Nouvelles relatives ŕ la bande-dessinée ou au graphisme
Flux RSSFlux RSS

1·2·3·4·5·6·7·8·9·10·11·12·13·14·15·16·17·18·19·20


Les Licteurs : une saga sur fond de mythologies

Cette aventure-diptyque est sortie aux Éditions Glénat en Juillet 2020 et j'ai profité de mes derniers jours de congés fin Août  pour la relire. 
Je ne pouvais pas faire une chronique après une première lecture.
Avant de réaliser cette chronique, j'ai dû me replonger dans mes manuels d'histoire afin de replacer certains éléments et événements du monde et de la société Romaine pour mieux apprécier l'excellent  travail d'Olivier RICHARD, le scénariste et surtout du dessinateur Yang WEILIN.

 


 

 

 

 

 

Aussi afin de mieux vous présenter cette superbe saga.
Tout d'abord, un petit rappel historique.

Les Licteurs trouvent leur origine dans la Rome Royale avec une ascendance certifiée par les dernières découvertes en Italie en 2019 sur leur origine Étrusque. Ils possèdent l'Impérium, c'est à dire le pouvoir de contraindre et de punir.

A la fin de la République Romaine, les licteurs sont remplacés dans leur rôle de protection par une garde militaire qui préfigure la garde Prétorienne.
L'action se situe au troisième siècle après JC, soit mille ans après la création de Rome.
C'est là que l'histoire commence.

 

 

 

 

Les Licteurs ne sont pas remplacés ici mais sont devenus la force spéciale armée de Rome. 
L'empereur ambitieux et paranoïaque en place, qui a toutes les apparences d'un Néron, se nomme Héliogabale, empereur qui a bien  existé (vers 203-222 après JC). 
Ce dernier est considéré par le théoricien Antonin Artaud (théoricien et écrivain du début du 20ème siècle) comme un anarchiste couronné et qui a marqué l'Empire romain comme le plus décadent. 
Héliogabale subit une tentative d'assassinat et il ordonne aux Licteurs de partir à la recherche du fauteur de troubles et de ramener les reliques de la secte auquel il appartient : le grand Dieu Pan.  

 

 

 

 

Au fil de cette aventure ésotérique, nous croisons de belles références mythologiques. Tel que l'arbre de Vie des Celtes. L'arbre de vie que les Licteurs décapitent. 
Abattre l'arbre de Vie, c'est abattre Dieu et donc le vaincre.

Nous voyageons,et nous explorons grâce aux Licteurs tant de mondes tel que ceux Jason et les Argonautes.
C'est un récit vraiment haletant. 

Le petit plus que j'aime beaucoup : le Mémento sur la disparition des Oracles par PLUTARQUE (46 à 125 ap JC)

Bravo et encore un grand merci d'avoir sorti en même temps les deux tomes de ce péplum (en tout honneur) qui fourmille d'informations  sur les mondes et mythologies antiques.

Jean Brenot



Série : Les Licteurs

Tome : 1 & 2

Genre : Fantastique, ésotérisme, action et aventures

Scénario : Olivier Richard

Dessins : Yang WeiLin

Éditeur : Glénat

Nombre de pages : 48

Prix : 13.90 €

ISBN :  9782344002285 et 9782344027332



Publié le 18/09/2020.


Source : Bd-best


Nous aimons l’amour et le plaisir, la nature nous a fait ainsi.   Extases T.2 Les montagnes russes

 

 

Il y a des ouvrages dont on ne sort pas indemnes ! Extase en fait partie. Jean-Louis Tripp a choisi de nous ouvrir les portes de son jardin secret. Trente mois après le premier tome d’Extases, l’auteur revient avec la suite de son autobiographie intimiste

 

 

 

 

 

 

 

 

Qui mieux que l’auteur ne peut parler de son autobiographie ?

Extases n’est pas une histoire de cul ! Parlons politique.

De tout temps, l’exercice du pouvoir est passé par le contrôle des corps. Sous des formes dures, violentes, l’esclavage, le massacre, le génocide, mais aussi sous des formes plus subtiles, les interdits, les tabous. Ceci, tu ne peux pas le faire, cela, tu peux, mais tu ne dois pas dire que tu le fais. Ceci, en revanche, est autorisé.

Le patriarcat passe par le contrôle du corps des femmes par les hommes. Les femmes se sont battues et continuent de se battre pour la contraception, l’avortement, contre le viol, l’intimidation, les féminicides… Les combats d’émancipation commencent tous par la récupération de la souveraineté sur son propre corps.

 

 

 

 

 

© JeanLouis Tripp - Casterman

 

 

 

Extases ne raconte pas autre chose qu’un parcours d’émancipation.

C’est l’histoire d’un jeune garçon devenant un jeune homme, puis un homme, qui tente de comprendre qui il est, de définir qui il veut être et de construire son rapport au monde, aux autres, aux femmes en particulier, à la société telle qu’elle est et telle qu’elle évolue, à travers le rapport à son propre corps et à celui des autres.

