« - Désolée de t’avoir fait attendre, Philippe.
- Vingt-cinq ans, ce n’est pas si long.
- Tu as l’air meurtri, comme si je t’avais manqué.
- Tu te trompes.
- Si tu le dis… Depuis que tu as appris que je vivais à Barcelone, tu t’y rends chaque année. Peut-être dans l’espoir de m’y croiser… On peut en parler, tu sais. Tu veux savoir pourquoi je t’ai quitté ?
- J’aimerais plutôt savoir pourquoi tu m’as fait venir de Paris. »
Sophie a demandé à Philippe son ex-mari, flic parisien, de venir dans la capitale catalane. Leur fille, dont il apprend en même temps l’existence, vient de se suicider. Comme lui, elle adorait Jacques Brel et le chocolat blanc. Elle aurait aimé lui dire tant de choses. Mais en se penchant sur la vie de sa fille, Philippe Martin va découvrir que l’affaire n’est pas celle d’une simple disparition.
Le trait de Berthet, c’est l’élégance incarnée. Depuis ses débuts et une certaine « Couleur café », le dessinateur porte un trait qui a de la classe. Si le Sean Connery de James Bond était une BD, il serait un album de Berthet.
Là où Berthet réussi une œuvre cohérente, c’est qu’il semble mettre son âme à l’intérieur de ses personnages, comme un acteur incarne les rôles qu’il joue. Le privé d’Hollywood, c’est lui, il lui ressemble. Philippe Martin, héros de cet « art de mourir », c’est lui ; ils ont le même prénom. Même Dottie, dans Pin-Up, ce doit être lui.
Avec la collection Ligne Noire, Berthet reproduit le principe de collection qu’il avait chez Dupuis au milieu des années 80, mais avec une thématique précise, celle du polar noir. Raule, scénariste de Jazz Maynard, propose à son dessinateur un scénario sur mesure.
L’histoire a pour originalité de partir d’une situation finale et d’essayer de comprendre comment on a pu en arriver là. Comme son nom l’indique, « L’art de mourir » est une histoire de mort, mais aussi une histoire d’art. Emma, la victime, était sur le point de décrocher un doctorat en histoire de l’art avec une thèse sur le suicide dans l’histoire de l’art. La boucle est bouclée.
En laissant dissimulé le visage de Sophie tout au long des planches dans lesquelles elle apparaît, les auteurs ajoutent au mystère du triangle familial entre la fille décédée et ses parents séparés.
Qui mieux que Dominique David peut comprendre le trait de son compagnon pour l’envelopper de couleurs en osmose ? Personne. La coloriste est indissociable de l’œuvre du dessinateur.
Si mourir est un art, en découvrir la cause en est un autre beaucoup plus complexe.
Laurent Lafourcade
One shot : L'art de mourir
Genre : Polar
Scénario : Raule
Dessins : Berthet
Couleurs : David
Éditeur : Dargaud
Collection : Ligne noire
Nombre de pages : 64
Prix : 14,99 €
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