« - Tu bafouilles devant les filles ? Tout le monde te trouve nul ?
- Le terme est un peu rude…
- Je peux arranger ce problème. Si tu veux assurer devant les princesses, il te faut d’abord des biscotos ! Les princesses adorent les biscotos.
- Ah bon ? Je croyais qu’elles aimaient la poésie !
- C’est moi l’expert en drague, ok ? »
Laissez faire Raowl, il va tout vous expliquer. Raowl, c’est le mec le plus fort du monde, et aussi le plus cool. Il sauve les princesses en détresse en massacrant du troll en veux-tu en voilà. Pourfendre un dragon ou déboucher des toilettes envahies par les tentacules d’un monstre, aucune difficulté pour lui. Par contre, quand il s’agit de résoudre un problème de géométrie, c’est une autre paire de manches… sûrement parce qu’il n’a pas ses lunettes. Bref, dans cet album, ce précis d’astuces et de bonnes manières vous donnera tous les tuyaux pour briller en société et vous sortir de bien des situations difficiles.
© Tebo – Dupuis
Ainsi, vous apprendrez que pour avoir du succès avec les princesses, il faut avoir bonne haleine. Vous saurez que pour péter en toute discrétion, il faut un copain trompettiste. Vous connaîtrez les mouvements à faire pour éviter de se faire mal avant une bataille. Si vous ne savez pas très bien dessiner un troll, ce n’est pas trop grave. Il suffit d’en pulvériser un à coups de massue pour que l’individu ressemble à votre dessin. Enfin, très important, vous verrez comment être propre sans prendre une douche. Et ce ne sont que quelques exemples parmi une bonne quarantaine de conseils avisés made in Raowl.
© Tebo – Dupuis
Après deux grandes chouettes aventures qui déboîtent, La belle et l’affreux, puis Peau d’Ane la princesse qui pue, Tebo propose déjà un spin-off. Le grand format laisse (provisoirement) sa place à des coins didactiques, gags en une ou deux planches faits à la manière de tutos. C’est dynamique et punchy. Ça rappelle la plus belle époque de Tchô, quand le magazine était une grande feuille pliée en plusieurs morceaux et truffée de gags. Tebo y sévissait avec Samson et Néon. On retrouve cet ADN dans cet album poilant les lecteurs et dépoilant les trolls.
© Tebo – Dupuis
Vous ne ferez plus jamais des bisous comme avant. Vous ne bastonnerez jamais plus comme avant. Plus que jamais avec cet album, Raowl roule pour vous ! Alors, merci qui ? Merci Raowl !
Laurent Lafourcade
Série : La méthode Raowl
Tome : 1
Genre : Ouvrage didactique… enfin…
Scénario, Dessins & Couleurs : Tebo
Éditeur : Dupuis
Nombre de pages : 48
Prix : 10,95 €
ISBN : 9791034754229
Encore quelques fois dormir et ce sera la « Fête des pères » ! Il n’est jamais trop tard pour lui choisir LE cadeau s’il est fan de BD et de belles voitures !
Si ces deux passions l’habitent, le choix parfait est sans conteste le superbe recueil sur « Les voitures de Lefranc » édité chez Casterman.
Créé en 1952 par ce « monstre sacré » du 9e art qu’était Jacques Martin, Guy Lefranc, journaliste moderne ne pouvait ne pas apprécier les belles mécaniques de son temps.
Au fil de ses 33 aventures, il en a piloté ou simplement croisé de ces petites merveilles à quatre roues. C’est quasiment le second fil conducteur de la série : l’automobile !
70 ans d’enquêtes essentiellement à travers la seconde moitié du XXe siècle ont offert à son créateur, puis à ses repreneurs, le plaisir d’inclure dans chaque album quelques voitures mythiques de leur époque.
© Seiter – Martin – Régric - Casterman
Qu’elles soient entre les mains de Lefranc, ou de son inégalable ennemi, nous découvrons la fameuse Alfa Romeo Giulietta Sprint Veloce du reporter ou la Bentley R Type d’Axel Borg.
Plus d’une centaine de voitures, motos, camionnettes se retrouvent au travers des pages de la série. Il serait difficile de les citer toutes, mais en voici une dizaine tirée au hasard des 112 pages de ce livre-témoignage : Simca Arronde 9, Ferrari 250 MM Berlinetta, BMW R 60/2 600cc, Facel Vega HK500, Alfa Romeo Alfetta GTV Série 1, Mercedes E W124, Saab 9OO turbo cabriolet, Morgan Plus 4, MG F, … et évidemment une Bugatti EB110 !
Une fameuse galerie, admettez-le ! Chaque modèle est illustré par les cases tirées des albums concernés.
