Nouvelles relatives ŕ la bande-dessinée ou au graphisme
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Ecosse, Terre de légendes, un voyage fantastique

Que vous soyez elfe, lutin, fée ou tout autre voyageur du Petit Peuple, ce guide vous sera très utile pour visiter l’Écosse ! Écrit par le brownie Meegrit, suite à ses rencontres avec diverses créatures fantastiques au cours de son dernier voyage à travers les différentes régions du pays, il vous aidera à éviter les pièges et autres chausse-trappes à la croisée des chemins. Vous y trouverez également une sélection des meilleures adresses : artisans, pubs et auberges. Désireux de renouveler un peu le genre, Michel Rodrigue et David Pellet ont créé un livre illustré unique en son genre, véritable « guide du routard » du fantastique écossais. Derrière le ton souriant de Meegrit, les auteurs n’en demeurent pas moins sérieux quand il s’agit de partager les nombreuses légendes glanées par Michel Rodrigue au cours de ses pérégrinations écossaises… ou de les inventer ! David Pellet n’est pas en reste : inspiré par ces contes et légendes, le dessinateur peut laisser libre cours à son talent, alternant les styles et les traités graphiques avec brio.

 

 

 

Un ouvrage indispensable, sous peine de croiser un Nuckelavee au détour d’une lande sauvage ou… de manquer de somptueux tartans ! « L’Écosse, terre de légendes » est né d’un partenariat inédit entre les éditeurs Le Lombard et Huginn & Muninn. Fort de 66 ans de planches et de bulles, depuis les premières pages du journal « Tintin » jusqu’aux actuels albums de « Thorgal », « Alpha », « Léonard » ou bien encore « Les Schtroumpfs », Le Lombard est bien connu des bédéphiles. Huggin & Munnin est une maison d’édition spécialisée dans les beaux livres et la culture geek, que sa jeunesse n’a pas empêché de s’imposer comme une référence du secteur, grâce à des succès tels que « Lego Star Wars » ou « L’Encyclopédie Harry Potter ». « L’Écosse, terre de légendes », « Le fabuleux Abéféedaire farfelu » (Moguerou) et « Les dieux du Nil » (Crisse et Besson) ouvrent ainsi le bal d’une nouvelle ligne de livres d’illustrations, née de la conjugaison de leurs talents et rassemblant les meilleurs auteurs dans les plus beaux livres. Finement ouvragés, ces derniers ont été pensés comme autant d’écrins pour sublimer les univers des grands noms de l’illustration et du 9e Art.

 

 

 

 

Véritables collectors, ces albums grand format sont imprimés sur un papier luxueux, et contiennent chacun quatre dessins prêts à encadrer, pour le plus grand plaisir des amateurs d’imaginaire graphique.

 

Ecosse. Terre de légendes

Un véritable guide de voyage, indispensable à tout touriste impatient de découvrir les richesses cachées de l'Ecosse, depuis le monstre du Loch Ness jusqu'aux sorcières qui font s'échouer les navires au large des côtes.

Ecosse. Terre de Légendes

Sortie le 15 juin 2012

Scénario : RODRIGUE
Dessin : PELLET DAVID

Edité chez Lombard, 96 pages au prix de 34.95 €



Publié le 06/06/2012.


Source : Graphivore


Coup de coeur : Conquistador

emblant tombé en disgrâce auprès du Roi d'Espagne, Cortès s'apprête  à quitter provisoirement Tenochtitlan pour repousser l'expédition punitive menée par Ponfilo de Narveaz. L'Espagne pense que Cortès s'enrichit personnellement au détriment de la couronne.
En homme avisé, Cortès convoque un homme dont les qualités d'homme d'armes ont fait parler de lui : Hernando Royo. Il lui confie une mission : s'emparer d'une partie du trésor accumulé dans le temple et de déposer le butin aux pieds du Roi afin de faire taire les rumeurs d'enrichissement personnel. La pièce maitresse étant constituée par l'amulette de Txlaka, objet devant lequel tous les prêtres de l'empire se prosternent et obéissent.


Royo accepte la mission sans rechigner mais se voit commandé par une femme du nom de Catalina guerero. Celle-ci n'ayant pas froid aux yeux met au point un plan qui grâce à la complicité d'une jeune fille esclave du grand prêtre Oczu, devrait leur permettre de pénétrer dans la salle du trésor. A la grande surprise du petit groupe, l'esclave les trahit. Le piège se referme sur les voleurs. Oczu jubile. Les avertissements lancés à l'adresse de l’empereur s'avèrent être exacts. Ce ne sont pas les envoyés du dieu Quetzacoatl mais de vulgaires mortels et voleurs de surcroit. Par un moment d'inattention, la situation tourne en faveur de la petite troupe et ceux-ci s’échappent. Oczu sacrifiant un de ses bras au dieu Txlaka réveille sa colère. La petite troupe prends les chemins de traverse et enfouit le butin à l’exception de l'amulette de Txlaka...

