Delaf et Dubuc encore plus vaches : « Les Nombrils, c’est de l’anti-Disney, les gentils ne gagnent pas toujours, c’est la vraie vie »
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Delaf et Dubuc encore plus vaches : « Les Nombrils, c’est de l’anti-Disney, les gentils ne gagnent pas toujours, c’est la vraie vie »

Cela fait plus de dix ans que Les Nombrils, Jenny, Vicky et Karine ont débarqué dans le journal de Spirou pour imposer leur style aussi dévastateur que salvateur dans un monde de l’adolescence pas toujours jojo. De peines de coeur en harcèlement en passant par la « cancre attitude », en sept albums, le tandem (à la ville comme à la planche) Delaf-Dubuc n’a pas hésité à aller voir de l’autre côté et à pousser leurs personnages dans leurs retranchements. À les faire évoluer surtout. À l’heure où la « série-mère » se termine lentement mais sûrement, le duo plonge dans le passé de ses héroïnes en dévoilant leurs vacheries dans une série préquel. Avant un film. Tout un programme et le duo attachant est passé sous le feu des questions.   

 

 

 

 

 

 

 

Bonjour Maryse, bonjour Marc, cela fait déjà dix ans que vous avez créé les Nombrils ! Avez-vous vu le temps passer ?

Maryse Dubuc et Marc Delaf : Oui et non !  On a beaucoup travaillé, alors ça a passé très vite.

Si on revient au début, quelle est la genèse de cette série. Comment avez-vous créé ces trois héroïnes qui comptent ? C’était d’emblée un trio ?

Au départ, ce qui nous amusait c’était de montrer des ados au nombril visible, et qui se prenaient pour le nombril du monde.  Il n’y avait donc que Jenny et Vicky, dans nos têtes.  Mais dès le premier gag, Karine, leur faire-valoir, s’est imposée.  Fort heureusement !

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc

 

Le caractère et les attitudes que vous vouliez leur donner ont très vite émergé ou avez-vous mis du temps à les affiner ?

Jenny et Vicky, à la base, étaient plutôt deux jumelles d’esprit, l’une complétant la phrase de l’autre sans distinction.  Mais comme Les Nombrils, c’est avant tout de l’humour, deux caractères très différents nous sont fort utiles pour avoir des dialogues plus divers et savoureux.

Leur magazine historique, c’est Le Journal de Spirou. Mais le chemin vers ce journal était-il tout tracé ou avez-vous démarché d’autres éditeurs (au Québec, notamment ?) avant Dupuis ?

La série a d’abord été publiée dans un magazine québécois puis, lorsque nous avons eu suffisamment de pages à présenter, nous avons envoyé notre projet chez Dupuis.  On s’attendait à un refus, car on imaginait mal nos pestes dans Spirou, entre Cédric et Yoko Tsuno !  Mais c’est ce ton différent, non standardisé, qui a plu à notre éditeur, Benoît Fripiat.  Dès le départ, il nous a dit : faites tout ce que vous voulez, ne vous censurez pas !  C’est ce que nous avons fait, en restant tout de même conscients que Spirou est également lu par de très jeunes lecteurs.  Mais Les Nombrils, pour nous, c’est clairement une série tout public, et non une série jeunesse, alors on tient à ce que le lecteur adulte s’y retrouve aussi.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc


 

Il n’y a pas si longtemps, les Journal de Spirou organisait des référendums autour de ces séries. Faire bonne impression dès les premiers épisodes est donc primordial. Vous vous souvenez des premiers retours des lecteurs ? Vos héroïnes ont-elles de suite été « adoubées » ?