© Seiter – Martin – Régric - Casterman
Mais avant de lancer la série Lefranc, Jacques Martin ayant dans son ADN ce virus de la belle mécanique, illustrait déjà pour le magazine Tintin une rubrique personnelle : « La Chronique de l’Auto », auquel le présent recueil fait une part belle.
© Seiter – Martin – Régric - Casterman
Petite cerise sur ce gâteau, un mini récit inédit : « Le rallye de la Route des Vins », de Régric – Seiter et Wesel. Huit pages dans l’Alsace natale du créateur, sur ses routes, dans ses paysages et hommage-clin d’œil à leur père spirituel, à la Tour Noire !
Bref le recueil, superbement illustré et documenté, est indispensable dans la bédéthèque d’un amoureux des voitures et de l’univers de Jacques Martin !
© Seiter – Martin – Régric - Casterman
Et pour ceux qui en voudraient plus, n’hésitez pas à vous offrir un petit périple en Alsace, à Molsheim plus exactement. Siège de la mythique usine Bugatti, cette cité médiévale accueille une double exposition. La première « Les Mondes de Jacques Martin » au Musée de la Chartreuse, et la seconde, « Les Voitures de Lefranc », à l’Hôtel de la Monnaie. Les deux se clôturent le 18 septembre 2022. Un bon prétexte pour visiter la région et ses richesses.
Thierry Ligot
Titre : Les voitures de Lefranc
Éditeur : Casterman
Genre : Automobile
Scénario : Roger Seiter
Dessin : Jacques Martin – Régric
Couleurs : Bruno Wesel
Nombre de pages : 112
Prix : 25,00 €
ISBN : 9782203241558
L’approche de la fête des pères est parfois l’occasion, pour tout accroc bd (enfin les enfants pour leur papounet chéri), de s’arrêter non pas sur une mais sur plusieurs bd d’une même série, voire carrément un diptyque !
Et là, comment ignorer « Les Ailes de l’Espérance ». Histoire en 2 tomes, pas besoin d’un avant à aller rechercher dans sa bibliothèque ou d’un après qui souvent tarde trop pour le lecteur conquis.
L’histoire d’abord … Nous sommes en 1940, la Seconde Guerre mondiale a éclaté et l’Angleterre est en mauvaise posture. Désormais isolée sur son île, elle tente de résister tant bien que mal aux vagues de la Luftwaffe. Être pilote anglais est alors souvent synonyme d’une espérance de vie fort limitée.
C’est dans cet enfer que nous rencontrons Vic Stone. Jeune pilote talentueux, son courage n’a d’égale que le désespoir qui petit à petit le mine devant l’énormité de la tâche qui lui est confiée, à lui et à ses camarades pilotes. Ils savent toujours à combien ils décollent pour affronter l’ennemi, mais ils ignorent toujours à combien ils atterriront !
En effet, comment leur vieux Hawker-Hurricane pourrait-il réellement lutter contre les Messerschmitts 109 allemands bien supérieurs si la chance et le talent n’étaient pas là, à chaque combat ?
© Antunes – Du Caju - Paquet
Pourtant dans cet enfer aérien, une lueur apparaît sous les traits d’un petit garçon rencontré par hasard, Tom. Sa joie, son optimisme et son amour pour les avions sont sources de lumière pour Vic … tout comme sa très attirante maman ! Mère célibataire, Ruby ne serait pas contre « trouver un nouveau papa » à son fils.
Mais elle est sous la coupe de Peter, homme cruel et intéressé qui l’oblige de se prostituer pour subvenir à ses besoins et notamment des médicaments pour Tom. Ses « clients » sont d’ailleurs parfois les soldats de la base aérienne voisine, celle de Vic. Et c’est là qu’intervient un certain Andrew ! Y verrait-il un intérêt ? Un moyen d’obtenir des informations capitales en temps de guerre ?
En fin de compte qui sont réellement Ruby Miller et Andrew ? Quel est le véritable rôle de Peter Mulligan ?
© Antunes – Du Caju - Paquet
Et puis, voilà que l’on découvre une jeune fille du village assassinée, après avoir été violée ! Ce serait l’œuvre d’un pilote anglais ! La colère de la population monte malgré ce contexte militaire où ces derniers semblent le dernier rempart contre une invasion allemande imminente. Les autorités militaires ne peuvent pas ne pas agir et vite !
Ray Collins, l’enquêteur de la RAF est-il là seulement pour découvrir le meurtrier ou pour régler un compte personnel avec Vic Stone ?
Et qui est ce Simon qui apparaît en fin du tome 1 ?
