Nouvelles relatives à la bande-dessinée ou au graphisme
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Les brisures de la vie.  Les contes des cœurs perdus 9 - Mitsuko

 

"-Oscaaaaaar ?! Où est encore passé ce petit courant d'air ?

-Tu m'as appelé, maman ?

-Dis donc, toi ! Tu as disparu sans prévenir !

-C'est parce que j'étais avec ma copine Mitsuko !"

 

 

 

 

 


                Oscar, le fils de la nouvelle boulangère du village de Klervi, a une bien drôle de fréquentation. Qui est cette amie Mitsuko avec qui il était ? Sa mère s'inquiétait. Il est tard. C'est l'heure du goûter et il a encore ses devoirs à faire. Mitsuko n'est pas très bavarde. La boulangère l'a aperçue en train de fouiller les poubelles d'en-face alors qu'elle vidait la sienne. Les habitants savent vaguement que c'est une petite orpheline. Sa mère n'était pas d'ici et son père serait Séraphin, le garde-forestier. Les gens la prennent pour une marginale. Toujours est-il qu'elle a des oreilles de renard et qu'une queue du même acabit sort de sa jupe fuchsia. Seul Oscar la considère. Il la fait rire et l'invite même à goûter dans sa cabane. Cependant, il ignore qu'elle a un secret.

 

© Clément, Leng - Delcourt

 

                Neuvième conte des cœurs perdus signé Loïc Clément. Comme pour les précédents, le scénariste écrit une histoire tout en sensibilité, une ode à la tolérance et au vivre ensemble. Avec Mitsuko, il reprend le mythe de l'enfant de la forêt, faisant de la jeune femme une Huckleberry Finn au féminin. Elle fait des incursions en ville où la population ne veut pas trop d'elle. Elle habite une cabane dans les bois avec son père, veuf, un marginal qui n'arrive pas à communiquer avec elle. D'ailleurs, ses oreilles et sa queue de renard, est-ce un déguisement ou de réelles parties de son corps ?

                C'est Anne Montel qui a fait découvrir à Loïc Clément le travail de Qin Leng, illustratrice et autrice d'albums pour enfants. Elle a beaucoup travaillé pour la télévision. Elle a illustré des livres, des magazines, réalisé des couvertures, pour des éditeurs du monde entier. Elle vit à Toronto. Séduite par le concept des Contes des cœurs perdus, elle a accepté de dessiner cette fable avec une grande délicatesse. C'est sa toute première bande dessinée, mais elle a déjà un nouveau projet de one shot en route avec Loïc Clément.

 

© Clément, Leng - Delcourt

 

                Mitsuko est une histoire sur l'acceptation de la différence. Ce n'est pas parce que quelqu'un n'est pas comme nous qu'il faut s'en moquer, le chasser ou en avoir peur. Comme le montre la sublime couverture, Mitsuko est un récit de cassures, de brisures, qu'il faudra certainement recoller, au figuré comme au propre. Mitsuko est aussi une histoire sur le deuil, sur la communication pas toujours facile entre ceux qui restent. Entre tous les personnages, seul Oscar pourrait faire le lien, le fil de la vie, par son empathie, par son innocence, par sa simple présence. Souvent, c'est de l'enfance ou des enfants que viennent les solutions. Ha, aussi, il est question d'art dans cette histoire, d'art qu'on laisse en héritage, mais on ne peut en dire plus sans être trop indiscret. Juste que l'art, ça peut sauver des vies.

 

© Clément, Leng - Delcourt

 

                Neuf albums et pas une fausse note. Les contes des cœurs perdus est une série d'anthologie remarquable par ses récits dont aucun ne ressemble à un autre mais où tous sont réunis par une grande humanité. 

 

Laurent Lafourcade

 


Série : Les contes des cœurs perdus

Tome : 9 - Mitsuko

Genre : Fable poétique

Scénario : Loïc Clément

Dessins & Couleurs : Qin Leng

Éditeur : Delcourt

Collection : Jeunesse

ISBN : 9782413077404

Nombre de pages : 40

Prix : 11,50 €

 



Publié le 10/06/2024.


Source : Boulevard BD


Le jour le plus long.   La fine équipe 2 – Débarquement à Juno Beach !

 

"-Encore un p'tit dernier, collègue… Euh, comment tu t'appelles, déjà ?

-Fonce-Bouchure, pour vous servir !

-Approche, Fonche-Boussure, maintenant qu'on est cochons comme copains, j'vais te l'dire, mon secret… En Normandie, le 6 juin, va y avoir un grand ravalement, euh non, un grand chambardement, non, zut, euh…"

 

 

 

 

 


                Mai 1944, à Bricourt-sur-patte en pleine occupation allemande, Fonce-Bouchure arrive à vélo au petit bar de Babette. Une voiture percluse de balles façon gruyère est stationnée devant l'établissement. Elle appartient à Diane, une aristocrate pomponnée, et sa petite troupe, dont Loïc, un ami de longue date, costard-cravate, diplomate au Quai d'Orsay. Après quelques verres de Pousse d'Epine, un nectar local, ce dernier dévoile qu'un événement va se produire le 6 juin en Normandie : les Alliés s'apprêtent à débarquer. "Mais chut, c'est un secret…" Un débarquement, depuis le temps qu'on l'attendait. Faut prévenir Maurice ! La fine équipe décide de filer un coup de main aux alliés. Direction la Normandie ! Il ne faudrait pas que ce traître de quincailler qui a tout entendu au comptoir prévienne l'ennemi.

© Coicault, Fraiscinet, David - CasaBD

 

                La double bande, celle de Diane et la fine équipe, vont se diviser en deux. Une partie va partir avec la camionnette Citroën de Maurice pour faire sauter les ponts et ainsi empêcher les nazis d'avancer. Les autres vont rafistoler l'avion qu'ils ont piqué aux boches il y a trois ans. Il y a du boulot. Il est bancal et orné d'une Swastika. Opération bricolage et peinture en perspective, ce qui vaudra au moyen de transport une très originale couleur rose, ceci dit sans spoiler puisqu'on le voit en couverture.