 


Dufaux utilise l'histoire et ses noms célèbre pour nous mener dans un récit ou se mêle réalité et fiction. Il manie à la perfection ce type de scénario où le hasard n'est pas une coïncidence. Du très bon scénario qui ne mérite aucun commentaires sinon : que vivement la suite !


Cortès est réellement tombé en disgrâce auprès de la cour d'Espagne et Ponfilo de Narvaez a réellement mené une expédition punitive à l'encontre de Cortès soupçonné de s'enrichir au détriment de la couronne. Ils ne se sont point affrontés mais ont fait alliance. Les Espagnols ont profité d'une éclipse qui annonçait le retour de Quetzacoatl et la fin du cinquième soleil dans leur calendrier. Cela pouvait signifier la fin du monde. Pour eux, les Espagnols avec leurs chevaux et leurs bouche à feux (canons) étaient bien les dieux annoncés.
Hélas, Cortès n'était pas dieu et il conquit cet immense pays qui devint le Mexique actuel. Il eut même une maîtresse convertie qui se nommait Tenépal (la malincha) elle le servit fidèlement et permit de franchir plus facilement des barrières par la connaissance du pays et de ses coutumes. La Malincha mourut abandonnée sous les tortures de l'inquisition.
Le centre de Mexico est construit sur les ruines du temple de Moctezuma II, rasé par les troupes Espagnoles en représailles au soulèvement faisant suite au massacre de prêtres par Alavarado et sa tentative de voler l'or de Moctezuma. Il faut croire que Dufaux se serait inspiré de Alvarado pour imaginer le vol du trésor.
Moctezuma est mort d'une flèche ou d'une pierre indigène. Ce meurtre fut probablement initié par son propre frère, ou les prêtres qui lui en voulaient de temporiser trop avec les Espagnols..... 

 

 

Xavier nous gratifie de l’excellence de son coup de crayon. Ses personnages expriment parfaitement les émotions que Dufaux veut nous transmettre. Le prêtre Oczu glace les sangs par son visage cruel dans cette époque ou les sacrifices humains étaient courants, malheurs aux perdants. La page de couverture exprime à elle seule la noirceur de ce récit sanguinaire.
Les yeux rendent beaucoup la noirceur de l'âme d'Oczu. Ce personnage m’impressionne particulièrement en page 16,17 et 51.
Xavier excelle  aussi dans le rendu des personnages féminins, il est d'ailleurs dommage de ne les rencontrer qu'en BD ce genre de mignonnes alliant grâce, classe et beauté sauvage, mêlée à un soupons de mœurs légères.
Les détails du dessins sont toujours au rendez vous, veines saillantes, yeux injectés par la rage, corps gracieux ou abjects, paysages luxuriants... Mention spéciale aussi pour le rendu effrayant des sculptures des dieux cruels.
Panier plein pour Xavier. Que dire si ce n'est que  : j'aime !!!!
Mitton (Quetzacoatl) avait en son temps bien rendu cette période de l'histoire, de même que Ignacio Noé (Helldorado), mais ici les détails du dessins sont grandioses.



Publié le 01/05/2012.


Source : Graphivore-Eric Dewit


Coup de coeur : La mémoire de l'eau

Le jour où Marion emménage avec sa mère dans la maison de famille dont elles ont hérité, une nouvelle vie commence pour la petite fille. Fini la vie citadine, les voilà installées au bord de la mer, dans le village où ses grands-parents ont vécus plus de trente ans auparavant. L'endroit est magique : une vue imprenable, la plage au pied du jardin... Au village, les plus anciens se souviennent du grand-père de Marion, disparu en mer bien avant sa naissance ; c'est l'occasion pour elle d'en apprendre un peu plus sur l'histoire de sa famille, dont elle ne sait presque rien. Et puis, il y a ces rochers sculptés, sur la lande, dont les anciens du village disent qu'ils sont une trace de légendes oubliées...