Au départ, le ton a surpris un peu, certains détestaient même franchement.  Il faut dire que dans les premiers gags, Karine s’en prenait vraiment plein la gueule.  Le projet était encore jeune (il n’y avait que 9 gags dans le dossier présenté à Dupuis), et c’était justement ce qui nous avait motivés jusque là : faire de l’anti-Disney.  Le slogan en 4e de couv est venu très tôt, d’ailleurs : «La vie est cruelle.  Et puis après ?».  En effet, dans Les Nombrils, les gentils ne gagnent pas toujours, ne sont pas systématiquement récompensés pour leurs efforts.  Comme dans la vraie vie !  C’est cruel, mais quelque part, c’est réaliste.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc

 

Comment expliquez-vous ce succès ? Ce type d’humour corrosif, très raccord à ce que nos jeunes peuvent vivre, manquait-il jusqu’ici dans le monde de la BD ?

Mais on ne l’explique pas !  Au départ, on faisait une seule page par mois pour un magazine québécois, c’était l’un de nos dix projets en chantier, on ne s’imaginait jamais que Les Nombrils finiraient par prendre toute la place !  On se voyait plutôt faire du roman graphique.  J’imagine que la série répond à un besoin, à une envie de se faire parler «des vraies affaires». Il y a peu de séries mettant en scène des personnages féminins, et encore moins qui sont scénarisées par une fille.  Un homme, quel que soit son niveau de sensibilité, n’a jamais vécu ce que c’est qu’être une adolescente, découvrir ce que ça fait de commencer à avoir des formes et attirer les regards, l’attention…  Moi, je sais quelles vacheries les filles peuvent se faire entre elles pour de vrai, et à partir de là je peux pousser plus loin et m’en amuser.  Je m’accorde un certain droit à me moquer des travers féminins et ça, peu l’ont fait jusqu’ici, en bande dessinée en tout cas.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc/BenBK chez Dupuis

 

Mais surtout, je crois que la nature évolutive de la série plait beaucoup.  Marc et moi avons chacun nos forces : lui est spécialiste du gag alors que moi, je me concentre davantage sur l’histoire, les dialogues et la psychologie des personnages.  C’est un mélange rare et nous nous sommes souvent arrachés les cheveux pour assouvir nos envies à tous les deux dans des récits qui comptent à peine 44 pages !

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc

 

Avec quand même plus de 400 000 fans rien que sur la Page Facebook ! Des héros Canado-Franco-Belges qui ont atteint ce pic, il n’y en a pas des masses ! Cela s’explique-t-il par le fait que finalement Jenny, Vicky ou même Karine pourraient très bien faire partie de nos amies « virtuelles » ? Cela vous a-t-il obligé à vous investir dans ces réseaux sociaux ?

Nous avons fait le choix de nous investir dans les réseaux sociaux, particulièrement Facebook et Instagram, pour rester proche de nos fans.  Ça nous permet un contact plus proche avec davantage de lecteurs, plutôt que les traditionnelles séances de dédicaces à la chaîne.  C’est aussi dû au fait que la série est aussi populaire en France qu’en Belgique, en Suisse ou au Québec : ça fait un large territoire à couvrir !  Ça nous prend pas mal de temps, nous avons même engagé une Community Manager pour nous aider afin de garder encore un peu de place pour faire des planches !

Les « followers » correspondent-ils aux lecteurs ou y’a-t-il des différences ? Ont-ils les mêmes attentes ? Les réseaux sociaux ont-ils permis de rallier de nouveaux lecteurs à la cause des Nombrils ?

Difficile de dire si ce sont les mêmes.  On a des lecteurs qui n’ont jamais pensé à nous suivre sur Facebook (sinon, on serait bien à 2 millions de followers!), et à l’inverse, il y a des gens qui nous suivent sur Facebook mais n’ont pas nos albums.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc/BenBK chez Dupuis

 

Cela dit, vous ne vous êtes pas reposés sur vos lauriers, repoussant vos héroïnes dans leurs retranchements, leur faisant subir des évolutions inattendues (qui aurait pu dire que Karine s’affranchirait d’une telle manière de l’emprise de ses comparses ?). Si bien qu’en « seulement » neuf albums, la série a pris pas mal de galon sans jamais se défraîchir. Cette évolution était claire dans vos esprits dès le début ? Vous était-elle nécessaire pour inscrire la série dans la durée ?