                Fred Coicault et Jean-Christian Fraiscinet poursuivent les aventures des personnages issus du spectacle éponyme de plein air joué chaque année, en juin, à la ferme théâtre de Bellevue, à Villentrois-Faverolles en Berry dans l'Indre, fresque humoristique sur la résistance. Le scénario écrit à quatre mains est mené tambour battant et l'histoire se lit à la vitesse des événements. La lecture s'accélère sans qu'on ne puisse rien y faire. C'est étonnant. On est en pleine immersion. La scène de l'avion de la fine équipe le Day-D est un grand moment d'action et d'humour comme on en fait peu. On se surprend à rire tout fort. Les dialogues sont finement écrits. Audiard n'aurait pas renié certains d'entre eux. L'émotion est également au rendez-vous lorsque la camionnette des dynamiteurs traverse le village dévasté d'Evrecy.  Au dessin, Coicault est de ces dessinateurs au style franco-belge de la meilleure époque. Ça pulse.

 

 © Coicault, Fraiscinet, David - CasaBD

 

La série est aussi un hommage à de grands films du cinéma français. Quand les "plastiqueurs" s'occupent de dynamiter les ponts, on ne peut s'empêcher de se remémorer à la réplique culte de La septième compagnie : "Le fil rouge sur le bouton rouge, le fil vert sur le bouton vert." Ici, elle n'y est pas, mais les protagonistes ne sont pas tout le temps plus adroits. Quand il est question de bouquet de marguerites, on aperçoit case suivante Fernandel et la justement nommée Marguerite de "La vache et le prisonnier". Il y a aussi Bourvil, tout droit sorti du Mur de l'Atlantique. Clin d'œil également à Charles Trenet, à Roch Voisine (incroyable !), ainsi qu'à Benny Hill dans une dynamique et dynamitée scène de poursuite comme on en voyait en fin de chaque épisode sur la musique Yakety Sax de Boots Randolph et James Rich.

 

© Coicault, Fraiscinet, David - CasaBD

 

                A présent que la France se libère, on espère que La fine équipe n'a pas fini d'en découdre avec les troupes allemandes. Qui sait ? Peut-être qu'on les retrouvera quelques mois plus tard à la capitale ou bien en Allemagne au Nid d'Aigle ? En attendant, fêtons avec eux les quatre-vingt ans du débarquement.

 

Laurent Lafourcade

 


Série : La fine équipe

Tome : 2 – Débarquement à Juno Beach !

Scénario : Fred Coicault & Jean-Christian Fraiscinet

Dessins : Fred Coicault

Couleurs : Sophie David

Éditeur : CasaBD

ISBN : 9782380584837

Nombre de pages : 48

Prix : 15,95 € 

 



Publié le 10/06/2024.


Source : Boulevard BD


Bizu, Spirou et compagnie.  Fournier Ma vie de rêves  Fournier Ma vie de rêves

 

"-Bonjour, Monsieur Rosy. J'ai complètement revu mon histoire.

-Ah ! C'est bien, on va voir ça. Ben, c'est bon, vous avez bien bossé. Je vous propose d'aller voir Yvan Delporte , le rédac-chef.

-Oui, bien sûr.

-Yvan, voici Jean-Claude Fournier dont tu as vu les planches."

 

 

 

 


                Lorsque Jean-Claude Fournier arriva ce jour-là à la rédaction du journal Spirou pour essayer d'enfin placer ses planches de bandes dessinées, il était loin de se douter qu'après Maurice Rosy et Yvan Delporte, il allait rencontrer le grand patron, Monsieur Charles Dupuis, en personne. Il est embauché. Son rêve est en train de se réaliser. Mais avant ça, le chemin fut long. Il le sera aussi ensuite. Tout est raconté par l'auteur en personne dans ce biopic en courts récits tranches de vie, intercalées par des explications illustrées. Dans sa préface, Emmanuel Lepage explique que Fournier, accueilli par Franquin dans les années 60, a rendu la pareille en transmettant tout son savoir à de nombreux auteurs, dont lui, aujourd'hui reconnus de la profession. Jean-Claude Fournier prend ensuite la main pour raconter sa vie et sa carrière, depuis son premier jour.

© Fournier - Daniel Maghen

                Fils d'un père garagiste, il déteste le sport qu'il juge violent. A la faveur d'un concours de bande dessinée sur le thème de la sécurité routière proposé aux élèves des Côtes-du-Nord, le jeune Jean-Claude se révèle et gagne…un ballon de foot pour toute la classe. Un cauchemar. Chez son tonton Albert, il passe des heures à observer un bateau dans une bouteille. Il ne sait pas encore qu'en découlera des années plus tard une aventure de Bizu. Ado, sa mère se met en colère contre lui parce qu'il passe des heures à lire des illustrés au lieu de suivre les cours.

© Fournier - Daniel Maghen

                Noël 1965, Fournier renonce à un stage de directeur de colonies de vacances pour répondre à une invitation de Franquin. Cette décision va définitivement changer sa vie. Il entre dans l'atelier du maître aux côtés duquel il apprendra les rudiments du métier. Le dessinateur de Spirou et Fantasio lui présentera Maurice Rosy et la rédaction du journal Spirou dirigée par un certain Yvan Delporte. Il y croise Raoul Cauvin qui fait des photocopies et n'a pas encore commencé sa carrière de scénariste renommé. La poésie de Spirou envahit les pages de l'hebdomadaire avant que son papa ne se voit confier la destinée du héros fer de lance de la maison d'édition : Spirou en personne. Fournier dégaine les anecdotes qui raviront les amoureux de l'âge d'or de la bande dessinée franco-belge. L'Ankou marquera certainement le sommet de sa carrière, avant que quelques années plus tard on ne lui retire, ou plutôt qu'on l'invite à se retirer des aventures de Spirou.

© Fournier - Daniel Maghen

                La mésaventure permettra à Bizu de revenir sur le devant de la scène, mais d'abord chez un autre éditeur, puis quelques années plus tard chez Dupuis. Ce ne sera pas un succès commercial. Il rencontre alors Zidrou avec qui il crée Les Crannibales, une série de gags sur une famille de cannibales, série qui ne sera pas elle non plus suffisamment rentable. Fournier se dirige alors vers une bande dessinée plus adulte, d'abord avec Les chevaux du vent avec Christian Lax, puis avec Plus près de toi, accompagné de Kris. L'album se termine par un cahier de corbards, archives et compagnie, dont les premières ébauches de La maison dans la mousse, l'aventure de Spirou et Fantasio qu'il laissera en plan à la cinquième planche, écoeuré par l'aveuglement d'un éditeur incompréhensif.