Le fait est que nous sommes des animaux sexués, et que ce qui nous donne envie de nous reproduire, c’est le plaisir que cela nous procure. Depuis longtemps, l’être humain a cherché les moyens de dissocier ce plaisir des éventuelles conséquences de celui-ci. Le préservatif a été inventé par les anciens Égyptiens et, dans les années 60, la pilule a révolutionné la sexualité. Nous sommes des animaux doués d’une intelligence et d’une conscience qui ont fait de nous des femmes et des hommes capables d’élaborer un discours sur notre propre sexualité : l’érotisme.

 

 

 

 

 

© JeanLouis Tripp - Casterman

 

 

Mais il y a ce contrôle des pouvoirs.

Ce contrôle millénaire qui nous a fait intégrer que les images de l’amour et du sexe seraient choquantes, impudiques, honteuses, sales et dégradantes, ce contrôle qui nous fait pratiquer l’autocensure. On peut montrer des corps mitraillés, éventrés, découpés, massacrés, torturés, suppliciés, hachés menu, mais hors de question de montrer des sexes en action ! Pour cela, il y a la pornographie ne rendant pas compte de la réalité. La pornographie joue avec les interdits dans le but de nous exciter, alors que la suggestion nous est imposée par les diktats de la « morale » politico-religieuse. Lorsque l’on est dans un lit avec une autre personne (et que l’on y est entre adultes désirant ardemment s’abandonner l’un à l’autre, se laisser emporter par les délices que seuls nous permettent l’amour et le sexe), on voit et on fait ces choses qui ne nous sont jamais montrées telles qu’elles sont, telles qu’elles se passent, avec leurs hésitations, leurs élans, leurs moments de grâce ou de doute.

 

 

 

© JeanLouis Tripp - Casterman

 

 

 

 

 

Parler et montrer les choses de la vie et de l’amour, c’est l’option prise par l’auteur.

Il fait une proposition : et si l’on essayait de parler du sexe comme d’une chose naturelle et normale ? Dire que nous avons chacun le droit de choisir ce que nous faisons avec nos corps, car nos corps nous appartiennent à nous et à nous seuls, et que tant que nous somme entre adultes désirants, personne ne devrait avoir à juger de ce qui se passe sous la couette des autres.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour terminer, je voudrais partager avec vous les quelques mots que j’ai envoyé à l’auteur lorsque j’ai terminé la lecture de l’ouvrage : « Terminer les 369 pages des montagnes russes et souhaiter avoir immédiatement accès à la suite du récit ! Aucunes échappatoires, ni de faux- semblant et encore moins de porte de derrière pour cette autobiographie traitant d'un sujet restant encore trop tabou dans notre société livrée à une pornographie totalement en dehors de la réalité des choses. Dans ce second tome, on parle d'amour, de sentiments et d'expériences vécues. Merci JeanLouis Tripp de nous ouvrir les portes de ton jardin secret ! »

 

Haubruge Alain

 

 

Série : Extases

 

Titre : T.2 Les montagnes russes

 

Genre : Autobiographie intimiste

 

Scénario : JeanLouis Tripp

 

Dessins : JeanLouis Tripp

 

Éditeur : Casterman

 

Nombre de pages : 369

 

Prix : 27,95 €

 

ISBN : 9782203162242



Publié le 29/02/2020.


Source : Bd-best


Séance de rattrapage. Schizophrènie d’un héros créateur.  Le roi des bourdons

« - Un essaim de bourdons ?

- Exact.

- J’ai bien entendu ? Vous parlez ?

- Ben oui.

- La parole n’est pas l’exclusivité des chat.

- Chut ! Tais-toi, Jacques.

- Nous venons te témoigner notre gratitude pour avoir sauvé notre frère de la noyade, tout à l’heure.

- Hein ? Ah oui ! Dans le seau ? Bah… Ça n’a pas été bien difficile.

- Peut-être… Mais ce genre de geste est rare chez les gens. Il montre que ton esprit est pur.

- Ha ! Ha ! Vous rigolez ? Ça montre surtout que je suis un benêt.

- Non, non, vraiment. En retour, nous tenons à te faire don d’un pouvoir hors du commun.

- Qu’est-ce que vous faites ?

- Mes frères se collent sur toi pour former une combinaison spéciale qui va te permettre de… voler ! »

 

 

 

 

 

 

 

                Zola Vernor est manutentionnaire chez Chatterbooks, un gros éditeur qui a mangé plein de petits. Il rêve de devenir auteur de bandes dessinées mais ses projets sont refusés les uns après les autres. Un beau jour, innocemment, il sauve un bourdon de la noyade. Pour le remercier, sa communauté forme autour de Zola un costume faisant de lui un super-héros et lui permettant de voler. Zola va devenir un observateur de la ville. Entre Superclébard, alter ego canin, idole des foules, et un magnat de la presse cupide et adipeux au propre comme au figuré, Zola suivra sa quête initiatique afin de peut-être devenir quelqu’un. Mais peut-on devenir quelqu’un quand on est encombré de problèmes existentiels ?