© Antunes – Du Caju - Paquet
Tout cela nous mène, page après page, d’un banal récit de guerre saupoudré d’un nuage de sentimentalisme romantique, à une intrigue plus complexe. Mêlant à la fois les états d’âme des pilotes anglais ne voyant pas la fin de leur impossible devoir, la trahison des uns en faveur du Reich ou la rancœur des autres pour des histoires de cœur, les difficultés des civils à survivre pour élever leur enfant, le choc des espoirs ou la déception provoquée par des désillusions inévitables en temps de guerre, le lecteur se retrouve très vite plongé dans un récit d’espionnage sentant bon le polar et le drame humaniste !
© Antunes – Du Caju - Paquet
Autant, nous avons aimé le tome 1 posant calmement le cadre, l’intrigue, les personnages, laissant une large place aux questions ouvertes sur la suite possible, autant le tome 2 y répond sans empressement. Posément, Wander Antunes dénoue les mystères et interrogations auxquels nous étions confrontés dans le tome 1. Les liens entre les protagonistes, leur passé parfois rempli de haine et d’envie de vengeance justifient au fur et à mesure leurs attitudes et les rebondissements.
Mais le tout reste cohérent avec un véritable fil conducteur : la défense de l’Angleterre contre l’invasion allemande ! Et que dire de ce final à la hauteur de la tragédie de chacun !
Pas à dire, Wander Antunes connaît son sujet et il le maîtrise. Loin de nous offrir un récit historique linéaire basé uniquement sur la bravoure des pilotes de la RAF, son schéma narratif est bien ficelé ! Et même si certains aspects pourraient apparaître, dans un premier temps, « légèrement » dispersés, toutes les clés de compréhension viennent à point nommé dans le tome 2 explosif.
Côté graphisme, plus utile de présenter Thomas Du Caju ! Depuis sa série « Betty & Dodge », son style hyper-réaliste, semblant mélanger adroitement pour les avions et mécaniques crayon - photographie ou photographie dessinée donne ce cachet unique qui lui permet d’intégrer avec ce diptyque, la collection « Cockpit » chez l’éditeur Paquet !
Les scènes d’aviation et notamment de combats aériens sont époustouflants de détails, de rythme. Un régal pour l’amateur du genre !
C’est d’ailleurs impatiemment que nous attendons de découvrir sa prochaine série … une saga sur la Résistance française durant la 2e GM, avec au scénario Jean-Claude Van Rijckeghem.
© Antunes – Du Caju - Paquet
Bref, le cadeau idéal pour tout papa aimant à la fois BD, 2e GM, espionnage, aviation, intrigue amoureuse, le tout dans un style réaliste.
Thierry Ligot
Titres : T.1 Anges T.2 Démons
Série : Les ailes de l’espérance
Éditeur : Paquet
Collection : Cockpit
Genre : Historique
Scénario : Wander Antunes
Dessin : Thomas Du Caju
Nombre de pages : 48 + cahier de 8 pages / 48
Prix : 14,00 € / 14,00 €
ISBN : 9782889321391 / 9782889325696
« - M.S. AURORE à président F.E.R.S. Arrivons en vue côtes Islande. Ferons escale à Akureyri, dans le Eyja Fjördhr,pour nous ravitailler en carburant. Tout va bien à bord. »
Tout va bien à bord. Comme tous les six mois, les adhérents à l’association Les amis de Hergé reçoivent la revue indispensable à tout tintinophile dirigée par l’exégète Philippe Goddin. Entouré de spécialistes de Hergé et du reporter à houpette, Philippe Goddin propose soixante pages passionnantes.
© Hergé/Moulinsart 2022
La couverture n’est pas le simple agrandissement d’une case. Cet extrait de L’étoile mystérieuse montrant Tintin tendant Milou dans un lange au bout du perche à leurs sauveurs provient d’une composition réalisée par Hergé pour une boîte de cubes en 1943. Le numéro de ce printemps s’ouvre sur une curiosité. « Oyez ! Oyez ! » scande le joueur de cor sur une publicité signée du Maître pour un poste de TSF Radiolyre. Ces images publicitaires réalisées par Hergé avant Tintin au pays des Soviets sont remarquables. Dans la partie « Tintin à l’image de son siècle », un regard extérieur est posé sur l’évolution de l’œuvre de Hergé. Dans l’article « A la recherche du point de chute », Alain Bingen tente de localiser le lieu précis du globe où a été englouti l’aérolithe de L’étoile mystérieuse, au large du Groenland. René Derosne analyse comment Haddock a servi à Hergé d’élément neuf pour relancer la machine. Philippe Goddin revient sur un dessin intitulé « La partie de cartes » et tente d’identifier les personnes représentées. Retranscription d’un extrait de l’émission « L’invité du dimanche », ensuite. Pierre Tchernia interviewe Hergé pour l’ORTF et son invité l’artiste Jean Dewasne.