© Fournier - Daniel Maghen

                Fournier est l'un des auteurs majeurs des années 70 et des suivantes. Il se raconte ici dans des moments de vie, privés ou professionnels. C'est intime et émouvant, et surtout, ça démontre sa contribution majeure à ce qu'est la bande dessinée aujourd'hui. Indispensable.

 

Laurent Lafourcade

 


One shot : Fournier Ma vie de rêves

Genre : Biopic

Scénario & Dessins: Jean-Claude Fournier

Couleurs : Jean-Claude Fournier & Anne-Marie d'Authenay

Éditeur : Daniel Maghen

ISBN : 9782356741547

Nombre de pages : 152

Prix : 26 €




Publié le 28/05/2024.


Source : Boulevard BD


Face au bourreau.   Simone 2 – Tu entres par la porte mais tu sortiras par la cheminée !

 

"-Ah… Esther et Polly !

-Tu connais ? Pourtant c'est pour les enfants !

-Madame en a sûrement, tu sais.

-Bien sûr, mais ce n'est pas la raison… Je lisais leurs aventures dans "Âmes Vaillantes" quand j'avais ton âge. J'étais fan de la jeune Esther et de son adorable petite marmotte. Et ça m'a beaucoup aidée à penser à autre chose dans des moments… difficiles.

-Qu'est-ce qui t'est arrivé, dis ?

-Ah, ça… C'est une longue histoire…"

 

 

 

 

 


                Février 1972, Simone Lagrange prend le train pour Paris. Elle se rend à Cognacq-Jay au siège de l'ORTF, l'office de radiodiffusion-télévision française, pour participer à une émission de télévision en direct. La soirée est présentée par Jacques Alexandre. Après un reportage réalisé par une équipe d'Antenne 2 à La Paz en Bolivie dans lequel le journaliste Ladislas de Hoyos s'entretient avec un certain Klaus Altmann, les quatre résistants invités en plateau, dont fait partie Simone, sont invités à se prononcer. Ce Klaus Altmann ne serait-il pas Klaus Barbie le criminel nazi, chef de la Gestapo de Lyon ? Simone a été torturée par Barbie en 1944 avant d'être déportée à Auschwitz. Elle ne peut pas oublier son regard. Même s'il le nie, pour Simone, Altmann et Barbie ne font qu'un. Le bourreau va se trahir. Alors qu'il prétendait ne comprendre que l'allemand, Ladislas de Hoyos le piège avec une question en français à laquelle il répond.

© Evrard, Morvan, BenBK - Glénat

                Alternant entre 1944 et 1972, Jean-David Morvan et Davis Evrard poursuivent la biographie de Simone Lagrange. L'album s'ouvre sur une scène d'une intensité incroyable. Simone se serre dans les bras de ses parents. Elle s'imagine au Maroc à Mogador, actuelle Essaouira, en bord de mer. L'océan se déchaîne. Les vagues prennent les apparences de ceux qui les ont dénoncés. Tel un tsunami, Klaus Barbie déferle sur eux. En réalité, la famille est retenue au siège de la Gestapo à Lyon. Le cauchemar ne fait que commencer. Simone et sa mère sont séparés de leur père et époux. A la prison de Montluc, la gamine vit un calvaire pendant quinze jours avant de partir pour Drancy, dernière étape avant le camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau.

© Evrard, Morvan, BenBK - Glénat

                La seconde guerre mondiale et ses conséquences sont des thèmes de prédilection du scénariste Jean-David Morvan. Il s'est intéressé à Irena Sendlerowa (déjà avec David Evrard), à Ginette Kolinka, à Madeleine Riffaud,… Avec Simone Lagrange, on suit le parcours d'une miraculée et on l'accompagne dans son combat dans la traque des nazis. On va la voir aux côtés de Serge Klarsfeld face à Barbie, défendu par un cynique Jacques Vergès.

Le graphisme si particulier pour un tel sujet de David Evrard fait la force du témoignage. Dans son trait franco-belge, l'auteur intègre des planches d'Esther et Poly qui font écho à ce que vit Simone, ainsi que des cases dessinées comme si elles étaient dessinées par des enfants, à la manière d'un José Parrondo dans la série "Allez raconte". La séquence des chambres à gaz ainsi racontée ne pouvait avoir plus de puissance. A arracher des larmes.

© Evrard, Morvan, BenBK - Glénat

"Simone" fait partie de ces séries nécessaires œuvres de mémoire. En ces débuts d'années 70, la chasse aux nazis atteint l'un de ses climax. Walter Rizoto et Jean-Loup de la Batellerie, journalistes à Paris-Flash, sont là pour rendre compte de l'événement.

 

Laurent Lafourcade

 


Série : Simone

Tome : 2 – Tu entres par la porte mais tu sortiras par la cheminée !

Genre : Drame historique

Scénario : Jean-David Morvan

Dessins : David Evrard

Couleurs : BenBK

Éditeur : Glénat

ISBN : 9782344049518 

Nombre de pages : 72 

Prix : 15,50 €

 



Publié le 24/04/2024.


Source : Boulevard BD


Personne ne devrait mourir en cette saison.   Quand vient l'été

 

"-V-vous pouvez me redonner l'adresse ?

-Mama, qu'est-ce qu'il y a ? Mama, où est Licia ?"

 

 

 

 

 

 


                Eté 2011, lorsque Joaquim quitta sa petite amie Licia après une dispute, il ne se doutait pas qu'il ne la reverrait jamais. Partie sur un scooter avec une copine, elles seront percutées par un chauffard. Licia laisse ses parents et sa petite sœur Rachel sur leur lieu de vacances, l'endroit des journées ensoleillées, des doucereuses soirées d'été et des premières amours. Dix ans plus tard, la famille organise une réception souvenir en la mémoire de leur fille. Licia aurait eu vingt-six ans. Il est encore difficile d'accepter son absence, mais les siens lui doivent de continuer leurs vies, d'avancer… comme on peut. Rachel y retrouve ses tantes, son cousin Thomas, ainsi que Joaquim. Ils ne s'étaient jamais revus. Ils sont venus sans leurs conjoints. Chacun a fait sa vie. Joaquim est "consultant supply chain", un truc en logistique. Il navigue entre Paris et Rennes. Rachel est consultante en bourgeons, autrement dit fleuriste. Cette commémoration, c'est une volonté des parents de Rachel. Elle, elle aurait préféré penser à sa sœur chez elle, à sa façon, sans tout un tas de pique-assiettes. L'événement aura néanmoins permis aux jeunes adultes de se revoir. Et ça risque bien de bouleverser leurs vies.