Bien des gens croyait que la série se terminerait après cette évolution de Karine.  Ça aurait bien pu arriver, qui sait ?  Nous avons le goût du risque, je suppose !  Ce grand tournant dans la série, que nous avons pris dès la fin du quatrième tome, était une envie que nous avions.  Accro aux séries télé, nous adorons les cliffhangers de fin d’épisode ou de saison.  Et nous apprécions d’autant plus quand les auteurs assument ce changement dans la saison suivante et poursuivent l’évolution de leur histoire (alors que ceux qui se permettent le procédé du «ce n’était qu’un rêve» nous font rager !).

Quitte à aller au « point de non-retour » ?

Nos personnages évoluent, l’histoire avance, le temps passe…  La série aura une véritable fin.  Nous l’avons toujours dit.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc

 

Sortir de votre « zone de confort » a-t-il pu perdre des lecteurs en route ?

Possible !  Mais j’ai l’impression que c’est plutôt l’inverse.  Des gens nous disent : au début, je croyais que c’était sans intérêt, Les Nombrils, juste une autre série à gags…  Et puis finalement, au fil de l’histoire, j’ai véritablement accroché et je suis impatient de connaître la suite !

C’est ce point de non-retour qui vous a donné envie de retrouver les bases, la naïveté originelle dans les Vacheries des Nombrils ? Du coup, comment doit-on prendre ce premier tome ?

C’est une récréation, un retour à l’ADN de la série.  Nous avions la sensation de ne pas avoir pleinement exploré toutes les possibilités qui s’offraient à nous.  L’envie de retourner aux bases s’est imposée à nous, de faire du gag pur, de revenir à une lecture plus légère.  Il faut dire qu’avec les derniers tomes, on est passés du polar au thriller psychologique, tout en traitant d’intimidation, d’homosexualité, de suicide…  Un peu de légèreté s’imposait !

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc

 

C’est un prequel, c’est ça ? Finalement vous revenez au niveau zéro, avant même le premier tome ? Ça impose des restrictions, des difficultés ? De ne pas causer de « paradoxe temporel » (tout est relatif, nous ne sommes quand même pas dans Retour vers le futur) ni d’empiéter sur la série mère ?

Oui, une sorte de prequel.  Ça nous permet de développer des personnages qui n’avaient plus leur place dans la série principale, comme Murphy ou John-John le motard toujours casqué !  On s’amuse à mettre de petits clin d’oeils ici et là, précurseurs de ce qui viendra dans la suite de la série, et aussi ça nous permet d’approfondir l’origine des relations entre les personnages, comme ce gag où, en l’absence de Jenny, Vicky et Karine jouent à la poupée et où l’on comprend qu’elles ont malgré leurs différences de l’affection et de l’admiration l’une pour l’autre.

Tout en évitant les redites par rapport aux premiers gags, non ? Vous les avez relus ?

Bien sûr, on les relit assez fréquemment !  On les a déjà assez clairement en tête mais on relit quand même pour garder une cohérence avec ce qui va venir après dans le reste de la série.  On essaie aussi de ramener de petits gags récurrents, comme le couple qui mange toujours de la crème glacée, ou escalator-man, le figurant qui ne peut résister à un escalator !

Cela va vous permettre d’apporter du sang neuf, des nouveaux personnages ?

Possible, mais il s’agit plutôt d’explorer les petites zones d’ombres qui n’ont pas encore été éclairées, faute d’espace dans les albums.  L’air de rien, tout va très vite dans Les Nombrils.  Si les albums comptaient 200 pages chacun, on aurait eu le temps de tout explorer, mais à 44 pages, il y a beaucoup de pistes que nous avons été forcés de laisser de côté.  Il faut aussi considérer qu’avec trois personnages principaux, et toute une galerie de personnages secondaires, on n’a pas la place pour les laisser tous s’exprimer, il faut toujours  élaguer, raccourcir, choisir ce qui sert le mieux notre histoire.  Dans Les Vacheries, on peut s’amuser un peu plus simplement.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc

 

 

Parmi Les Vacheries, les inconditionnel(le)s des Nombrils remarqueront l’une ou l’autre planche qui n’avait pas été retenue pour la série régulière et que les auteurs avaient partagé sur Facebook, il y a déjà quelques années.