© Hergé/Moulinsart 2022
Ceci n’est qu’une partie du sommaire alléchant de ce numéro dans lequel on pourra lire également une étude sur le téléphone, objet graphique et moteur de gags dans l’œuvre, et on verra un plan précis du site atomique de Sbrodj dans Objectif lune. Philippe Goddin offre un touffu dossier sur les voitures acquises par l’auteur entre 1938 et 1973. Les rubriques habituelles concluent la revue comme « C’est une bonne question...qui mérite une réponse », « Les objets dérivés du monde de Tintin », ou encore « La dépêche », recensant des informations qui frappent. On finit par « Les 7 scoops de Walter Rizotto », planche de photos prises de par le monde en lien avec Tintin.
© Hergé/Moulinsart 2022
Les nouveaux adhérents peuvent se procurer les anciens numéros auprès du bureau de l’association. Quant aux autres, il ne reste plus qu’à les rejoindre pour profiter de cette luxueuse revue. Pour adhérer aux Amis de Hergé : https://lesamisdeherge.com/lassociation/inscription/
Quand on a fini de lire Tintin, on peut recommencer à lire Tintin. On y trouvera toujours quelque chose de nouveau. La revue des amis de Hergé le prouve depuis déjà 73 numéros !
Laurent Lafourcade
Série : Les amis de Hergé
Tome : 73 - Printemps 2022
Genre : Revue d’étude
Rédacteur en chef : Philippe Goddin
Éditeur : Les amis de Hergé a.s.b.l.
Nombre de pages : 60
Prix : 25 €
ISSN : 0773-6703
« - Je pourrais avoir besoin de vous.
- D’habitude, quand les gens me disent ça, c’est qu’ils ont déjà tout essayé.
- Je connais une femme… qui a un problème. Elle refuse de se montrer à qui que ce soit. Il faudra que vous me fassiez confiance. Elle est morte dans des circonstances horribles. Elle a été sauvagement assassinée, mutilée.
- C’est très drôle, Cornell, quel sens de l’humour !
- Son nom était… Louise Sandler. Vous vous souvenez de l’actrice de la MGM ? Disparue, jamais retrouvée… »
Hollywood, la ville de tous les scandales. Les fantômes du cinéma errent dans les ruines des studios, les villas abandonnées et les théâtres désaffectés. Jerry Fifth est un privé, comme ceux que l’on trouvait dans les romans de Raymond Chandler et Dashiell Hammet. Mais à leur différence, Jerry est hanté par les voix des fantômes des stars de la grande époque. Un soir, Fifth est chargé par un certain Cornell d’élucider la disparition de Louise Sandler, actrice de la MGM s’étant volatilisée. Aurait-elle été tuée ? Jean Harlow ou ses substituts pourront-ils aider le détective dans son enquête ?
© Futaki, Desberg- Bamboo
Stephen Desberg embarque le lecteur dans un monde qu’il connaît bien. Les fantômes de sa famille planent sur Movie Ghosts. A Cleveland, son grand-père dirigeait la plus grande salle de cinéma de la ville. Sa grand-mère avait été courtisée par l’un des frères Warner. A New York, puis à Bruxelles, son père distribuait les films de la MGM dès les années 50. Le petit garçon Stephen a croisé dans son bureau Frank Sinatra, Robert Taylor, Esther Williams et de nombreuses autres stars. C’est à toute cette époque qu’a voulu rendre hommage l’auteur avec le diptyque Movie Ghosts dont Sunset, et au-delà (Quel joli et juste titre !) est la première partie. Desberg ne se contente pas de montrer le vernis apparent. Il le brise pour montrer les espoirs déçus, les destins brisés et les amours déchues. La narration façon commentaires de privé est impeccable. On peut juste regretter que les deux parties du récit, la disparition de Louise Sandler, puis le fantôme d’Odette Armstrong, soit si dissociées. On les aurait préférées plus imbriquées.
© Futaki, Desberg- Bamboo
Attila Futaki est un dessinateur hongrois ayant fait carrière aux Etats-Unis. Il revient en Europe en sublimant ce récit avec un découpage et une colorisation hors du commun. Quelques influences Marc-Renier ou Jean-Yves Delitte dans le graphisme. On parle en général de coloriste. Plus que ça, Futaki est un éclaireur. Le noir nuit est fluidifié dans le violet des néons. Dans des décors majestueux, les lumières de la ville offrent de longues ombres portées donnant un relief étourdissant. « C’est beau une ville la nuit. », disait Richard Bohringer. Que ceux qui en doutaient encore ouvrent cet album qui, jusqu’à la maquette de couverture, est magnifique.