 © Nfasou, Bibussi - Marabulles

                Evidemment, la fleuriste et le consultant ne vont pas en rester là. Leurs quotidiens vont changer de direction. Petit à petit, les fils du passé vont lier leurs destins. Leurs couples respectifs risquent d'en être chamboulés. L'avenir va s'écrire sans précipitation. Les choses qui doivent se faire se feront comme il se doit. Ni l'un ni l'autre ne cherchera à aller plus vite que la musique. On devine que l'amitié devra laisser sa place à de nouveaux sentiments. Y aura-t-il une quelconque concrétisation ? C'est le propos émergent de cette belle histoire d'amours, avec un "s", amour d'adolescence qui ne s'oublie jamais, amour sororal même si l'une des sœurs n'est plus physiquement présente, amour entre adultes, Rachel et Yann, Joaquim et Amélie, … et les conséquences collatérales. Mais si ce propos est émergent, c'est un autre sujet qui donne toute sa force au récit.

 © Nfasou, Bibussi - Marabulles

                Les autrices Laura Nsafou et Reine Dibussi mettent en scène l'une des histoires les plus poignantes du moment. Bien plus qu'une histoire d'amour, elles abordent le douloureux sujet du deuil et de la place de ceux qui restent. Les parents de Licia ne se sont jamais remis de la tragédie. D'ailleurs, comment pourrait-on s'en relever ? Il n'y a rien de plus douloureux que la perte d'un enfant, de son enfant. Pourtant, c'est Rachel qui va avoir l'héritage le plus lourd à porter, celui du fait que tout le monde veuille qu'elle vive la vie qu'aurait dû vivre sa grande sœur. Sans l'oublier, elle va devoir s'émanciper, apprendre à agir pour elle-même, en tant que Rachel. Joaquim, lui, va-t-il se remettre du jour de la dispute où il a vu Licia pour la dernière fois, quand ils se sont quittés fâchés ?

 © Nfasou, Bibussi - Marabulles

                Reine Dibussi met en scène le théâtre de la vie avec une délicatesse, une pudeur et une sensibilité émouvantes. Les couleurs vont toujours par deux, selon les chapitres, pastellisées pour mettre en valeur les personnages. Il est juste dommage que le lettrage informatisé donne de la distance. Heureusement, on est si vite emporté par le récit qu'on l'oublie, parce que l'on s'est insinué entre Rachel et Joaquim.

                "Personne ne devrait mourir en été…" Et pourtant… Magnifique regard sur le sens de la vie, histoire de reconstruction, "Quand vient l'été" aurait pu s'appeler "Ceux qui restent". L'album restera en tous cas dans toutes les bibliothèques de ceux qui l'ouvriront.

 

Laurent Lafourcade

 


One shot : Quand vient l'été

Genre : Emotion

Scénario : Laura Nsafou

Dessins & Couleurs : Reine Dibussi

Éditeur : Marabulles

ISBN : 9782501163293

Nombre de pages : 224

Prix : 25,90 €


 



Publié le 24/04/2024.


Source : Boulevard BD


Mais qui crie le plus fort ?   Le meunier hurlant

 

"-Hé ! Y a un bonhomme ! Un grand ! Il a redressé le moulin ! Le moulin des rapides de la bouche !

-C'est de ça qu'on parlait ! Je lui ai prêté mes bœufs.

-Ho ho !

-Il a été vendu le mois dernier, le moulin."

 

 

 

 

 


1951, en Laponie, ayant fichu les nazis dehors, les finlandais se réacclimatent à la vie. Le vieux moulin, qui n'a pas tourné depuis les années 30, a même été acheté, acheté par un fou. Il faut croire que la guerre ne les a pas tous tués. Il s'appelle Agnar Huttunen. Il est grand. Il vient du Sud de Kilkoiset. Il avait un moulin là-bas chez lui mais il paraît qu'il a brûlé avec sa femme dedans. Ce n'est pas ce que disent les registres de l'église qui l'affirment célibataire. Toujours est-il qu'ici, il l'a redressé alors qu'il était de guingois à cause des glaces qui le compriment. Il a remis en service la scie à bardeaux. De temps en temps, il monte sur le toit de son moulin et pousse des cris intempestifs. Un fou ? Un iconoclaste ? Un simple marginal ? Agnar Huttunen ne laisse personne indifférent et il y en a qu'il dérange. A l'instar du fleuve qui perturbe le moulin au gré de ses gels et dégels, la vie du meunier ne va pas être tranquille.

© Dumontheuil - Futuropolis

Le meunier hurlant est un roman de l'auteur lapon Arto Paasilinna, surtout connu pour Le lièvre de Vatanen. Ce meunier a quand même été vendu à 100 000 exemplaires. Il nous immerge dans un pays libéré en proie à la douce folie d'un homme en marge de la société. Il montre comment la différence dérange. Le meunier hurle, mais la foule hurle avec les loups. Dans cette cacophonie, qui criera le plus fort ? Heureusement, certains villageois comme Sanelma et le facteur ont du recul sur la situation et vont permettre à Agnar de continuer à vivre dans son environnement jusqu'à ce que la fatalité ne rattrape tout ce petit monde. Le final n'est pas franchement optimiste sur la société humaine et invite à se remettre en question en tant que groupe. Paasilinna écrit une ode à l'altérité et à la nature. Pour une fois, la Laponie n'est pas froide. Bien que ses habitants ne soient pas tous fréquentables, on a envie d'y vivre.