 

 

 

 

© De Thuin - Glénat

 

 

                David De Thuin, auteur aussi discret que talentueux, signe un album profond à l’apparence légère. Réflexion fine sur le métier de dessinateur de petits mickeys, Dethuin utilise le personnage de Zola comme une synthèse de tous ces artistes qui peinent à sortir de l’ombre, entre les affres de la création et un milieu éditorial impitoyable.

 

 

 

 

 

© De Thuin - Glénat

 

 

                De Thuin a une biographie disséminée mais conséquente. Arthur Minus, Zizi la chipie, Zélie et compagnie, Les zorilles, Le bois des mystères, Coup de foudre sont l’essentiel de ses séries jeunesse, avec des collaborateurs exceptionnels : Cauvin, Corbeyran, Corcal,… De Thuin a signé de nombreux mini-récits animaliers dans Spirou, ainsi que des récits courts d’un enfant et de son père qui lui raconte des histoires, hommage à tous les papas pour qui raconter des histoires est aussi important que d’avoir quelqu’un pour les écouter. Il tâte également de l’auto-édition, domaine dans lequel est paru en six épisodes Le roi des bourdons, avant que cette sorte de mise en abîme ne rejoigne la collection 1000 feuilles chez Glénat dans laquelle il avait déjà publié La proie, exercice de style sur 1000 pages et 10000 cases, ainsi que le thriller Le corps à l’ombre. Pour l’occasion, De Thuin a réécrit et redessiné son histoire.

 

 

 

 

© De Thuin - Glénat

 

 

                Avec ce Roi des bourdons, nommé parmi les indispensables de l’année au dernier festival d’Angoulême, De Thuin est enfin mis en lumière. Ses personnages animaliers sont les plus percutants de la BD depuis Macherot. Introspection, récit schizophrénique et passionnant, il élève son auteur au rang d’un Lewis Trondheim sous ses meilleurs jours. Une collaboration entre eux deux serait des plus judicieuses.

 

 

Laurent Lafourcade

 

 

One shot : Le roi des bourdons 

 

Genre : Aventure introspective 

 

Scénario, Dessins & Couleurs : David De Thuin 

 

Éditeur : Glénat

 

Collection : 1001 feuilles

 

Nombre de pages : 120

 

Prix :  19 €

 

ISBN : 9782344028933

 



Publié le 22/02/2020.


Source : Bd-best


Un des mystères les plus énigmatiques de l’histoire moderne ... L’agneau mystique admiré et volé.

 

 

Où se trouve le panneau volé des Juges intègres, qui fait partie de l’Adoration de l’Agneau mystique ? Si cela ne dépendait que de l’évêque de Gand, cette question ferait mieux de rester sans réponse. Les recherches du panneau procurent effectivement un intérêt supplémentaire à la cathédrale de Gand. Entre-temps, beaucoup d’encre a coulé sur le sujet du plus grand vol d’art du XXe siècle. Le vol a été commis en 1934 par un certain Arsène Goedertier, un banquier catholique de Wetteren. “Moi seul sais où se trouve l’Agneau Mystique”, a-t-il confessé dans un dernier soupir sur son lit de mort.

 

 

 

 

 


Nos amis néerlandophones ont fait de 2020 une année dédiée à « Jan van Eyck ». À cette occasion, une exposition (Van Eyck. Une révolution optique) consacrée aux œuvres de ce peintre de la renaissance flamande se tiendra au Musée des Beaux-Arts de Gand (MSK) jusqu’au 30 avril 2020. Les visiteurs de cette manifestation auront la chance de découvrir les volets extérieurs restaurés du retable de « L’adoration de l’Agneau mystique ». Ces joyaux seront mis en valeur avec la présence d’autres œuvres de ses contemporains les plus talentueux, originaires d’Allemagne, de France, d’Italie et d’Espagne.

 

 

 

 

 

 

Cette opportunité est également saisie par les éditions Casterman en partenariat avec les Éditions Ballon pour nous proposer en illustration l’histoire plus que mouvementée du retable de « L’adoration de l’Agneau mystique ». Dans ce livre, structuré en dix chapitres, le lecteur tel Sherlock Holmes part à la découverte des aventures de cette œuvre à travers les siècles.

 

 

 

 

 

 

© Harry de Paepe – Jan Van der Veken – Casterman - Ballon

 

 

L’ensemble des chapitres ont été scénarisés par Harry de Paepe (professeur d’histoire, journaliste, auteurs de livres, spécialiste de la politique anglaise pour le quotidien doorbreak.be) et illustrés par Jan Van der Veken (artiste et illustrateur gantois s’inscrivant dans le courant graphique « futur rétro », il dessine notamment pour The New Yorker et De Morgen). À cela, il faut ajouter une description détaillée de chacun des panneaux composant le retable et une ligne du temps reprenant les divers déboires connus par l’œuvre.