© Futaki, Desberg- Bamboo
Sur la route de Mulholland Drive, on rêverait d’une adaptation cinématographique de Movie Ghosts par David Lynch.
Laurent Lafourcade
Série : Movie Ghosts
Tome : 1 - Sunset, et au-delà
Genre : Polar fantastique
Scénario : Stéphen Desberg
Dessins & Couleurs : Attila Futaki
Éditeur : Bamboo
Collection : Grand Angle
Nombre de pages : 72
Prix : 16,90 €
ISBN : 9782818986912
« - Vous avez lu récemment des ouvrages concernant l’histoire de l’Espagne ou du Portugal ? Les conquistadors ?
- Non.
- Avez-vous des origines, des ancêtres de ce côté-là ?
- Je ne crois pas.
- De toute façon, je ne vois pas trop ce que ça nous donnerait… Il faudrait croire en des histoires de réincarnation… Ce qui n’est pas vraiment mon cas !
- Le mien non plus ! »
Le thérapeute d’Alex est vraiment désolé. Il ne parvient pas à décoder le rêve récurrent que fait son patient. Alex est dans un lieu étrange. Il fuit des corbeaux l’assaillant. Il perd un pendentif accroché à son cou, trouve des ossements et affronte un loup se transformant en démon. Dans son rêve, Alex se nomme Bencomo. Son ennemi s’appelle Iruene, Iruene le démon. Seul capable de trouver une réponse à ses tourments, Alex va mener une enquête qui va le mener jusqu’aux îles Canaries.
© Griffo, Rodolphe - Daniel Maghen
En baie de Sprague, l’eau a disparu depuis bien des années. La mer s’est retirée. Niels et Vivian, deux frères aventuriers, partent en expédition avec Cap’tain Greg, capitaine de vaisseau aveugle dont les yeux sont ceux du perroquet vissé sur son épaule. Les récoltes sont en train de mourir. Il faut au plus vite trouver un moyen de faire revenir la mer afin de rééquilibrer l’écosystème.
© Roman, Rodolphe - Daniel Maghen
Avec Iruene et Sprague, Rodolphe réalise en ce printemps un coup double chez Daniel Maghen. Scénariste pilier de cette classieuse maison d’édition à la production aussi fine que qualitative, Rodolphe multiplie les projets, séries ou one shot, aussi divers qu’originaux. Iruene est co-scénarisé par son dessinateur Griffo. Résidant aux îles Canaries depuis trente cinq, le dessinateur a vu sa vie bouleversée par l’éruption du Cumbre Vieja sur l’île de la Palma, alors qu’il était en pleine réalisation de cet album : Iruene. Ce personnage est l’incarnation de ce volcan. Le dessinateur a invité son scénariste à creuser l’Histoire de l’île, revenant au temps des conquistadores et de l’épuration subie par les autochtones. Sprague est un pur scénario écologique, dans la veine de Ter et Terre. Fable invitant à réfléchir sur l’avenir de la planète, sous couvert d’un récit d’Heroïc-Fantasy sans abus de bestioles extravagantes, l’album soulève un problème majeur : celui de la préservation des océans.
© Griffo, Rodolphe - Daniel Maghen
Les dessinateurs de ces deux albums sont deux valeurs sûres. Véritable stakhanoviste du dessin, on ne présente plus Griffo qui en a fait du chemin depuis Giacomo C. On peut juste regretter quelques touches informatisées qui mettent un peu de distance. Le nom d’Olivier Roman rappellera des souvenirs à certains. Il n’était rien d’autre que le dessinateur de Harry Dickson sur scénarii de Richard Nolane dans les années 90. Romane construit ici un univers aride de toutes pièces. Dépaysement assuré. Il serait dommage que cet univers cesse d’être exploité là.
© Roman, Rodolphe - Daniel Maghen
Entre une affaire de métempsychose et un conte rétro-futuriste, Rodolphe est un merveilleux raconteur d’histoires, un des derniers fabulistes qui a le pouvoir d’embarquer ses lecteurs dans des mondes originaux.
Laurent Lafourcade
One shot : Iruene
Genre : Aventure fantastique
Scénario : Rodolphe & Griffo
Dessins & Couleurs : Griffo
Éditeur : Daniel Maghen
Nombre de pages : 96
Prix : 19 €
ISBN : 9782356741066
One shot : Sprague
Genre : Science-fiction
Scénario : Rodolphe
Dessins : Olivier Roman
Couleurs : Denis Béchu
Éditeur : Daniel Maghen
Nombre de pages : 88
Prix : 19 €
ISBN : 9782356741110
« - Madame de Raezal, quel plaisir…
- Je vous remercie, Madame la Marquise, de prendre la peine de m’accueillir alors que nous ne nous connaissons pas.