© Dumontheuil - Futuropolis

Le monde de Nicolas Dumontheuil est en parfaite adéquation avec celui de Paasilina. Celui que l'on a découvert avec L'enclave et surtout Qui a tué l'idiot ? (que Futuropolis réédite) trouve dans ce roman un scénario qu'il aurait pu écrire. Les histoires de Dumontheuil sont peuplées de fous, mais ceux-ci ne sont jamais des fous dangereux à enfermer dans une camisole. Les fous de Dumontheuil, et ce meunier, sont des gens qui ne marchent pas au rythme de la société. Ils sont peut-être même en avance sur leur temps. On verserait même une larme pour eux. Nicolas Dumontheuil traite son dessin en niveaux de gris-sépia, un gris légèrement teinté de marron, assez inédit, un vrai travail graphique qui donne tout son sens au média bande dessinée.

© Dumontheuil - Futuropolis

Avec ce meunier hurlant, Futuropolis frappe fort pour ses cinquante ans. Nicolas Dumontheuil livre l'un de ses meilleurs albums. On est tous le fou de quelqu'un. Dans la peau d'Agnar, on peut en être fier. Un album indispensable.

 

Laurent Lafourcade

 


One shot : Le meunier hurlant

Genre : Chronique villageoise

Scénario, Dessins & Couleurs : Nicolas Dumontheuil

D'après : Arto Paasilinna

Éditeur : Futuropolis

ISBN : 9782754835244

Nombre de pages : 152

 



Publié le 03/04/2024.


Source : Boulevard BD


Une sirène assassinée.   Copenhague

 

"-Madame… Excusez-nous les danois, nous avons un problème. Mais je vais t'occuper. Je suis très francophile. Ici, c'est comme ma maison parce que j'habite là. Je peux t'aider.

-On a vraiment trouvé une sirène morte ? C'est possible, ça ?

-Oui. Nous ne comprenons pas la chose encore. Toute la ville est dans le grand désarroi. Les gens ont la peur ! Ils ont le chagrin. Ils ont l'émotion qui déborde."

 

 

 

 

 


                Partie six jours au Danemark, à Copenhague, Nana Miller, parisienne, ne savait pas qu'elle allait y rester plus que prévu. Elle a quitté Paris sans prévenir son ado de fille. Elle lui a laissé cent balles, un post-it sur le frigo et un reste de lasagnes. Royal ! Arrivée sur place, dans le taxi qui la mène à l'hôtel, c'est la panique sur les boulevards. La radio annonce qu'un corps a été trouvé près d'Amalienborg. Ce n'est pas un homme. Ce n'est pas tout à fait une femme. C'est une sirène. Le personnel ayant déserté l'hôtel, Anna y est accueillie par Thyge Thygesen (prononcez Thüü Thüsen), un excentrique qui y habite en compagnie de "Nom d'un chien", son caniche rose. Le pays est verrouillé. Les aéroports sont fermés. Plus personne n'entre ni ne sort du Danemark. L'information est gardée secrète. Anna va devoir prendre son mal en patience. "Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?"

© Risbjerg, Pandolfo - Dargaud

                Anna ne va pas rester passive en attendant que la situation évolue. Thyge (prononcez Thüü) est animateur de radio. Il est présentateur de l'émission "Les vrais génies ont la parole", dans laquelle il prend au téléphone les seuls qui se posent les bonnes questions : les enfants. Ça ne va louper. Il y en a un qui l'appelle pour lui demander qui a tué la sirène, parce que les sirènes, elles ne meurent pas normalement. C'est comme dans les multivers Marvel : si une brèche s'ouvre sur un autre univers, tout est chamboulé. Il faut qu'un gardien de l'univers remette les choses en ordre. Thyge et Anna vont se transformer en détectives en herbe afin de démêler l'intrigue. Un gourou, un club de caniches, le célèbre parc d'attractions Tivoli en plein centre-ville, des terroristes, la capitale du Royaume du Danemark est le théâtre d'une affaire bien mystérieuse.

© Risbjerg, Pandolfo - Dargaud

                Après Sousbrouillard, le duo Anne-Caroline Pandolfo et Terkel Risbjerg est de retour avec une petite pépite, un pavé de suspens et d'émotion à côté duquel il est impossible de passer. Terkel Risbjerg enveloppe l'histoire dans un style proche de celui de Christophe Blain. On est tout de suite pris dans l'action, la problématique est posée dès les premières pages. Bien sûr, les liens entre Anna et Thyge vont évoluer au fil de l'histoire. L'ours fêlé qu'est le danois va se transformer en doux kidulte. La rigide française, dont on ne connaîtra jamais vraiment la raison du voyage, va être attendrie par le moustachu. Jusqu'à quel point ? On est dans une tragi-comédie où les scènes les plus cocasses (comme une réanimation de caniche après un séjour dans l'eau) côtoient des instants très sérieux (comme l'autopsie de la sirène). Anne-Caroline Pandolfo aborde le sujet des dérives sectaires et du terrorisme. On ne peut s'empêcher de penser aux attentats perpétrés à Copenhague en 2015. Ce livre n'en serait-il pas une version décalée ?

© Risbjerg, Pandolfo - Dargaud

                Cette histoire a l'air futile et fantaisiste, mais elle est très profonde. Un de plus beaux messages qui soit est délivré dans l'une des dernières scènes de l'album lors d'une conversation entre Thyge et l'un de ses jeunes auditeurs. Copenhague est ces bijoux grâce auxquels, contre toute attente, on n'est pas tout à fait le même après l'avoir lu. Faire de sa vie un rêve, faire de son rêve une réalité.

 

Laurent Lafourcade

 


One shot : Copenhague

Genre : Polar feel good

Scénario : Anne-Caroline Pandolfo

Dessins & Couleurs : Terkel Risbjerg

Éditeur : Dargaud

ISBN : 9782505122159

Nombre de pages : 296

Prix : 29,99 €

 



Publié le 02/04/2024.


Source : Boulevard BD


"Je dois libérer la couleur de la prison de la ligne"

 

Une mère, Marie Raymond, figure de proue du mouvement de l'Art formel !

Un père, Fred Klein, portraitiste et paysagiste postimpressionniste !

C'est dans ce vivier artistique que naît, le 28 avril 1928, Yves Klein.

Vivier, mais pas carcan car ses parents ne le "forceront" pas le moins du monde dans cette direction.

 

 

 

 

 

Il passe ses premières années à Nice, avant de partir pour Paris y vivre une vie de bohème, en esprit libre.