 

 

 

 



Celui qui a dit ou écrit que pour réussir un film ou une BD, l'ingrédient essentiel est avant tout une bonne histoire avait bien raison. La preuve avec ce premier tome de la Mémoire de l'eau, diptyque dont le second volet est annoncé pour juin, et qui permet de découvrir un Matthieu Reynès (Alter Ego) scénariste pour sa compagne Valérie Vernay (Agathe Saugrenu). Car c'est sans conteste à une bonne histoire que l'on a affaire. Une histoire de prime abord toute simple mais qui met en scène des personnages immédiatements attachants dans un cadre à la fois séduisant et mystérieux. Ainsi, on suit en tout et pour tout 4 personnages dans ce premier album (celui du gardien de phare, le 5ème, n'apparaît vraiment qu'à la toute fin), sans énorme suspense ou retournement de situation, sans violence, mais autour d'une énigme qui se dessine par petites touches, doucement et sûrement. On suit Marion dans ce qui ressemble, quelque part, à la recherche de ses racines, et c'est une petite magie qui opère. On a envie de voir ses pas sur la plage et de découvrir avec elle ces mystérieuses pierres sculptées... Nostalgie peut-être ? Nostalgie de certains feuilletons qui enchantaient notre enfance ? Et puis, c'est vrai que l'endroit où la petite fille et sa maman s'installent fait rêver. Valérie Vernay signe de très belles planches (pastel gras ?) dans un style semi-réaliste faussement simple et tout en douceur, au diapason de la première partie de cette histoire qui contraste avec la grande majorité de la production actuelle et s'adresse vraiment à un très large public. Matthieu Reynès construit de son côté un scénario parfaitement fluide, dévoilant très progressivement les éléments du mystère de La Mémoire de l'eau. Et qu'est-ce que c'est gai de prendre son temps, d'évoluer tout doucement dans l'histoire sans être secoué de multiples façons par mille rebondissements rocambolesques ou trop artificiels ! La Mémoire de l'eau nage à contre-courant et c'est très bien ainsi. Son charme opère, laissant une impression de douceur ou une envie de vacances. Gageons que le second volet aura conservé toutes ces qualités. Mention spéciale aussi à la couverture et à la maquette de l'album. Coup de coeur !

Pierre Burssens

 

La Mémoire de l'eau tome 1 par Vernay et Reynès, 48 pages, 12 €, paru chez Dupuis le 6 avril 2012





Publié le 23/04/2012.


Source : Graphivore


Coup de coeur : Wunderwaffen, une uchronie de haut vol

1946 : LA GUERRE CONTINUE !

1946 : Les armes volantes spéciales des Nazis déciment les avions alliés.
Mais le pire reste encore à venir…En cet été 1946, les Japonais ont été battus mais la Seconde Guerre mondiale continue en Europe après l’échec surprise du débarquement allié, le 6 juin 1944.
D’étranges avions à réaction totalement révolutionnaires, surnommés Wunderwaffen (« Armes miracles »), défendent désormais efficacement l’Allemagne. Le major Walter Murnau, tête brûlée, homme d’honneur et talentueux pilote de Wunderwaffen, se retrouve décoré par Adolf Hitler, atrocement mutilé lors d’un attentat, qui lui inspire crainte et dégoût. Le voilà publiquement surnommé « Le pilote du Diable »… Il devient alors l’icône d’un régime qu’il déteste. Sans se douter que même pour le « Pilote du Diable », l’enfer n’est jamais loin...

 

 

 

 

Une uchronie de haut vol

Richard D. Nolane, connu aussi pour ses divers ouvrage ufologique, rentre dans le monde de la bande dessinée avec ce premier tome de WunderWaffen ( armes miracles en allemand) appuyé par les graphismes somptueux de Maza. Encore une uchronie dirons certains d'entre-vous, certes. Une mode à laquelle s'adonnent nombre d'auteurs ces dernière années. Mais celle-ci est particulièrement intéressante. Nolane nous invite à imaginer le court d'une autre histoire, celle qui aurait vu la défaite des alliés sur le débarquement en Normandie et qui plus est, l'attentat du 8 mai 1945 sur Hitler auquel le furher aurait survécu au détriment de la perte d'un bras et d'un visage partiellement défiguré. Une uchronie qui semble rappeler celle d'un film tel que Philadelphia Experiment, voyage dans le temps hormis bien entendu. Nolane ne fait pas l'apologie du nazisme, son récit est surprenant, dépeignant une course à l'armement et à la haute technologie dont les alliés visiblement accusent un retard qui malgré toute leur bonne volonté et leur détermination, ont beaucoup de peine à combler. La suprématie de la machine de guerre volante nazie ne finissant pas de se perfectionner sauvant par la même occasion un 3eme Reich agonisant. Les combats aériens plongent le lecteur au cœur de l’action. Maza à réussi une véritable prouesse graphique. Ce premier tome à tenu toutes ses promesses et l'éditeur à eu le bon goût d'adjoindre un livret de 8 pages sur les armes miracles allemandes "de la propagande à la mythologie" composé de documents d'époques et d'hypothèse développées sur les fameuses armes secrète du 3eme Reich, thème abondamment employé pour le film Iron Sky à venir ce 4 avril 2012. Oui décidément, les uchronies ont le vent en poupe. Il ne nous restes plus qu'à souhaiter une machine à avancer dans le temps pour découvrir le tome 2. En attendant ce miracle, je ne puis que vous conseiller la lecture de cet excellent album.