- Chère Violaine, je vous en prie, appelez-moi Pauline… J’ai appris pour votre époux...
- Justement, je ne vous cacherai pas, Madame, que depuis la disparition de mon mari, je ressens la nécessité de me rendre utile.
- C’est fort louable…
- Voilà… Je… Je souhaite me consacrer à des œuvres de charité pour porter secours aux malheureux, en mémoire de Gabriel qui était un homme très généreux. »
La Comtesse Violaine de Raezal vient de perdre son mari. Désireuse de porter son aide aux nécessiteux, elle souhaiterait tenir un comptoir au Bazar de la Charité qui se tient dans quelques semaines. Les places sont limitées. Les lieux ne sont pas extensibles. Par chance, la Comtesse se liera d’amitié avec la Duchesse Sophie d’Alençon qui lui offrira l’opportunité de réaliser son projet. Constance d’Estingel, elle, est une jeune femme élevée par les Sœurs, dans une institution dominicaine de Neuilly. Elle doit se fiancer avec Laszlo, mais, bien qu’il soit de bonne famille, ce n’est pas du goût de tout le monde, et en particulier de la Mère Supérieure. Violaine, Sophie et Constance, trois femmes de la fin d’un siècle vont voir leurs destins se croiser au Bazar de la Charité le 4 mai 1897, lorsqu’un des premiers projecteurs de cinématographe prendra feu dans une salle de l’établissement, embrasant les lieux avant que la foule ne puisse fuir. Des personnalités vont se révéler, dans le bon ou le mauvais sens. Les vies de Violaine, Sophie et Constance vont être bouleversées à tout jamais.
© Wyllow, Quella-Guyot - Philéas
Didier Quella-Guyot adapte le roman de Gaëlle Nohant paru en 2015, inspiré d’un fait réel. L’écrivaine a mis en scène l’événement avec des personnages forts et une intrigue passionnante. On est immergé dans la grande société de l’époque. On comprend qu’il n’était pas toujours ni facile, ni avantageux de naître avec une cuillère d’argent dans la bouche. Didier Quella-Guyot met en scène ces personnages avec beaucoup plus de fidélité que ne l’avait fait TF1 dans sa non moins excellente série télévisée avec Audrey Fleurot, Camille Lou et Julie de Bona dans les rôles principaux. Le scénariste n’étend pas inutilement l’incendie. La scène fait six planches sur les cent-dix de l’album. Quella-Guyot met en exergue les volontés féminines, prémisses d’un féminisme alors inexistant, comme le démontrait Gaëlle Nohant dans son roman.
© Wyllow, Quella-Guyot - Philéas
Au dessin, Wyllow reste dans un réalisme propre à la « Histoires authentiques » comme on pouvait en lire jadis dans le journal Tintin. Si l’ensemble tient la route, il manque un peu de finesse à ses décors et un peu plus d’âme dans les personnages parfois figés. Le dessinateur se détend néanmoins en fin d’album avec une planche finale bien exécutée et comme on aurait aimé en voir plus.
© Wyllow, Quella-Guyot - Philéas
Fresque romanesque aux personnages que n’aurait pas renié un Victor Hugo, La part des flammes est un exemple de récit aussi efficace qu’émouvant.
Laurent Lafourcade
One shot : La part des flammes
Genre : Drame
Dessins & Couleurs : Wyllow
Scénario : Didier Quella-Guyot
D’après : Gaëlle Nohant
Éditeur : Philéas
Nombre de pages : 112
Prix : 19,90 €
ISBN : 9782491467142
« - Ah ! Nos héros sont déjà là ! Bravo, Fantasio, pour ta mise à feu ponctuelle ! C’est une véritable hécatombe ! Magnifique !
- Pas d’quoi…
- Quant à toi, Spirou, Victor nous a raconté : félicitations pour ta perspicacité, sans toi, c’est un convoi de prisonniers que nous détruisions par négligence.
- Oh, c’est la chance. Vous ne pensez pas qu’on aurait mieux fait d’arrêter ce train pour les libérer ?
- Quoi ? Mais quelle idée ! Pour se retrouver avec un régiment de SS aux trousses qui nous auraient tous massacrés sans pitié ? »
La fin de la guerre semble proche. Les boches devraient bientôt être vaincus. Mais pour Spirou, une victoire dans le sang n’est pas ce qu’il souhaitait. Il doit se rendre à l’évidence qu’il n’y a peut être pas d’autre solution. Avec Fantasio et Spip, il vient de rejoindre une bande de maquisards. Les allemands sont aux abois. Ils brûlent les fermes des paysans soupçonnés de résistance. Après un mois dans les bois, Spirou et ses compagnons apprennent par Victor et Mieke que les Alliés ont débarqué à Bruxelles. Il est temps pour nos héros de rejoindre la capitale. Y retrouveront-ils les artistes cachés Félix et Felka ?