 

 

 

 

 

 

© Harry de Paepe – Jan Van der Veken – Casterman - Ballon

 

 

 

Certains ont découvert l’existence du retable de Gand grâce au film « Monuments men » réalisé en 2014 par George Clooney. C’est l’histoire de ce groupe créé par le président américain Roosevelt chargé de récupérer les œuvres d’art dérobées par les nazis.

 

 

 

 

 

 


Le retable de Gand, composé de 24 panneaux peints par les frères van Eyck, fut achevé en 1432. Depuis sa conception au quinzième siècle, l’œuvre a vécu de nombreuses aventures : elle est considérée comme « l’œuvre d’art la plus fréquemment volée de l’histoire » ayant fait l’objet de treize vols en six siècles. Elle a survécu à un incendie et à des agressions durant la Furie iconoclaste. Le retable a été démonté et scié, dissimulé et retrouvé. Il a été réparé et repeint à plusieurs reprises. La première restauration a eu lieu en 1550. Au cours de cette période, la peinture a également subi une première transformation. La prédelle, ou soubassement, a été irrémédiablement endommagée lors d’un nettoyage.

Lors de la révolution française, le retable a été transporté en charrette jusqu’à Paris, le sauvant de la folie destructrice. À la chute de Napoléon I, il est remis à la ville de Gand par Louis XVIII, qui s’y était réfugié pendant la période des 100 jours. En 1861, la nudité des sujets des deux panneaux Adam et Eve est jugée choquante dans une cathédrale. Ceux-ci sont vendus à l’État belge et déposés aux Musées royaux des beaux-arts à Bruxelles. En 1917, d’autres panneaux sont emportés par les Allemands. À la fin du premier conflit mondial, l’Allemagne est contrainte de restituer les panneaux volés ainsi que ceux achetés en toute légalité par Frédéric Guillaume III (Art. 237 Traité de Versailles dans le cadre des réparations de guerre afin de compenser les actes de destructions commis lors du conflit). En 1934, deux panneaux du retable furent volés par Arsène Goedertier. L’un d’entre eux fut restitué par le voleur qui mourut avant de confesser la cachette du second, « Les Juges intègres ». À ce jour, il n’a jamais été retrouvé, mais est remplacé par une copie réalisée par Jef Vanderveken. Le retable sera dérobé à Pau par les nazis lors de la Seconde Guerre mondiale et récupéré par les Américains « Monuments Men » à Altaussee en 1945.

 

 

 

 

 

 

 

Le retable est composé de douze panneaux.


Ouvert, il présente :


Panneaux supérieurs


• Adam, le premier homme, avec au-dessus de lui une grisaille représentant le sacrifice de Caïn et Abel.
• Les Anges chanteurs.
• Marie, la Reine du Ciel.
• Le Christ en majesté ou Dieu le Père sur le trône.
• Jean-Baptiste.
• Les Anges musiciens.
• Ève, la première femme, avec au-dessus d’elle une grisaille représentant l’assassinat d’Abel par Caïn.
Panneaux inférieurs
• La copie du panneau volé des Juges intègres.
• Les chevaliers du Christ.
• L’adoration de l’Agneau mystique.
• Les ermites.
• Les pèlerins.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fermé, il présente :


• l’annonce de l’ange Gabriel à Marie, mère de Jésus, qu’elle est enceinte.
• Un commanditaire pieux, Judocus “Joos” Vijd.
• Sa femme, Elisabeth Borluut, tout aussi pieuse.
• Jean-Baptiste.
• Jean l’Évangéliste.
• Les prophètes Zacharie et Michée.
• des Sibylles d’Érythrée et de Cumes.

 

 

 

 

 

 

En conclusion, bien au contraire d’un livre qui pourrait être uniquement consacré à l’œuvre et à ses nombreux détails techniques, scénariste et dessinateur ont réussi le pari de nous faire découvrir l’incroyable parcours du retable depuis sa création jusqu’à notre époque actuelle. Un livre familial à placer dans toutes les mains à partir de 10 ans.

 

 

 

 

 

 

 

Alain Haubruge

 

 

One Shot : L’Agneau Mystique

 

Genre : Historique

 

Scénario : Harry de Paepe

 

Dessins & Couleurs : Jan Van der Veken

 

Éditeur : Casterman

 

Nombre de pages : 112

 

Prix : 19,95 €

 

ISBN : 9782203210141 



Publié le 18/02/2020.


Source : Bd-best


La conclusion d’une série que l’on n’oubliera jamais. Irena 5 - La vie, après

« - Irena Sendlerowa ?

- C’est moi.

- Signez-moi cette décharge et je vous laisse les gamins.

- Ils ont mangé ?

- On n’a pas pris le risque de leur donner quoi que ce soit. Trop de déportés sont morts d’indigestion quand on les a nourris. On vous les amène directement d’Auschwitz-Birkenau et on repart.