L'été, la petite famille descend à Cagnes-sur-Mer rejoindre d'autres artistes. Yves est alors confié à sa tante Rose. Cette dernière, divorcée et sans enfant, est une fervente catholique. Elle tente alors de lui inculquer certaines valeurs plus strictes.

 

Arrive ensuite la Seconde Guerre Mondiale. Forçant la famille Klein à s'installer dans le sud de la France, elle y trouve une certaine "normalité".

Devenu adolescent, le jeune Yves se prend de passion pour le judo, sa discipline, sa rigueur, sa précision ! Il s'y liera d'amitié avec le poète Claude Pascal et le peintre Arman (Armand Fernandez). Ensemble, ils ont le projet de se "partager le monde".

C'est ainsi que vers 20 ans, il imagine sa "symphonie monoton-silence" qui ne sera jouée pour la première fois qu'une dizaine d'années plus tard !

 

 

© Wagner William - Julian Volvoj - Marabulles 2024

 

Voyageant énormément, il découvre le métier d'encadreur à Londres.

De retour à Paris, il participe à de nombreux salons organisés par sa mère. Il y côtoie de nombreux artistes ... qui ne le considère que comme le fils de ...

 

Et c'est en 1952 qu'il réalise son plus grand rêve : se rendre au Japon ! Il y organise des expositions des œuvres de ses parents et ... se perfectionne dans le judo !

 

Rentré en France 2 ans plus tard, il développe sa conception de l'art à travers 2 pseudo catalogues d'œuvres monochromes n'existant pas ... encore : l'illusion de l'art !

 

"Je veux que le public ressente cette "minute de vérité". Qu'il atteigne ce degré de contemplation où la couleur devient une pure et pleine sensibilité."

 

Il est l'heure pour lui de faire exploser sa créativité, sa vision artistique à travers ses peintures et réalisations dans des projets "hors normes" et totalement révolutionnaires, telles ses Anthropométries !

Il crée et fait breuveter une couleur bleue, la plus pure imaginable, l'IKB. Bleu profond outremer à la fois mat et brillant, il le met au point avec un ami chimiste, Edouard Adam.

Participant à la naissance du "Nouveau Réalisme", il prône une vision innovante du réel.

 

© Wagner William - Julian Volvoj - Marabulles 2024

 

Lorsqu'il meurt, à 34 ans, après avoir marqué de son empreinte éternelle ... et colorée, l'art pictural, ses amis pensent d'abord qu'il vient de se lancer dans un nouveau projet artistique ! Désormais ses œuvres seront immatérielles et réalisées dans le plus grand atelier du monde ...

 

 

C'est la biographie de cet artiste pluridisciplinaire que nous narre Julian Volvoj, mise en images libres et éclatées par Wagner William. Un exercice tant littéraire que pictural pour cet artiste inclassifiable mais incontournable dans l'art contemporain.

Par son style narratif, Julian Volvoj réussit à nous immerger dans l'univers du parcours créatif d'Yves Klein.

Ecrivain et scénariste new-yorkais, il apprécie tout particulièrement cet exercice de biographie vivante. Traduit en de nombreuses langues, ses romans graphiques offrent souvent à ses dessinateurs l'espace nécessaire à leur imagination sans borne.

 

 

 

© Wagner William - Julian Volvoj - Marabulles 2024

 

Et justement, malgré un dessin réaliste, Wagner William se libère totalement des codes de la BD traditionnelle, notamment au niveau de sa mise en page. Prenant sa double page comme un espace de création vide, il le "remplit" au gré de la narration dans un esprit ouvert et sans les entraves des cases et bulles classiques. Cet artiste visuel brésilien, également peintre, écrivain et éditeur, rend ici clairement hommage, au travers sa "déstructuration" de la page, à l'âme vagabonde et "hors cadre" d'Yves Klein.

Une approche picturale et narrative qui cherche autant l'envolée que la profondeur de l'œuvre originale, soulignant sa quintessence absolue et inclassifiable dans un courant ou mouvement unique.

 

 

© Wagner William - Julian Volvoj - Marabulles 2024

 

Quoiqu'il en soit, une superbe découverte du parcours, de la vie de cette étoile filante dont la brièveté de l'existence est inversement proportionnelle à l'impact qu'il a laissé derrière lui sur la peinture et les arts en général !

 

 

Yves Klein et ses "Anthropométries" : extrait

© Antenne 2 - 1962

 

 

 

Thierry Ligot

 

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Titre : Yves Klein - Immersion

Scénario : Julian Voloj

Dessin, couleurs : Wagner William

Traduction : Laure Picard-Philippon

Editeur : Marabout

Collection : Marabulles

Parution : 21/2/2024

Pages : 144

Format : 29,5 x 22,8 x 2 cm

ISBN : 978-2-5011-6349-1

Prix : 29,90 €



Publié le 21/03/2024.


Source : Bd-best


Il est des chroniques plus agréables que d'autres. Des chroniques qui donnent "faim". Faim de savoir, de découvertes, de plaisirs, de détente, de rire, ...

Et d'autres qui donnent soif ! Une soif de savoir aussi, mais parfois simplement soif de saveurs, de senteurs, de goûts !

Et celle-ci en fait largement partie !

Evidemment, il s'agit d'être sensible à son sujet ! Mais mea culpa, ici, je ne puis être totalement objectif !

Celles et ceux qui me connaissent un peu vous diront sans risque mon amour pour une certaine bière trappiste ... l'Orval pour ne pas la citer !

Mais pas que ... Amateur à mes heures d'un autre breuvage divin, le whisky !

 

 

Ecossais, irlandais entre autres ... mais aussi japonais !

Dès lors, comment ne pas se plonger avec délectation dans "Whisky San" ?

Fabien Rodhain, Didier Alcante nous narrent avec brio et passion l'incroyable "épopée" du créateur du 1er whisky japonais : Masataka Taketsuru.

Car épopée, ce fut bien le cas. Issu d'une célèbre famille de brasseurs de saké depuis 1733, comment imaginer pour son père que son unique héritier rêve de créer le premier whisky japonais ?

 

A 6 ans, son grand-père lui raconte l'arrivée du whisky au Japon. C'était en mars 1854. Une flottille américaine sous les ordres du Commodore Matthew Perry arrive au Japon pour forcer le Shogun à ouvrir ses frontières au commerce international.