 

J’ai finalement l’impression qu’après plusieurs albums, de plus en plus d’auteurs aiment passer du gag à des histoires plus longues qui tiennent sur 48 planches sans délaisser les ressorts comiques des fins de planches. Comment en êtes-vous arrivés là ?

Dès le premier tome, nous avons conclu l’album avec un happy end pour l’histoire d’amour Karine et Dan.  Ça nous semblait essentiel car Karine en avait bien bavé dans cet album.  Ensuite dans le deux, Vicky ayant été extrêmement vache, elle méritait bien d’être punie !  Puis dans le trois, il nous semblait qu’il était temps de révéler le secret de John John, et Karine, elle, se faisait faire un vrai sale coup par Mélanie, qui lui a piqué son petit ami.  Et ainsi de suite dans le quatre, où Karine décide d’arrêter d’être une victime et se transforme physiquement et mentalement, puis le cinq où elle prend sa vengeance, le six où un tueur en série rode dans la ville et enfin le sept, où les trois filles découvrent leur vraie nature dont Vicky, son homosexualité qu’elle n’arrive pas à accepter, et ses parents encore moins…  En seulement 300 planches, à chaque fois tournées en gags, c’était une course contre la montre !

 

 

 

 

© Delaf et Dubuc pour la couverture d’un Spirou spécial vacances


Comment vous est venue l’idée de ce retour en arrière ? Vous êtes-vous un peu lassés de ce qu’était devenu vos personnages ?

On ne peut pas se lasser de ce qui est nouveau !  Nos personnages évoluent constamment.  La Vicky du tome 1, ce n’est pas la Vicky du tome 7.  D’ailleurs, ce personnage est un cas intéressant : au départ, peu de lecteurs l’appréciaient alors que maintenant, elle est la préférée de plusieurs !  C’est un défi que nous nous étions donné, de faire apprécier ce personnage de résiliente qui, malgré les apparences, a surtout besoin d’être aimée.

Au contraire, je dirais plutôt qu’on s’ennuyait de nos personnages tels qu’ils étaient au départ parce qu’après tout, la situation n’est pas restée stable bien longtemps avant qu’ils évoluent !  Nous avions envie de retourner aux sources de ce qui, au départ, nous a motivés à lancer Les Nombrils.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc/ BenBK chez Dupuis

 

Ou est-ce plutôt une manière d’enclencher le mode pause pour mieux envisager la suite à donner à la série « régulière » ?

Il y a un peu de ça.  Comme la série aura une réelle conclusion, et que celle-ci approche (nous envisageons une dizaine d’albums au total), à ce moment-ci nous avons besoin de prendre un peu de recul et de placer nos pièces de puzzle d’ici la fin.  Nous réfléchissons toute la conclusion de la série comme un tout.  Ça fait beaucoup de choses à mettre en place et ça prend un peu de temps, évidemment !

Dupuis vous a-t-il directement suivis dans cette échappée ?

Depuis le début, la relation de confiance est totale avec notre éditeur.  Nous avons eu une chance incomparable de tomber sur Benoît Fripiat, qui n’a eu de cesse de nous encourager à laisser libre cours à nos envies les plus folles.  En 2006, une série de gags qui devient évolutive, c’était loin d’être courant !

Au fait, n’avez-vous pas parfois peur que les lectrices se projettent plus en Jenny et Vicky qu’en Karine ? Auriez-vous aimé être des ados à l’heure actuelle ?