- Bonjour mes petits chéris. Je m’appelle Irena , et avec mes camarades on va bien s’occuper de vous.

- Madame… Je peux te poser une question ?

- Bien sûr mon grand.

- Pourquoi nous on est vivants alors que tout le monde dans le camp ils sont morts ?

- Parce que tu as eu de la chance. Il ne faut jamais se sentir coupable d’avoir survécu, tu sais. Faites-moi confiance, à partir de maintenant, tout va aller de mieux en mieux. »

 

 

 

 

 

                1983. Après avoir planté un arbre sur la colline de Jérusalem, Irena se rend à Haïfa en voiture. Sur la route, les souvenirs remontent à sa mémoire. Des enfants dont les regards la hantent à la culpabilité de ne pas en avoir fait assez, Irena revient sur des moments de guerre et sur des instants d’après dans une Pologne complexe et dure.

 

 

 

 

© Evrard, Morvan, Tréfouël, Walter - Glénat

 

 

                « La vie, après ». Ce titre, coupé par une virgule comme un caillou sur lequel on trébuche sans pour autant tomber, montre combien il a été difficile de se reconstruire après la Seconde Guerre Mondiale. On apprendra que, pour Irena comme pour tant d’autres, ce ne sont pas des jours roses qui ont succédé aux jours noirs, même si le ciel s’était éclairci.

 

 

 

 

© Evrard, Morvan, Tréfouël, Walter - Glénat

 

 

                On a tout dit dans ces colonnes sur cette série et ses auteurs. Cet ultime épisode réunit toutes les qualités des précédents : aventure, émotion, tragédie et espoir. Avec la scène des enfants qui racontent leurs cicatrices en dessins, les auteurs poussent le concept consistant à raconter une histoire dramatique avec un graphisme enfantin, dans le sens noble du terme, comme une mise en abime. Quand Irena raconte le destin de Janusz Korczak et de sa « République des enfants », personne ne pourra retenir une larme lors de l’envol du train de Treblinka vers cette étoile qui brille et se reflète dans la mer.

 

 

 

 

© Evrard, Morvan, Tréfouël, Walter - Glénat

 

 

                La série se termine sur la rencontre entre Irena et Marek Halter, qui préface ce cinquième volume. Le cinéaste et romancier polonais recueillait des témoignages pour un documentaire de 2h 30 sorti en 1994 intitulé Les Justes.

                En voici la bande-annonce :

 

 

                Nominée pour le prix Nobel de la paix en 2007, Irena ne l’obtient pas, au profit d’Al Gore, alertant sur l’évolution du climat. Elle mourra l’année suivante. Ce prix, elle le mérite tant qu’il n’est même pas concevable qu’on puisse se demander si seulement elle en aurait été légitime. Alors, si le jury du Nobel est passé à côté, le jury des lecteurs de cette extraordinaire série le lui attribue à l’unanimité.

 

 

 

 

© Evrard, Morvan, Tréfouël, Walter - Glénat

 

 

                Parce que c’est une œuvre de mémoire, parce qu’on ne ressort pas indemne de sa lecture, et de par son sujet, son type de narration et son graphisme, Irena, cinq volumes scénarisés par Jean-David Morvan et Séverine Tréfouël, dessinés par David Evrard et colorisés par Walter, est et restera la plus grande série des années 2010-2020.

 

 

 

 

 

Laurent Lafourcade

 

 

Série : Irena

 

Tome : 5 - La vie après

 

Genre : Drame historique 

 

Scénario : Morvan & Tréfouël 

 

Dessins : Evrard 

 

Couleurs : Walter 

 

Éditeur : Glénat

 

Nombre de pages : 72 

 

Prix : 14,95 €

 

ISBN : 9782344033036

 



Publié le 12/02/2020.


Source : Bd-best


Au cœur d’Angoulême 2020.

 

 

 

 

Envoyé spécial pour BD-Best au festival international de la BD, Laurent Lafourcade bulle pour vous.

 

 

 

 

Deux jours dans le chaudron, soit une journée de rencontres et d’expos et une autre de dédicaces, voici un petit résumé non exhaustif de ce qui s’est passé.

 

 

 

Avec une circulation gâchée par la visite du Président de la République, la première journée du festival a été un parcours du combattant pour aller d’un lieu à l’ordre. Les services d’ordre, sur les dents, fouillaient les sacs et passaient chaque personne au détecteur de façon particulièrement poussée ce qui entraînait des attentes anormalement longues et parfois sous la pluie. Au Quartier Jeunesse, aucune file d’attente n’ayant été mise en place, les groupes arrivaient les uns après les autres s’entassant devant les entrées de manière anarchique. Les organisateurs devraient aller faire un petit tour à Disneyland Paris pour savoir comment gérer ce genre de situation. Inadmissible pour un 47ème festival. Bref, une fois à l’intérieur, la qualité des expositions a vite fait oublier ces désagréments. Allons-y !

