des festivals BD, vous faites les principaux durant l’année? Angoulême, Saint-Malo?

A Saint-Malo plus maintenant, on s’est fâché avec les organisateurs ; on a été partenaire, puis on ne l’a plus été ; on ne va pas aller à un festival qui ne veut plus de nous. On va cependant à Angoulême chaque année. je vais aussi à Aix-en-Provence et Solliès avec qui nous sommes partenaires.

Vos hors-séries marchent mieux que vos numéros normaux?

Pas spécialement, sauf peut-être celui consacré à Jean Giraud-Moebius.

 


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Vous avez un site Internet qui est très bien réalisé d’ailleurs ; avez -vous le souhait de développer un peu plus votre site?

http://www.dbdmag.fr/

Nous n’avons pas vocation de donner de l’information gratuitement. Le site est d’abord un site marchand où on peut commander des anciens numéros et s’abonner.

Actuellement, il existe sur la toile, des site web  qui vous critiquent, établissent des comparaisons entre « dBD » et « Casemate », comme quoi vous seriez plus luxueux et élitiste alors que « Casemate » serait plus populaire et accessible...

 

 

 

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S’ils le pensent, tant mieux, on a le droit de s’exprimer sur Internet. Si je devais écouter tout ceux qui m’aiment ou ne m’aiment pas, je n’aurai jamais rien fait. Je fais ce qui me plaît ; après qui m’aime me suive.

Si vous baissiez les prix de vos revues, vous auriez plus de lecteurs?

Je ne crois pas !

Finalement, vos revues, je les ai aussi découverts dans le réseau des médiathèques et c’est aussi dans ces lieux que vous fidélisez une partie de votre lectorat.

Oui enfin le côté négatif, c’est que si vous les lisez dans les médiathèques, vous ne l’achèterez pas. Je ne sais pas si c’est bien ou pas !

Je pense, pour ma part, que cela vous fait connaître du public provincial et n’être pas seulement considéré comme une revue parisienne.

Oui, oui c’est possible ; de toute manière, on vend plus hors de Paris qu’à Paris.

Sur un autre plan, j’avais beaucoup aimé le dBD de février 2007 où vous faisiez un bilan complet du dernier festival BD d’Angoulême ; dans ce numéro, on apprenait que pour les grandes maisons d’édition, venir à Angoulême entraînait plus de frais que de recettes.

 


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C’est clair que toutes ces maisons d’édition perdent de l’argent pour ce type d’événement. Ce sont de lourds investissements pour eux ; d’autant plus que souvent, ces maisons d’édition n’ont pas vraiment leurs mots à dire sur l’organisation de ce type de manifestation ; c’est l’association liée au festival BD d’Angoulême qui fait encore la loi.

Vous allez continuer personnellement vos conférences ou « master class »?

La « master class » avec Bilal et Christin à Lyon est un peu le fruit du hasard ; je préparais un hors-série sur Christin et on s’est donc retrouvés un peu par hasard pour cette conférence. On m’a proposé donc d’animer ce débat.

https://www.youtube.com/watch?v=EuC0z-rH–o

Une question un peu plus anecdotique, à force de côtoyer tout ces auteurs, scénaristes BD, cela ne vous donne pas envie, vous-même, de faire de la création BD ou d’écrire des scénarios?

Non, non pas spécialement.

Autre chose, si demain, un investisseur cherche à créer une revue BD un peu sur votre propre modèle, il y aurait de la place pour lui sur ce marché?

Pour moi, on avait dit que cela ne marcherait pas ; en fait, ça marche finalement. Je n’ai pas d’avis tranchés. D’autres revues d’art graphique sont sorties et cela a l’air de bien marcher.

Et le concept de « Casemate », avec d’un côté les dessins de l’auteur et de l’autre, ses explications sur ses dessins, vous trouvez cela bien? Vous faites à peu près les mêmes choses, mais pas sous la même présentation.

 

C’est vite chiant je trouve à un moment donné. Lorsqu’on fait un portfolio sur un auteur, c’est largement suffisant ; moi personnellement, je lis rarement les explications d’un auteur sur ses planches BD sauf pour les gens que j’aime bien.

Propos recueillis par Dominique Vergnes



Publié le 02/03/2016.


Source : Bd-best

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