© Bravo, Benoit - Dupuis
Dernier volet de L’espoir malgré tout pour Emile Bravo. C’est l’heure de la libération et des règlements de compte. Pour les héros, la joie ne peut être totale tant le traumatisme du conflit est grand. Les cicatrices jamais ne pourront se refermer. Le propos de Bravo était d’expliquer comment Spirou allait devenir le personnage codifié par Franquin. Il raconte comment Jean-Baptiste est devenu Spirou. La planche où il retrouve son uniforme est vraiment poignante. Il prendra confiance en lui et ne se laissera plus manipuler.
© Bravo, Benoit - Dupuis
La question que l’on peut se poser est : L’espoir malgré tout, est-ce d’abord une aventure de Spirou, ou est-ce principalement le récit d’un conflit ? Dans tous les cas, on est bien dans la naissance d’un héros. Mais l’œuvre d’Emile Bravo se rapproche plus d’un travail de mémoire sur la Seconde Guerre Mondiale que d’une aventure classique du groom. L’histoire est formidable mais l’aurait été tout autant avec un autre personnage que Spirou. On a dû mal à réaliser que c’est lui qui ramènera le Marsupilami de Palombie, lui qui combattra Zorglub, lui qui parcourra le monde de l’Afrique du Niokolo-Koba au Pôle Sud de Virus.
© Bravo, Benoit - Dupuis
Le peintre qu’a rencontré Spirou dans ce tournant du siècle a réellement existé. L’album se clôt par le dernier tableau peint par Felix Nussbaum avant son arrestation en juin 1944, témoignage poignant d’une époque tragique. Et pour revenir sur le questionnement de l’intérêt d’avoir placé Spirou en personnage principal de cette histoire, répondons que peu importe. Avec la quadrilogie de L’espoir malgré tout, Emile Bravo a tout simplement signé une œuvre majeure de la bande dessinée du vingt-et-unième siècle.
Laurent Lafourcade
Série : Spirou, l’espoir malgré tout
Tome : 4 - Une fin et un nouveau départ
Genre : Aventure historique
Scénario & Dessins : Emile Bravo
Couleurs : Fanny Benoit
Éditeur : Dupuis
Nombre de pages : 48
Prix : 13,50 €
ISBN : 9791034731640
Paris, lundi 15 avril 2019, 18h18, une première alarme incendie retentit en plein office dans les murs de Notre-Dame sans que l’on détecte le moindre feu. Trente minutes plus tard, une seconde alerte incendie se fait entendre provoquant l’évacuation des lieux. Un départ de feu dans la charpente est constaté par les agents de sécurité.
L’origine de l’incendie est détectée dans la charpente à la base de la flèche qui culmine à 93m. Composée de 500 tonnes de bois et 250 tonnes de plomb, elle est l’œuvre de l'architecte Viollet-le-Duc. En début de soirée, les journaux télévisés du monde entier débutent avec les images de l’incendie ravageant le toit de la cathédrale. A cet instant, beaucoup de personnes pensent que l’humanité va perdre l’un des joyaux de la République française. Et pourtant, la cathédrale avait déjà été menacée précédemment !
© Rubio – Ocana - Delcourt
La construction de l’édifice débute sous le règne de Louis VII en 1163, s’étalant sur deux siècles, se terminant en 1345. Notre-Dame va traverser les siècles, connaissants divers déboires. Sous la Révolution, elle est mise à disposition de la nation et va connaitre de nombreux actes de vandalisme. Lors de l’interdiction du culte catholique, elle sera transformée en entrepôt de vin. En 1804, Napoléon Bonaparte va s'y faire sacrer empereur des Français, en présence du pape Pie VII. Pour la circonstance, l’édifice avait été blanchi à la chaux.
© Rubio – Ocana - Delcourt
La cathédrale était alors dans tel état de délabrement que les responsables de la ville envisagèrent la possibilité de l'abattre totalement. C’est l’époque où Victor Hugo va écrire son roman Notre-Dame de Paris qui remporta un énorme succès mais avait également pour but de sensibiliser le public à la valeur du monument. Amoureux du site, Victor Hugo contribua largement à sauver ce dernier d'un destin fatal ! Un grand programme de restauration fut décidé. En 1845, Prosper Mérimée se tourna vers Jean-Baptiste Antoine Lassus et Eugène Viollet-le-Duc afin de sauver Notre-Dame.