 

 

 

 

 

 

Catherine Meurisse, chemin de traverse : De ses cahiers d’écolière aux couvertures de Charlie Hebdo, tendre, drôle et émouvante, l’exposition Meurisse retrace sa carrière jusqu’aux grands espaces, que l’on pouvait même intégrer. En place au Musée du Papier, la rétrospective de la carrière de cette future Grand Prix du Festival a quelque chose de magique.

 

 

 

 

 

 

Jean Frisano, de Tarzan à Marvel, l’Amérique fantasmée : Comment un dessinateur destiné à mettre anonymement en valeur des héros et super-héros de comics américains est-il devenu l’icône de plusieurs générations ? Voilà la question à laquelle répond cette exposition. Les super-héros Marvel s’affichent sur les originaux des couvertures de Strange dont Frisano a réalisé la plupart. C’est là qu’on se rend compte à quel point l’auteur fait partie d’un imaginaire collectif. On a tous vu ces dessins, mais peu de gens connaissaient son nom. L’injustice est réparée.

 

 

 

 

 

 

 

Dans la tête de Pierre Christin : La carrière du lauréat du prix Goscinny 2019 est retracée dans cette exposition. De ses premiers travaux avec Bilal à la consécration avec Mézières, de la finesse du trait d’Annie Goetzinger à la grâce cousine de celui de Juillard, l’œuvre d’un scénariste majeur de l’histoire du neuvième art est mise sur un piédestal plus que mérité.

 

 

 

 

 

 

 

 

Calvo, un maître de la fable : Quand on parle de bande dessinée animalière, on pense immédiatement à Macherot et à Hausmann. Mais il ne faut pas oublier qu’avant il y a eu leur maître Calvo. Cette exposition raconte toute la carrière de l’auteur de La bête est morte ! et, notamment, montre de nombreuses planches originales issues d’autres séries de l’auteur comme Patamousse, Moustache et Trottinette, ou encore un abécédaire somptueux.

 

 

 

 

 

 

 

 

Folklorique enfance, fantastique enfance : L’exposition en quatre parties fait honneur à quatre séries jeunesse : Yakari, Petit Vampire, Hilda et Naruto. Dans une esthétique certaine et des reproductions grandeurs natures de scènes et de personnages de ces séries, les enfants côtoient leurs idoles. Outre l’interview vidéo de Sfar, la partie la plus intéressante est celle consacrée à Yakari. C’est la seule qui montre les véritables planches originales de son auteur et non pas des reproductions. On peut y remarquer que les planches de Derib comportent très peu de retouches. Les trois autres séries n’ont pas eu droit à ce traitement de faveur. Et alors ? Ça veut dire que les enfants n’ont pas besoin de voir de vrais originaux ? Un petit faux pas.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voyages en Egypte et en Nubie de Giambattista Belzoni : C’est une véritable immersion dans ces pays à laquelle nous convient Grégory Jarry, Lucie Castel et Nicole Augereau. L’exposition présente des décors de l’album sous forme de dioramas grandeurs nature. Les visiteurs peuvent se faire prendre en photo dans des scènes de l’album, comme s’ils en faisaient partie.

 

 

 

 

 

 

Lewis Trondheim fait des histoires : « C’est l’histoire d’un type qui ne savait pas dessiner… » Quelle phrase choc pour accueillir les visiteurs à l’entrée d’une exposition ! Et pourtant, elle est si vraie et si porteuse d’espoir. C’est en se lançant dans les 500 pages de Lapinot et les carottes de Patagonie que Trondheim a appris son métier sur le tas. On sait où il en est arrivé aujourd’hui. Touche-à-tout de génie, l’auteur s’adresse au visiteur tout au long de ce parcours jubilatoire aux plus de 150 originaux. Un coup de cœur.

 

 

 

 

 

 

 

La maison de Gournah : A l’initiative de l’atelier Marsam, dans le hall du Vaisseau Moëbius, l’exposition nous amène sous le soleil de la Haute-Egypte avec les croquis et bandes dessinées réalisés pendant la résidence chez l'auteur de BD Golo à Gournah, Haute-Egypte, en novembre et décembre 2019, par Golo, Kathrine Avraam, Rojer Féghali, Valentina Principe, Mohamed Salah, Loïc Verdier et Mohamed Wahba, ainsi que les photographies de Didier Cottet. Eclectique et dépaysant.

 

 

 

 

 

 

En extérieur, pour la première fois depuis bien longtemps, pas d’exposition sur le parvis de l’Hôtel de Ville. Dommage.

 

            Kishiro, Kirkman, Claveloux, Tsuge, Wood, … : de nombreuses autres expositions parsèment les différents lieux de la ville. La difficulté quand on vient à Angoulême est de choisir ce que l’on sacrifie. Le choix peut être arbitraire, mais laisser faire le hasard est sûrement le meilleur moyen de ne rien regretter.