 

Marcus

 

Wunderwaffen par Richard D. Nolane & Maza. 56 pages au prix de 14.30 €, édité par Soleil Productions.



Publié le 01/04/2012.


Source : Graphivore


Coup de coeur : La légende du Changeling T.5 –

Le diabolique Sir Charles Warren est mort, mais Spring Heeled Jack, le démon réveillé par son club des Damnés, court toujours les rues de Londres, qu'il envahit de sa noirceur sanguinaire. Cela ne peut signifier qu'une chose : la frontière séparant les deux mondes devient poreuse et Scrubby, l'enfant échangé par les fées, va devoir assumer son rôle d'ambassadeur, et débarrasser les humains du démon. Pour cela, il lui faudra comprendre pleinement ses origines, là-bas, dans les limbes entre fiction et réalité...

 

 

Il arrive parfois, trop rarement sans doute, en fermant un livre, qu'il s'agisse d'un roman ou d'une BD, que l'on se dise, et avec quelle satisfaction : « c'était une belle histoire ». Un sentiment qui semble tout bète, tout simple, mais qui, in fine, transcende les genres, les styles et touche à l'essentiel. C'est exactement ce que j'ai ressenti en achevant la lecture de cette Nuit Asraï, cinquième et dernier tome de la Légende du Changeling, série qui m'aura enchanté depuis son début et dont j'aurai attendu chaque album avec curiosité et impatience.

 

Une belle histoire, peut-être la plus belle qu'ait écrit Pierre Dubois, magnifiquement mise en images par Xavier Fourquemin et en couleurs par Scarlett Smulkowski. Une belle histoire sans aucune faute de goût, avec une dimension fantastique dont les enjeux se sont pécisés et ont pris corps au fil des albums. Une dimension qui, cette fois, baigne totalement cette Nuit Asraï, les deux mondes se rejoignant, pour un album qui est sans doute le plus « magique » de la série. Pour Scrubby, l'heure du choix est venue... Et on va de surprise en surprise, tout au long de ce chapitre final rempli de clin d'oeils et de références, à commencer par un petit rôle donné à un personnage qui ressemble très fort à Miss Endicott, héroïne d'un autre beau diptyque chez le même éditeur... Pierre Dubois, en grand spécialiste des contes et légendes s'en donne à coeur joie, avec un scénario très dynamique mais dans lequel la poésie conserve, elle aussi, une jolie place. Le trait de Xavier Fourquemin sert, encore une fois, cet univers avec brio et imagination. Les réponses aux questions laissées en suspens se trouvent dans ces ultimes pages. Quelque part, la boucle est bouclée et c'est en apothéose que se referme la légende du Changeling. Quant à moi, je vous avouera que c'est avec un petit pincement aucoeur que j'ai refermé cet album somptueux, avec l'envie aussi de relire les quatre qui l'ont précédé, me disant avec bonheur que « c'était une belle histoire » et avec l'envie de remercier les auteurs pour m'avoir offert ça... Et voilà, c'est fait !

 

Pierre Burssens

 

La légende du Changeling T.5 – La nuit Asraï, édité par lombard le 30 mars 2012, 64 pages au prix de 14.45 €



Publié le 30/03/2012.


Source : Graphivore


Le Périple de Baldassare T.2 – Un ciel sans étoiles

Décembre 1665. Parti sur les traces du Centième Nom, ouvrage légendaire qui contiendrait le nom caché de Dieu, et de ce fait capable d’assurer le salut du monde, Baldassare Embriaco, Génois d’Orient négociant en livres et curiosités, débarque à Smyrne en compagnie de la belle Marta, une veuve avec qui s’est nouée une intense relation amoureuse. Rien ne va s’y dérouler comme ils l’escomptaient. Marta, enceinte, découvre que son mari n’est pas mort, et Baldassare, qui croyait Le Centième Nom perdu, apprend qu’il serait entre les mains d’un commerçant anglais. Au seuil de la redoutable année 1666, Baldassare, expulsé vers le nord, prend bientôt le chemin de Londres, où, toujours sur la piste du Centième Nom, l’attendent de nouvelles aventures…

 

 

 