© Rubio – Ocana - Delcourt
C’est cette incroyable histoire qui va nous être exposée par le scénariste Salvia Rubio et le dessinateur Eduardo Ocana. Ce duo va plus particulièrement s’attacher à nous expliquer la vie d’Eugène Viollet-Le-Duc, un architecte allant à contre-courant de son époque afin de sauver l’art gothique alors qu’il ne possédait aucun diplôme des Beaux-Arts. A la mort de Jean-Baptiste Antoine Lassus, Viollet-le-Duc va se retrouver seul pour terminer l’immense travail de restauration de Notre-Dame de Paris.
© Rubio – Ocana - Delcourt
En conclusion, une bande dessinée qui va nous apprendre une multitude d’informations sur Notre-Dame de Paris, mais aussi sur son sauveur qui va donner son nom à la flèche qui lors de l’incendie du bâtiment va s’écrouler au plus grand désespoir de l’ensemble des témoins de la catastrophe.
Alain Haubruge
Titre : Viollet-le-Duc
Série : Les Bâtisseurs
Tome : 1
Collection : Histoire et histoires
Genre : Récit historique
Éditeur : Delcourt
Scénario : Salvia Rubio
Dessinateur : Eduardo Ocana
Nombre de pages : 72
Prix : 15,95 €
ISBN : 9782413037736
Les cœurs de ferraille une histoire d’amour entre humains et robots
Dans un univers à la Tom Sawyer avec une technologie hyper-moderne, Iséa est une jeune fille d’une dizaine d’année qui vit seule avec sa mère. Seule, pas vraiment. Iséa a une nounou, Debry, en la personne d’un grand robot humanoïde. La gamine communique en visio avec Tal, une camarade avec qui elle raconte ses journées. Mais par-dessus tout, Iséa est passionné d’une histoire, celle de Cyrano de Bergerac. Entre une mère autoritaire qui n’a pas pour sa fille l’amour qu’elle devrait lui donner et un robot cœur de ferraille en apparence mais cœur qui bat en réalité, Iséa tente de grandir. « Quand on est triste, il faut regarder la beauté du monde... » lui propose Debry en l’emmenant regarder les étoiles depuis le toit de la maison, simplement regarder les étoiles… Les BeKa signent un scénario surprenant, une histoire émouvante que l’on n’avait pas vu venir. Des robots dotés de sentiments, ce n’est pas nouveau dans la fiction. Mais au temps de la ségrégation, c’est inédit. Un robot est l’esclave idéal, mais à partir du moment où sa conscience s’éclaire, peut-on toujours le considérer ainsi ? Les cœurs de ferraille est un récit sur la servitude et ses conséquences, non seulement à la fin de ce XIXème siècle uchronique, mais jusqu’à aujourd’hui où des parallèles s’écrivent. José-Luis Munuera était le dessinateur idéal pour incarner ce récit. Capable d’alterner des scènes contemporaines à l’histoire et des passages issus de l’œuvre de Rostand, l’auteur espagnol apporte toute l’émotion, toute la tendresse, toute la tristesse parfois, donnant une dimension poignante à un conte dont les relations mère-fille sont au cœur… de ferraille.
Pour les abonnés, suite de la prépublication en trois mini-livrets de la nouvelle série de Joann Sfar et Benjamin Chaud : Héliotrope.
Spirou, ami, partout, toujours.
© Sfar, Chaud – Dupuis
Histoires à suivre :
Cœurs de ferraille (Les) : Debry, Cyrano et moi
Sœurs Grémillet (Les) : Le trésor de Lucille
Spirou, l’espoir malgré tout : Une fin et un nouveau départ
Récit complet :
Clairière s’amuse ! (la) : Pâle emploi
Gags (strips, 1/2, 1 et 2 planches) :
Capitaine Anchois
Coach (Le)
Crash Tex
Professeur Foldogon (La pause-cartoon)
Dad
Des gens et inversement (La pause-cartoon)
Edito (L’)
Elliot au collège
Fifiches du professeur (Les) (La pause-cartoon)
Game over
Houba gags
Incroyable tournée du Crumble Club et son orchestre (L’)
Kid paddle
Méthode Raowl (La)
Nelson
Pernille
Spoirou & Fantasperge (Marges de Sti)
Strip dont vous êtes la star (Le)
Tash & Trash (La pause-cartoon)
Terence & Bud
Rubriques :
Coin des lecteurs (Le) : Libon
En direct du futur : Dad TV (Klein)
Interview : BeKa et Munuera
Jeux : Cœur de récré (Waltch & Now)
Spirou et moi : Turk
Supplément abonnés :
Mini BD : Héliotrope (2/3)
En kiosques et librairies le 25 Mai 2022.
2,70 €
Laurent Lafourcade
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©BD-Best v3.5 / 2022 | ![]() |
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