 

Conférence Emile Bravo : Dans un amphithéâtre accueillant des écoliers et des collégiens, Emile Bravo raconte la genèse de Spirou, l’espoir malgré tout. Répondant aux questions de l’animatrice, puis des élèves, l’auteur a expliqué s’être approprié les événements qui ont fait ce que deviendra Spirou plus tard. Il a précisé que cette vision lui est propre et qu’il ne s’est pas embarrassé de ce qu’ont fait les auteurs invités dans la série de spin-off, en particulier Le Groom vert-de-gris, qui est la version de Spirou pendant la guerre de Yann et Schwartz. La cohabitation des deux points de vue ne pose aucun problème vu qu’on est dans la série « Le Spirou de… ».

 

 

 

 

 

 

 

            La journée de dédicaces du samedi est menée tambour battant. Une organisation scientifique est nécessaire pour ne pas perdre de temps. Le planning des dédicaces des auteurs, publié par chacun des éditeurs, permet de planifier la journée, mais les changements de programmation et le hasard qui fait souvent bien les choses ont permis de faire des rencontres diverses et variées.

 

            Intarissable. C’est ainsi que l’on peut qualifier le passionnant scénariste de Deux frères à Hollywood. Alex Nikolavitch ne s’arrête plus de raconter les anecdotes qu’il a découvertes en scénarisant son album sur Roy et Walt Disney.

 

 

 

 

 

 

            Improbable. Telle est la trajectoire de Lili L’archi, architecte qui s’est retrouvée dessinatrice de l’album Ma grossesse tout le monde s’en mêle, alors que rien ne la prédestinait à faire de la BD. Son éditrice Marie Moinard est aussi la scénariste du bel album Les découvreuses, chroniqué dans ces colonnes l'été dernier.

 

 

 

 

 

 

            Musicale. Stéphane Tamaillon et Priscilla Horviller signent la biographie BD de ce début d’année qu’il ne faut pas manquer. Du jazz, du swing, du jazz, on en prend autant plein les yeux que plein les oreilles.

 

 

 

 

 

 

            Ibérique. Super-Patate, le héros d’Artur Laperla, est une bouffée d’air frais dans un genre battu et rebattu. Du tout public décalé, intelligent et drôle. A ses côtés, chez ce futur grand éditeur qu’est Bang ediciones, Bazil signe un American Dream à bride abattue.

 

 

 

 

 

 

 

            British. La belge Nina Jacqmin donne toute la délicatesse de son trait à un épisode véridique et mystérieux de la vie d’Agathe Christie dont on vous parlera très prochainement dans ces colonnes.

 

 

 

 

 

 

Historique : Alors que Les enfants de la résistance trustent les articles concernant la résistance en général et les enfants y participant en particulier, il ne faut pas oublier qu’il y a aussi Le réseau papillon.

 

 

 

 

 

            Préhistorique. Frnck est maintenant une valeur sûre et un pilier du catalogue Dupuis. Cossu et Bocquet en ont encore sous le capot et nous promettent encore quelques albums pour poursuivre la saga inter-siècles.

 

 

 

 

 

 

            Moyenâgeuse. La série Le Royaume de Feroumont est aussi un must. Chaînon manquant entre l’âge d’or et l’époque contemporaine, c’est un indispensable pour tous ceux qui aiment les classiques franco-belges.

 

 

 

 

 

 

            Lumineuse. La boîte à musique de Gijé est aussi bien dessinée que racontée, sous la plume de Carbone. Un rêve éveillé pour les enfants et leurs parents. Quand c’est bien et que c’est beau, que demander de plus ?

 

 

 

 

 

 

            Poignante. Evrard, avec ses complices Morvan et Tréfouël, signe le cinquième et dernier tome d’Irena. La vie de cette femme ayant sauvé plus de 2500 enfants juifs du ghetto de Varsovie est un indispensable à mettre dans toutes les bibliothèques, à côté de Maus, et à diffuser dans les CDI de tous les collèges et lycées de France, de Belgique et d’ailleurs. Tu m’entends, Education Nationale ?

 

 

 

 

 

 

            Sauvage. Gloris et Lamontagne se retrouvent pour un western cruel et réel. La mise en couleur du dessinateur est époustouflante tant dans les tons que dans les éclairages.

 

 

 

 

 

 

            Entraînant. Efa et Rubio nous entraînent dans l’enfance de Django Reinhardt. Les cordes de son banjo résonnent tout au long de cet album à lire en écoutant un disque du musicien.

 

 

 

 

 

 

            Délicieux. David Dethuin est extrêmement rare en dédicaces. Venu à Angoulême à l’occasion de la nomination de son roi des Bourdons, il ne fallait pas manquer l’occasion de profiter de ses dessins animaliers fins, tendres et innocents.

 

 

 

 

 

Victorieux. Le fils de l’Ursari faisait parti des coups de cœur de BD-Best l’année dernière, mais aussi du festival d’Angoulême cette année. On nous copie ? Non, en adaptant ce roman, Cyrille Pomès a signé un cheg-d’œuvre.