Le « Centième nom », paru l'an dernier, avait constitué pour moi un véritable coup de coeur, très probablement motivé par sa différence, et ce « Ciel sans étoiles » suit le même chemin... En effet, avec le Périple de Baldassare, on se trouve avant tout face à l'adaptation d'une oeuvre littéraire et cela se sent. Si pour vous une BD doit se caractériser par de l'action à tous crins, d'incessants rebondissements, un suspense insoutenable ou de bruyantes onomatopées, ce Périple ne vous satisfera pas. Sur les traces d'Amin Maalouf, Joël Alessandra prend son temps pour nous emmener dans cet incroyable voyage au coeur du 17ème siècle, aux frontières de l'Orient et de l'Occident. Et si son s'attache bien vite aux personnages, à la quête un peu folle de Baldassare ou à la très belle Marta, c'est bien le Périple qui donne son titre au roman d'Amin Maalouf et à la série qui constitue le coeur de l'histoire. Ce tome 2 nous conduit ainsi de Smyrne (Izmir) à Londres, en passant par Chio, Gênes et Amsterdam. A l'image des couleurs de la couverture, les lumières européennes sont différentes de celles de la méditerrannée, et Joël Alessandra excelle à faire varier ces climats, qui s'assombissent aussi dans la quête du héros, séparé de son aimée, entrant en cette année 1666 dans l' « année de la bête », et confronté au « Centième Nom », ouvrage légendaire...qu'il ne parvient pourtant pas à lire... Baldassare voyage, nous faisant découvrir non seulement ces villes, ces paysages, mais autant de personnages singuliers. Il faut prendre le temps du voyage comme celui de la rencontre. La grosse majorité des textes de l'album est constituée de narratifs à la première personne, accentuant encore une fois la différence avec nos lectures plus souvent formatées, et le charme opère encore, nous offrant un moment de lecture très particulier. Il y a du Ferrandez (pour ses lumières) et quelque chose de Pratt dans le dessin de Joël Alessandra. Il y a ses couleurs directes aussi, ses aquarelles et le choix de conserver à l'impression la structure et la couleur de ce papier. Il y a ces débuts de chapitres qui évoquent plus un carnet de voyage qu'un album traditionnel, et tout ça se combine pour nous offrir un dépaysement aussi doux qu'envoûtant. Et si le tome 3 devrait conclure cette adaptation pour Angoulême 2013, plutôt que de s'impatienter, il est parfois bien plaisant de se dire que l'on a de quoi prendre le temps de relire et d'apprécier encore, d'ici là, les deux premiers volets de cette trilogie différente. Quand je vous dis que le charme opère...

 

Pierre Burssens.

 

Le Périple de Baldassare T.2 – Un ciel sans étoiles par 

Joël Alessandra et Amin Maalouf édité chez Casterman, 64 pages au prix de 14 €

 



Publié le 20/03/2012.


Source : Graphivore-Pierre Burssens


Coup de coeur : Clair-obscur dans la Vallée de la Lune

José Suarez, guide touristique dans les haut-plateaux du Chili, est un homme sombre, rongé par un secret qui l'empêche de vivre et d'aimer. Sa rencontre avec Joan, une touriste américaine, va changer sa vie. Une aventure bouleversante au coeur des somptueux paysages d'un pays au passé douloureux.



Trois ans et demi après le très remarqué "Quelques jours ensemble", publié lui aussi dans la prestigieuse collection "Aire libre", on retrouve les signatures conjointes d'Alcante et de Fanny Montgermont sur une invitation au voyage dans les somptueux paysages du Chili. Voyage qui semble au départ simplement touristique pour Joan Johanson, une américaine au comportement fantasque que doit guider José Suarez. Voyage intérieur pour ce dernier, victime de la torture sous Pinochet et dont la douleur et la quête se dessinent au gré de nombreux flash-backs. Le terrible fardeau porté par Joan, lui, se révèlera seulement après une bonne cinquantaine de pages, insoupçonnable jusque-là, et surprenant totalement le lecteur. C'est cette drôle de rencontre entre deux êtres profondément blessés et, quelque part, en fuite, que nous racontent Alcante et Montgermont, une rencontre qui en appelle d'autres, parsemées de regards, de petites phrases (sublîme visite de l'atelier du peintre...) qui amèneront finalement les deux personnages principaux à prendre chacun le chemin vers la reconstruction de leur être. Le dessin de Fanny Montgermont a encore évolué depuis "Quelques jours ensemble" et colle parfaitement au scénario très sensible et tout en retenue d'Alcante, en excellant notamment à traduire des sentiments à travers un regard ou l'esquisse d'un sourire. Les splendides paysages chiliens, qui sont bien plus qu'un décor, offrent à la dessinatrice l'occasion de nous délivrer quelques pleines pages et même une double page à couper le souffle. Mention spéciale également à la scène des flamants roses, où souffle un beau vent de liberté et d'une rare poésie.