Jamais personne ne se voit en Jenny !  Par contre, quelques personnes se sont identifiées à Vicky et dans certains cas, ça a résulté en une prise de conscience : nous avons eu un jeune homme en larmes, qui est venu nous expliquer que la lecture des Nombrils lui avait fait réaliser qu’il était lui-même un intimidateur, et lui a donné envie de changer.  Nous avons également eu une jeune femme qui nous a dit que grâce à Vicky, sa jeune soeur avait réouvert le dialogue avec elle, alors qu’elles étaient en froid depuis qu’elle avait ouvertement parlé de son homosexualité.  Et le personnage d’Albin l’albinos a permis à une autre jeune femme d’accepter sa propre différence et de réaliser qu’elle était sa force, pas son handicap.  Donc je crois que peu importe en quel personnage les lecteurs se reconnaissent, l’important c’est la réflexion que ça les amène à poser.  Depuis le début, nous avons fait le pari de nous fier à l’intelligence de nos lecteurs, et c’était le bon chemin à suivre.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc


 

Être ado à l’heure actuelle n’a rien de facile, mais ça ne l’a jamais été.  Aujourd’hui tout va plus vite, c’est sûr, mais les angoisses restent les mêmes : les autres vont-ils m’accepter ?  Suis-je trop différent, ou pas assez unique ?  Qu’est-ce que je veux, de quoi j’ai envie, qui je suis, qu’est-ce qui me caractérise ?  Pourquoi je suis comme ça ?  Est-ce que ça va changer ?  Qu’est-ce que les autres pensent de moi ?  Ont-ils raison ?

Bref, l’adolescence, il faut bien l’admettre, ce n’est pas la période la plus facile.  Mais c’est aussi une période super excitante car pleine de premières fois.  C’est pour ça que c’est si passionnant de raconter l’histoire de trois jeunes filles !

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc/BenBK chez Dupuis

 

Sur combien de tomes sont prévues les Vacheries ?

Il nous reste encore plein de pistes et d’idées à explorer, mais n’avons pas fait de plans à long terme. Il y aura certainement un deuxième tome, d’ailleurs il devrait contenir encore plus de surprises et d’explications sur les origines de l’histoire et des personnages. Le plus important pour nous, c’est que ça reste une récréation, alors on navigue aux envies.

Finalement, comment fonctionne votre duo ? Chacun a ses tâches dans la création ? Vous vivez ensemble, cela veut-il dire que vous pouvez penser aux Nombrils à n’importe quel moment de la journée ?

Au départ, je scénarisais seule et je coloriais alors que Marc se chargeait des découpages et du dessin.  Maintenant, nous avons BenBK qui prend en charge la couleur, nous scénarisons à deux et Marc se charge toujours du dessin.

C’est une constante partie de ping-pong entre nous deux, nous nous relançons les idées constamment.  Oui, ça peut arriver à n’importe quel moment de la journée !  Le meilleur moment pour relaxer, pour nous, c’est…quand l’album est terminé !

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc/BenBK chez Dupuis

 

Si vous nous parliez un peu de vous ! Qu’est-ce qui vous a mis sur la voie de la BD ? Des BDs québécoises ou des BDs venues de l’Europe ?

Marc a toujours lu beaucoup de bande dessinée, principalement européenne.  De mon côté j’étais plutôt roman jusqu’à ce que je rencontre Marc, qui m’a fait découvrir la bande dessinée à l’époque de la ‘Nouvelle bande dessinée’, avec la création d’éditeurs alternatifs comme l’Association.

Marc a toujours rêvé de faire de la bande dessinée, alors que de mon côté j’ai toujours eu envie de raconter des histoires.  L’envie de travailler ensemble s’est développée très naturellement, et nous n’avons connu que ça : nous nous sommes rencontrés à 17 et 21 ans, et nous avons toujours collaboré.  D’abord c’était dans l’illustration de manuels scolaire, puis en animation, en livres illustrés ou en romans jeunesse.  La bande dessinée, ça a été plus long à mettre en place car du Québec, les éditeurs semblent inatteignables et un projet de bande dessinée, ça demande beaucoup d’investissement de temps avec zéro rentrée financière.  On a tout mis en oeuvre pour se donner une chance de vivre de notre passion, allant jusqu’à vendre notre maison !  Ça aura valu le coup !