Dans leurs bagages, des cadeaux ... et parmi eux, un tonnelet de "whiskey" inconnu au pays du Soleil levant.

 

- C'était bon ?

- Bon ? Oh non, ce n'était pas simplement bon. C'était ... inattendu, délicieux, puissant, incroyable ! C'était comme si le soleil était descendu dans ma gorge !

© Rodhain - Alcante - Grande - Grand Angle 2024

 

Ainsi naît dans la tête du petit Masataka ce rêve insensé !

"Coup de chance", deux ans plus tard, lors d'une petite bagarre avec des condisciples à l'école, il prend la défense d'un gaïjin écossais, nouvellement arrivé dans son école, Craig McConnell et ... un mauvais coup lui casse le nez !

Un nez cassé et surtout la naissance d'une amitié qui lui offre sa première gorgée de whisky !

 

De son nez fracturé naît également sa faculté exceptionnelle à reconnaître, décortiquer, analyser les différentes senteurs l'entourant ! Cette bénédiction des dieux le mènera de fil en aiguille à rencontrer son mentor, futur partenaire, avant d'être concurrent, Shinjiro Torii, puis à partir en Ecosse parfaire ses connaissances sur la distillation de ce breuvage de "sauvages". Là, il y rencontrera Rita Cowan, sa future épouse !

 

Et son parcours se poursuivit au hasard de rencontres, avec cette volonté inébranlable de réussir.

Mais le défi est de taille. Réussira-t-il et jusqu'à quel point ce rêve deviendra-t-il réalité ?

 

 

© Rodhain - Alcante - Grande - Grand Angle 2024

 

 

Ode à l'abnégation d'un homme qui consacrera sa vie entière à réaliser un rêve de gamin. Celui, après avoir entendu le récit de son grand-père, de créer ce premier whisky japonais !

Entre échecs, obstacles, incompréhension de son entourage familial, moqueries, concurrence, allant jusqu'à braver tradition séculaire et autorité paternelle, Masataka s'y plongera corps et âme !

Car oui, oser produire un whisky japonais au pays du saké est pire qu'un sacrilège et mériterait à ces auteurs de se faire seppuku immédiatement !

 

 

Un scénario à 4 mains, rythmé et passionné. Alors que le second tome de leur série des "Damnés de l'or brun" sort également en librairie, le duo Rodhain / Alcante s'offre une récréation bien rafraîchissante avec ce "Whisky San".

 

Et dire que Fabien Rodhain s'y lança suite à une dégustation de whiskies à Orp-Jauche, commune du Brabant Wallon (en Belgique). Il y apprend avec stupeur qu'il existe aussi des whiskies japonais ! Le représentant, devant son étonnement, lui raconte alors l'histoire de ces 2 Japonais à l'origine de cette incroyable aventure : Masataka Taketsuru et Shinjiro Torii !

Partenaires au départ, concurrents à la fin et fondateurs des 2 premières distilleries du Soleil levant : Nikka et Suntori !

2 marques unanimement reconnues, maintes fois primées, aujourd'hui dans le monde du malt !

Au plus il l'écoute, au plus les images défilent dans son esprit ...

Reste à concrétiser l'ensemble en un tout cohérent ...

© Rodhain - Alcante - Grande - Grand Angle 2024

 

 

Projet qui mit plus de 10 ans à mûrir, tel un "pure malt", il gagna en maturité et ... en amour ... "élément indispensable" pour distiller un vrai whisky que McCall, grand-père de Craig, demanda à Masataka d'identifier lors de leur première rencontre.

 

En 2020, apprenant que Didier Alcante, grand connaisseur du Japon notamment après l'écriture de "La Bombe", a une idée similaire, il lui propose de s'associer pour le scénario. Et pour être certain de sa réponse, lui communique ses premières notes ! Malgré une surcharge de travail, un moral à zéro dû au début du confinement, ce dernier est emballé par l'idée. Nous connaissons le résultat ...

 

Encore restait-il à trouver un "crayon" pour tout traduire en images ! Ce sera à Alicia Grande de relever ce défi. Après sa série "Retour de flammes", elle hésite à poursuivre son métier de dessinatrice BD. Manquant de projets, elle est sur le point d'abandonner quand elle reçoit la proposition de Fabien. Elle lui envoie quelques planches d'essai et la magie opère ! Son style BD - manga fait mouche : une ligne claire, des traits fins avec un soupçon d'art manga ! Le parfait mariage pour un album racontant le mariage entre deux traditions aussi différentes que l'écossaise et la japonaise, le whisky et le saké !

 

Mais que serait l'association scénaristes-dessinatrice sans le travail de mise en lumière, en ambiance de Tanja Wenisch ? Une palette proche de l'aquarelle pour un dessin mi BD - mi manga !

 

 

 

© Rodhain - Alcante - Grande - Grand Angle 2024

 

Récit historique, librement adapté de faits réels, mais surtout une ode à la vie, à l'amour, à la passion ... d'un homme pour son rêve, pour sa femme Rita ! Sa foi inflexible, sa conviction intime d'être capable de réaliser l'irréalisable au pays du saké, c'est tout cela que nous offre ce one-shot romanesque.

 

 

Par ailleurs, cette parution fut l'occasion pour BD Best d'une nouvelle capsule de "Derrière la palette ...".  Ce jeudi 29 février, nous rencontrions Fabien Rodhain à l'hôtel Warwich.

L'occasion de découvrir ce scénariste, amoureux de la terre et de ses combats, de son parcours, notamment avec Didier Alcante, son co-scénariste qui signe également avec lui "Les Damnées de l'or brun", une histoire de chocolat ...

Whisky et chocolat ... de quoi damner bien des amateurs de saveurs exquises !

 

 

 

Pour le plaisir de le revoir, lors de notre entrevue, Fabien nous rappela ces 2 publicités pour le whisky Suntory Crest réalisées par Sean Connery ... :

 

 

 

Kampaï !

 

 

Thierry Ligot

 

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Titre : Whisky San

Scénario : Fabien Rodhain & Didier Alcante

Dessin : Alicia Grande

Couleurs : Tanja Wenisch

Editeur : Bamboo

Collection : Grand Angle

Public : tout public et surtout amateurs de whisky

Format : 12,3 x 30,0 cm

Page : 136

ISBN : 978-2-8189-8867-1

Prix : 24,9 €



Publié le 08/03/2024.