 

 

 

Alcante (Didier Swysen de son vrai nom) distille son histoire par petites touches sensibles, campant des personnages blessés, profondément humains et à la croisée de leurs chemins. Joan et José fuient chacun leur passé. Leur rencontre les amènera à le surmonter. Des qualités déjà bien présentes dans l'écriture de "Quelques jours ensemble" et encore affinées dans ce Clair-obscur dans la Vallée de la Lune. Une rencontre rédemptrice dans les grands espaces qui donne, en tous cas, naissance à un très bel album qui s'inscrira sans doute sans difficulté parmi les grands moments BD de cette année 2012.

 

Pierre Burssens

 

Clair-obscur dans la Vallée de la Lune, 64 pages, collection Aire Libre 15,50 € édité chez Dupuis.



Publié le 06/03/2012.


Source : Graphivore


Coup de coeur : Africa dreams tome 2

1897. Dans le port d’Anvers, on charge et on décharge les vapeurs qui « font le Congo ». Cargaisons d’ivoire et de caoutchouc d’un côté, d’armes et de chaînes de l’autre… Car en dépit du nom officiel de cette lointaine possession africaine – E.I.C., pour Etat Indépendant du Congo –, c’est bien le Roi Léopold II qui en est l’unique propriétaire légal. Et sa consigne est claire : rentabiliser au mieux et au plus vite cette immense colonie, quitte à y faire régner l’arbitraire le plus absolu. Loin des regards, un quasi esclavage est imposé aux populations locales, comme l’a constaté depuis sa récente arrivée au Kivu le jeune missionnaire Paul Delisle. En dépit des discours « civilisateurs », éducation et évangélisation ne sont décidément pas les priorités du tyran de Bruxelles…


La série n’a de « rêves » que le nom. En effet, comme le précise le titre de ce second volume « Dix volontaires sont arrivés enchaînés », les scénaristes (J.F Charles & Maryse) optent vers une narration privilégiant le coté historique au travers du regard de Paul Delisle.
Ce missionnaire, envoyé en Afrique, découvre les exactions commises sur les populations locales au profit du principal propriétaire de l’Etat Indépendant du Congo (E.I.C) avec la complicité des religieux présents au service des autorités. Le journaliste Edmund Dene Morel ainsi que le diplomate Casement prenant connaissance des agissements horribles effectués sur les autochtones dénoncent ceux-ci à l’opinion internationale. L’exploitation des ressources de l’E.I.C a permit de fournir l’industrie automobile naissante en caoutchouc (culture des hévéas) mais aussi a rapporté au roi bâtisseur un rendement frôlant parfois les 500 %.  Mais à quel prix ? Les populations indigènes étaient soumises aux mauvais traitements, l’esclavagisme, la malnutrition mais aussi de nombreuses mutilations « mains coupées » sans compter les nombreux décès dus aux maladies.
Léopold profiteras de cette fortune amassée afin d’ériger de nombreux sites tels que le tracé des avenues de Tervueren et Louise, la création des serres royales à Laeken, du parc et des arcades du cinquantenaire à Bruxelles, transformé la ville d’Ostende en y construisant l’hippodrome et les galeries royales située sur la digue mais aussi constitué un important domaine en Ardenne comprenant les châteaux de Ciergnon, Fenffe, Villers-sur-Lesse et Ferage. Il possède aussi deux domaines sur la Côte d’Azur.

L’ensemble brillamment illustré par Frédéric Bihel privilégie le réalisme par rapport à la ligne claire. Les couleurs et paysages sont superbes. Un très bon moment de lecture historique pour un public composé essentiellement d’adultes mais aussi d’adolescents. Je vous invite à lire le texte ci-dessous avant d’entamer la lecture des deux premiers volumes d’Africa Dreams.

 

 

 