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc

 

Qui sont vos maîtres finalement, les auteurs vous ayant inspiré d’une manière ou d’une autre ?

Franquin, Gosciny, Lewis Trondheim, Dupuis-Berberian, Christophe Blain, Posy Simmonds, Bill Watterson…  Il y en a tellement !

Quel était l’état de la bd québécoise à l’époque ? Le secteur a-t-il évolué ? Est-il différent du monde franco-belge de la BD ? Y’a-t-il des liens qui se créent entre les auteurs québécois ?

À l’époque où nous avons commencé, quasi personne au Québec ne vivait de bande dessinée.  Quelques dessinateurs arrivaient à tirer leur épingle du jeu en illustrant des scénarios d’auteurs européens, pour des éditeurs européens également.  Il commençait à y avoir quelques éditeurs québécois, mais aucun ne pouvait se risquer à publier une bande dessinée cartonnée couleurs.  C’est encore très difficile, mais le milieu est en pleine effervescence et de plus en plus d’auteurs publient et peuvent vivre de leur plume.  Enfin !

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc chez Dupuis

 

N’avez-vous pas des envies d’explorer de nouveaux univers ? Peut-on vous attendre sur d’autres projets ?

Oui, bien sûr, les envies ne manquent pas !  Pour l’instant, on se concentre sur Les Nombrils et Les Vacheries, mais il y aura un après.  De quoi sera-t-il fait ?  Aucune idée.  Ce sera peut-être de la bande dessinée, peut-être même pas.  Ce qui nous intéresse, c’est de raconter des histoires, mais il y a plusieurs moyens d’y arriver.

Les Nombrils au cinéma, c’est un projet dans l’air depuis un moment. Quelles sont les dernières nouvelles ? Y serez-vous directement impliqués ? Un projet québécois ou européen? Dessin animé ou live ? Déjà un casting ? Bref que pouvez-vous nous dire dessus.

Oui, ça fait longtemps que ça se discute ! C’est un cas un peu compliqué, car Les Nombrils c’est une série québécoise par deux auteurs québécois, mais le plus gros marché est la France. Donc après tout ce temps, il semble que ce sera une coproduction franco-québéco-belge, en live. Marc et moi avons écrit nous-mêmes le scénario, il s’agit d’un prequel où l’on explique comment est née l’amitié entre les trois filles lors du passage d’une méga-vedette dans leur petite ville. Le réalisateur est trouvé et il reste à finaliser les financements. Donc le casting, ça pourrait être pour assez bientôt… C’est un projet très excitant !

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc/BenBK chez Dupuis

 

Mais revenons à la BD. Que va-t-il arriver aux Nombrils ? Vous pouvez nous en dire plus ? Ou vous-mêmes ne savez-vous pas spécialement ?

Nous allons poursuivre pour encore quelques albums.  Nous avons encore plusieurs événements marquants en banque, des moments incontournables de la vie de nos personnages par lesquels nous sommes impatients de les faire passer.  Nous préférons ne pas trop en parler parce que, nous connaissant, nous savons que de toute façon, ça va changer encore des dizaines de fois avant de se retrouver dans un album !  Notre galerie de personnages est tellement riche, je me demande si nous allons arriver à tout faire tenir en seulement trois albums supplémentaires, c’est à voir.  L’important, c’est que le plaisir soit toujours là, tant pour nous que pour les lecteurs.

 

 

 

 

© Delaf & Dubuc/BenBK chez Dupuis

 

 

Et jusqu’ici, il n’a jamais failli. Je vous en souhaite beaucoup, du plaisir !

 

Propos recueuillis par Alexis Seny



Publié le 08/06/2017.


Source : Bd-best

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