Source : Bd-best


Quartier un rien miteux, dans une ville enneigée marquée par les traces de bombardements récents.

Il fait froid, brumeux en ce petit matin. La vitrine du bar Timo illumine tristement la rue.

L'atmosphère y est enfumée et lourde. Plus grand monde ... quelques clients, 4 - 5 femmes de mœurs légères et Frank. Ado de 17 ans, mais déjà adulte dans sa tête et son vécu, il est l'enfant unique chéri de Lotte. Celle-ci tient la maison close du quartier, visitée par les forces d'occupation et autres notables de cette ville moyenne qui pourrait se situer n'importe où en Europe. Cela lui donne les moyens de continuer à vivre "plus que correctement" et de ne pas connaître les pénuries frappant l'habitant.

 

 

 

 

 

Fringuant, légèrement dandy, Frank n'a plus grand chose à apprendre des femmes ... "profitant" à son gré des "pensionnaires" de sa "maquerelle" de mère. Blasé ou perdu, ne sachant qui il est et ce qu'il veut, Frank traîne avec lui une sorte de spleen malsain, une drôle d'étoile rosée, marquée "SWING" cousue sur le revers de son manteau !

D'ailleurs, son nom de famille expliquerait-il cela ? Frank Friedmaier !

 

 

Ah oui, j'oublie, également présent chez Timo, Fred Kromer ! Petit caïd mafieux du quartier. Tous les trafics et mauvais coups passent par lui. Ses mains sont déjà rouges du sang de certaines de ses victimes.

 

 

 

© Fromental - Yslaire - Dargaud 2024

 

Mais ce soir-là, Frank sent qu'il va connaître une sorte de dépucelage ! L'idée lui est venue d'un coup, sans préméditation ... juste une pulsion ... criminelle dont la victime sera un sergent des forces d'occupation, un vicieux qui offre des bonbons aux petites filles. Surnommé "L'Eunuque", Frank décide de l'attendre dans une ruelle sombre et de l'égorger avec le nouveau couteau de Kromer !

Il y a bien Holst, le conducteur de tram, qui l'a croisé mais parlera-t-il ? Nous sommes en guerre et un ennemi reste un ennemi.

Holst, le père de la jolie Sissy. Perle de pureté naïve, Frank n'a aucune difficulté à la séduire et à la manipuler. A moins que ...

© Fromental - Yslaire - Dargaud 2024

 

Une lente descente de la petite délinquance à un banditisme plus brutal, sans âme, l'entraîne vers un enfer qui est loin d'être pavé de bonnes intentions. Une déchéance insondable dans ce monde en totale perdition.

 

Pourtant dans ce décor de plus en plus sombre, ne serait-ce pas en touchant le fond du fond que l'on pourrait rebondir, trouver une lumière, une rédemption ?

Et cette neige omniprésente, si blanche, si immaculée tout au long du roman se teintera-t-elle petit à petit de noir, de rouge ... de misère, de sang ?

© Fromental - Yslaire - Dargaud 2024

 

Lorsque Simenon écrit ce roman, nous sommes en 1948, soit 3 ans seulement après la fin de la guerre. Ces blessures sont loin d'être effacées, guéries ! La noirceur de l'époque doit ressortir ... Et Simenon va nous en offrir un véritable chef-d'œuvre du genre. Tout y est ! Une qualité d'écriture assurée, un thème centré sur toute la noirceur de son personnage principal.

Intrigue, drame humain, violence pure, gratuite, trahison, perte de repères, un monde en perdition noyauté par un occupant (nazi ?), des collabos (Frank reçoit une "carte verte"), police d'Etat qui n'a pas de nom (Gestapo), une croix comme symbole (à la place d'un swastika), torture et exécutions de terroristes, ...

Bref tous les ingrédients également pour un excellent scénario BD ...

Chose que Jean-Luc Fromental se charge de réaliser intelligemment.

 

© Fromental - Yslaire - Dargaud 2024

 

Pour l'adaptation graphique ... un nom ! Bernard Yslaire ! Son style s'accommode parfaitement à l'atmosphère des romans noirs de Georges Simenon, et à celui-ci tout particulièrement. Utilisant essentiellement un cadrage serré, Yslaire fixe l'attention du lecteur sur les expressions des protagonistes. Leur état d'âme transparaît à chaque case.

Jouant avec ses crayonnés, ses nuances de gris-noir parfois légèrement rosées, son découpage impose une lecture rythmée et prenante.

Et pour renforcer son trait unique, teintes sombres, rougeâtres ici, jaunâtres là, bleuâtres ou grisâtres en fonction des ambiances, un splendide travail de mise en lumière.

Ne laissant aucun moment de repos dans sa narration graphique, Yslaire plonge le récit dans cette atmosphère si particulière aux romans noirs, et tout particulièrement à ceux de Simenon !

 

 

 

 

 

Une adaptation plus que réussie d'un roman noir ... ou simplement d'un roman signé "Simenon". Fidèle au roman initial et traduisant la force de cette écriture, Fromental et Yslaire nous offre clairement un "indispensable" et déjà un "best 2024" !

 

Pour s'en rendre compte encore plus, quelle meilleure occasion que de pouvoir admirer de plus près les croquis préparatoires et planches de Bernard Yslaire ?

Une remarquable exposition nous l'offre à la galerie Champaka et ce jusqu'au 23 mars ! 

 

 

 

 

 

 

Thierry Ligot

 

 

Adresse de la galerie Champaka : Rue Ernest Allard, 27 à 1000 Bruxelles

Site : https://www.galeriechampaka.com/

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Titre : La Neige était sale

Auteur : Georges Simenon

Adaptation scénario : Jean-Luc Fromental

Dessin et couleurs : Bernard Yslaire

Editeur : Dargaud

Collection : Simenon

Genre : roman noir - drame - guerre

Public : ado - adulte

Parution : 26/01/2024

Page : 104

Format : 22 x 28,8 cm

ISBN : 9782505115809

Prix : 23,5 €



Publié le 05/03/2024.


Source : Bd-best


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