Révérends Pères et chers compatriotes,

La tâche qui vous est confiée à remplir est très délicate et demande beaucoup de tact. Prêtres, vous allez certes pour évangélisation, mais cette évangélisation doit s'inspirer avant tout des intérêts de la Belgique et de l'Europe.
Le but principal de votre mission en Afrique n'est donc point d'apprendre aux nègres à connaître Dieu, car ils le connaissent déjà. Ils parlent et se soumettent à un Mundi, un'Mungu, un Diakomba et que sais-je encore; ils savent que tuer, voler, coucher la femme d'autrui, calomnier et injurier est mauvais. Ayons donc le courage de l'avouer. Vous n'irez donc pas leur apprendre ce qu'ils savent déjà. Votre rôle essentiel est de faciliter la tâche aux administratifs et aux industriels. C'est donc dire que vous interprétez l'évangile de façon qui sert à mieux protéger nos intérêts dans cette partie du monde.
Pour ce faire, vous veillerez entre autres à désintéresser nos sauvages des richesses dont regorgent leur sol et sous-sol, pour éviter qu'ils s'y intéressent, qu'ils ne nous fassent pas une concurrence meurtrière et rêvent un jour à nous déloger. Votre connaissance de l'Évangile nous permettra de trouver facilement des textes recommandant aux fidèles d'aimer la pauvreté, tel par exemple : " heureux les pauvres car le Royaume des cieux est eux ", " Il est difficile aux riches d'entrer au ciel ". Vous ferez tout pour que les Nègres aient peur de s'enrichir pour mériter le ciel. Pour éviter qu'ils ne se révoltent de temps en temps et pour que vous les fassiez craindre, vous devez recourir à la violence. Vous leur enseignerez de tout supporter même s'ils sont injuriés ou battus par vos compatriotes administratifs. Vous leur enseignerez que toute personne qui recourt à la vengeance n'est pas digne d'être fils de Dieu. Vous les inviterez à suivre l'exemple des Saints qui ont tendu la deuxième joue sans recul et insulte. Vous devez les détacher et les faire mépriser tout ce qui leur procure le courage de nous affronter. Je fais allusion ici principalement à leurs fétiches de guerre. Qu'ils ne prétendent point les abandonner et vous mettre tous à l'œuvre pour les faire disparaître. Votre action doit se porter essentiellement sur les jeunes afin qu'ils ne se révoltent pas. Si le commandement du Père est conducteur à celui des parents, l'enfant devra apprendre à obéir à ce que lui recommande le missionnaire qui est le père de son âme. Insistez particulièrement sur la soumission et l'obéissance. Évitez de développer l'esprit de critique dans vos écoles. Apprenez aux élèves à écrire et non à raisonner. Ce sont là, chers compatriotes, quelques-uns des principes que vous appliquerez. Vous en trouverez beaucoup d'autres dans les livres qui vous seront remis à la fin de cette séance. Évangélisez les Nègres à la mode des Africains, qu'ils restent toujours soumis aux colonialistes blancs. Qu'ils ne se révoltent jamais contre les injustices que ceux-ci leur font subir. Faites leur méditer chaque jour " heureux ceux qui pleurent car le Royaume des cieux est à eux ". Convertissez toujours des Noirs au moyen de la chicote. Gardez leurs femmes à la soumission pendant neuf mois afin qu'elles travaillent gratuitement pour vous. Exigez ensuite qu'ils vous offrent en signe de reconnaissance des chèvres, poules, œufs, chaque fois que vous visitez leurs villages. Faites tout pour éviter que les Noirs ne deviennent jamais riches. Chantez chaque jour qu'il est impossible à un riche d'entrer au ciel. Faites-leur payer une taxe chaque semaine à la messe de dimanche. Utilisez ensuite cet argent prétendument destiné aux pauvres et transférez ainsi vos missions à des centres commerciaux florissants. Instituez pour eux un système de confession qui fera de vous de bons détectives pour démentir tout Noir qui a une prise de conscience envers les autorités investies du pouvoir de décision.

Léopold II, Roi de Belgique
(Discours prononcé en 1883 devant les missionnaires se rendant en Afrique)



Publié le 05/03/2012.


Source : Graphivore


Coup de coeur : l'enfant cachée

A la demande de sa petite fille, Dounia va lui raconter son parcours de vie allant de 1940 à la fin de la deuxième guerre mondiale. 
L'histoire de Dounia commence avant le port de l'étoile. Elle raconte comment ses parents lui ont expliqué l'obligation de porter l'étoile. Un petit mensonge pour la protéger mais qui sera vite éventé par la petite Dounia. A travers son parcours, elle explique la montée de l'humiliation et l'évolution des mentalités de ses camarades de classe et des enseignants. Cela aboutira à l'abandon de l'école.Après cela, la situation va s'aggraver. Une nuit, la milice vient les arrêter. Le père de Dounia a le temps de cacher sa fille dans le double fond d'une armoire. Ensuite, la petite fille devra fuir constamment. 
A travers des mots simples, la grand-mère tente d'expliquer à sa petite fille une page d'histoire qui est aussi un peu la sienne...

