Pas une nuit sans cauchemar, pas une seconde sans qu’il ne revive cette journée dans ses moindres détails. Non, il ne s’agit pas de Jérôme, mais de Denis, le fils d’Antoine Oliveira, garagiste à Villard-le-Vieux, dans les Alpes de Haute-Provence. Aujourd’hui, ce village n’existe plus. Jérôme est chargé par un notaire de porter une lettre à Antoine. Pour une fois que Babette accompagne son détective chéri, le séjour ne sera pas de tout repos. Antoine, cet ermite accusé du meurtre de sa femme, a purgé sa peine. La missive apportée par Jérôme va une nouvelle fois bouleverser sa vie. Mais que s’est-il passé quarante ans plus tôt ?

Jérôme a un rôle relativement passif dans cet épisode. Le couple qu’il forme avec son hôtesse de l’air continue à évoluer dans une relation où Babette affiche sa force de caractère. C’est une femme moderne, une working girl qui montre ses sentiments, ses certitudes et ses doutes. Elle n’hésite pas à prendre le pas dans les décisions à prendre.

 

 

 

 

Après un apprentissage du scénario aux côtés de Le Tendre et Makyo pour lancer la série il y a plus de trente ans, ça fait belle lurette qu’Alain Dodier est seul maître à bord. Et quel bon travail. Rien n’est innocent dans le passé et la psychologie de ses personnages, quel que soit leur degré d’importance, qu’ils apparaissent sur quelques pages ou sur un album entier. Comme dans les romans d’Agatha Christie, tous les protagonistes ont de l’épaisseur. Le point commun n’est pas ici du côté policier, mais bien du côté construction narrative des acteurs. Par ailleurs, les alternances passé/présent sont explicites, bien pensées et bien réparties. On est tenu jusqu’au bout, jusqu’au final encore plus surprenant que ce qu’on attendait, qui se produit alors que l’on croyait que tout était terminé.

 

 

 

Le décor est aussi important pour Dodier. Après avoir envisagé de situer son histoire dans les Pyrénées, il s’est rabattu sur les Alpes grâce à des photos qu’il avait prises lors d’un séjour au ski dans les années 70. Et Dieu sait si un décor peut stimuler l’imagination. Loin de proposer un reportage photographique, l’auteur s’approprie les lieux et les transpose dans une ligne semi-réaliste de très grande qualité.

Dodier est un artisan. Il met près de deux ans pour faire un album. Ça se voit, ça se sent, c’est solide.

 

Laurent Lafourcade

 

Jérôme K Jérôme  Bloche 24 : L’ermite, Dodier, Dupuis

12 €, 56 pages

ISBN : 9782800157580

Publié le 18/06/2014.