 

 

 

Parmi les nombreux albums consacrés à la seconde guerre mondiale et à la shoah fin 2011 et début de cette année, « L'Enfant cachée » occupe une place bien particulière. En effet, il est véritablement destiné à un public « de 7 à 77 ans » (et plus) et par cette vision de cette tragédie à travers les yeux d'un enfant, il ne peut qu'aller droit au coeur. Impossible, en effet, de rester insensible au destin de Dounia, d'abord victime des discriminations et humiliations dans sa propre école avant d'être dissimulée dans une garde-robe à double fond alors que l'on vient arrêter ses parents lors de ce que l'on appellera la « rafle du vel'd'hiv' ». Dounia est ensuite prise en charge par une chaîne de solidarité et de résistance avant de retrouver une vie plus « normale » dans une ferme... Et c'est également l'existence de tels mouvements qui est ici mise en lumière, des réseaux qui permirent de sauver 84 % des enfants juifs de France. L'homme est capable du pire comme du meilleur et cette dualité est encore une fois bien présente. En découvrant « l'enfant cachée », on a la sensation de lire une histoire toute simple, mais ce n'est qu'une apparence puisque nous, adultes, connaissons sa véritable résonance. Hors contexte, on saluera aussi le travail des auteurs qui resituent plus généralement la perception que les enfants peuvent avoir de leur vécu. Une histoire toute simple et terrible extraordinairement mise en images par le dessin touchant de Marc Lizano, qui excelle à retranscrire les interrogations de Dounia autant que de merveilleux moments de tendresse. C'est donc sans conteste sous le signe de la mémoire mais aussi de l'émotion qu'est placé cet album hors normes qui a donné lieu à une exposition réalisée en collaboration avec l'ajpn (anonymes, justes et persécutéss durant la période nazie) dévoilée à Angoulême et destinée à circuler dans les écoles en France.

Une BD hors du commun, un must... et pas seulement pour les enfants !

 

Pierre Burssens

 

L'enfant cachée, 80 pages, 16.45 € édité chez Lombard.



Publié le 14/02/2012.


Source : Graphivore


Coup de coeur sur Shelley tome 1

Tout le monde connaît Mary Shelley grâce à son célèbre roman Frankenstein. Mais qui se rappelle des frasques de sa jeunesse ? De la vie débridée du poète Percy Bysshe Shelley, qui lui offrit son nom et qui demeure pour les Anglais beaucoup plus célèbre qu'elle ? Ou encore de la vie incroyablement intense que mena leur ami Lord Byron, le plus grand poète que l'Angleterre ait jamais connu ? Si ces trois-là ont donné leurs lettres de noblesse à la littérature romantique anglaise du début du XIXe siècle, il ne faut pas oublier que les destinées de ces immenses poètes furent encore plus exaltées que leurs écrits.

Il est étonnant de constater combien la littérature anglaise, derrière ses écrits, compte de « personnages » dont les vies auraient elles-même pu donner lieu à des romans. Lewis Carrol, James M. Barrie ou encore ceux que l'on retrouve dans le premier volet de « Shelley », diptyque de Daniel Casanave et David Vandermeulen sont de ceux-là. Percy Bysshe Shelley n'invite-t'il ceux qu'il rencontre à « vivre leurs vies comme un roman » ? Et on se laisse très vite entraîner par cet écrivain et poète fantasque et insouciant, au gré de ses aventures littéraires et amoureuses, dans une existence très éloignée des conventions sociales de son époque et qui le fit à la fois haïr et aduler. S'attaquer à un tel sujet était risqué.

 

 

Il aurait en effet été facile de tomber dans une évocation purement biographique, lourde et surchargée de textes et de références. David Vandermeulen évite cet écueil en nous livrant un portrait léger et immédiatement accrocheur. On se place dans les pas de Percy, on rit de ses excès et de ses provocations comme on est touché par sa sensibilité, et on ne s'ennuie pas une seconde tout au long de cet album. Très typé « bd moderne », le dessin de Daniel Casanave répond merveilleusement au scénario par son dynamisme et son mouvement, sans oublier quelques cases particulièrement belles qui ne peuvent qu'évoquer, sous un trait pourtant très actuel, les gravures de l 'époque. La physionomie de certains personnages est amusante dès le premier coup d'oeil, on se régale ensuite de leur expressivité. Après avoir lu cet album, il est d'ailleurs très difficile de l'imaginer avec un autre dessin, tant l'alchimie scénario/images fonctionne bien. Sur un sujet inattendu, et loin de tout esprit « cours de littérature », c'est une petite perle que l'on découvre là, dans un bien bel écrin qui plus est, puisque c'est dans un petit mais séduisant format 20 x 27 cm que se décline « Percy ». Le second volet, « Mary », plutôt dédié à l'auteure de « Frankenstein » est annoncé pour le printemps. Sans avoir à « vivre sa vie comme un roman », les albums dont on sort un rien plus cultivé, léger et peut-être même un peu plus heureux ne pullulent pas dans les vitrines des libraires ces temps-ci. Ce premier « Shelley » en fait assurément partie. Vivement le printemps !

Pierre Burssens

 

Shelley "Percy" tome1 par Casanave & Vandermeulen, 72 pages au prix de 14.99 € édité par Lombard. Sortie le 10 février 2012

 





Publié le 10/02/2012.


Source : Graphivore


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