 

 

 

 

 

Bref, cette journée a permis de récolter de beaux albums qui feront de beaux articles sur votre site préféré.

 

Elle s’est clôturée pour moi par un verre de l’amitié avec Moïse Kissous, président du syndicat national de l’édition, à l’occasion du succès de l’ouvrage pédagogique La BD en classe, faites entrer les monstres !, auquel votre serviteur a participé. N’étant jamais aussi bien servi que par soi-même, je vous en reparlerai un de ces jours.

 

 

 

 

 

 

Juste un mot sur le palmarès qui, comme traditionnellement, fait preuve de snobisme et dénigre les grandes productions qui permettent de publier les petites. Le détail est sur : http://www.bdangouleme.com/prix-palmares/competition-officielle/palmares-officiel. Sans remettre en cause la qualité des ouvrages primés, ils sont objectivement dans un circuit parallèle. Le Grand Prix de l’excellent Emmanuel Guibert sauve la mise.

 

            Angoulême, on t’aime quand même. A l’année prochaine !

 

 

 

 

 

 

Laurent Lafourcade

 

Toutes les photos sont   © Laurent Lafourcade

 



Publié le 04/02/2020.


Source : Bd-best


La première claque de 2020.  Aldobrando

« - Comment m’as-tu appelé ?

- Messire, Messire.

- Messire. Peut-être es-tu plus dégourdi qu’il n’y paraît. Tu me paieras ton affront en me servant. Je serai ton seigneur et toi mon écuyer et fidèle serviteur. Mon nom, écuyer, est Sire Gennaro Montecapoleone des deux fontaines. Et toi, manant, tu as un nom ou dois-je en forger un pour toi ?

- Aldobrando, Messire.

- Alors dorénavant tu seras Aldobrando des trous d’autrui. Qu’en penses-tu ?

- Aldobrando me suffisait.

- Malheur à qui se contente de ce qu’il a ! Allons-y ! Voici l’aube. Une longue route nous attend. Une route semée d’embûches. »

 

 

 

 

 

 

Une route semée d’embûches, tel est le concept de la geste d’Aldobrando.

 

 

 

 

© Critone, Gipi, Daniele, Palescandolo - Casterman

 

 

Un enfant est confié à un vieux sorcier. Son père le lui abandonne et file vers son destin pour la mort. Le précepteur l’éduque et on le retrouve jeune homme, disciple de son maître. Un jour, à la suite d’une préparation de potion tournant mal, le maître est blessé à l’œil. Pour le guérir, Aldobrando doit lui rapporter de l’herbe du loup. Traversant les forêts, le jeune novice arrivera en ville où un drame vient de se jouer. Le valet du roi a grièvement blessé le fils du roi avant de prendre la fuite, laissant pour mort le petit prince. A la suite d’un quiproquo, Aldobrando est accusé d’avoir pris part au méfait. Mis aux fers, il y rencontre un géant assassin qui va l’entraîner dans son évasion. Aldobrando réussira-t-il à prouver son innocence et à rapporter à son maître cette mystérieuse herbe du loup ?

 

 

 

 

© Critone, Gipi, Daniele, Palescandolo - Casterman

 

 

On n’attendait pas Gipi dans une aventure romanesque. L’auteur de Notes pour une histoire de guerre et de La terre des fils signe une œuvre magistrale, formidablement bien construite, une histoire d’amour à grand spectacle où les mots donnent plus de force que les actes. Les personnages sont bien campés, avec une personnalité qui leur est propre : un adolescent sur le chemin de la vie, un monstre qui cache un cœur gros comme ça, une amoureuse improbable prête à braver tous les dangers, un soi-disant seigneur, Messire de pacotille qui se ridiculise pour un monde qui ne veut pas de lui, un roi adipeux et sot qui n’est qu’un porc à balancer, un Sire conspirateur qui ne se doute pas qu’il pourrait tomber dans son propre piège, un vieux sorcier qui, victime avérée, est en fait un philosophe et un père adoptif montrant tout simplement à son « fils » la voie à suivre,…

Le scénariste alterne les scènes sans aucun temps mort. De l’action, des dialogues choisis, le lecteur assiste à un drame théâtral à ciel ouvert dans de multiples décors.

 

 

 

 

© Critone, Gipi, Daniele, Palescandolo - Casterman

 

 

Dans un style à la Griffo, Luigi Critone entraîne le lecteur des chemins enneigés à la chambre sobre d’une princesse triste, des geôles humides dans des bas-fonds miteux jusqu’à une clairière idyllique, pour finir dans une arène, fosse dans laquelle le destin de chacun va se jouer.

 

En parallèle à la version classique, les éditions Casterman publient une luxueuse version en tons de gris. Mais il serait regrettable de se priver des couleurs exceptionnelles de Francesco Daniele et Claudia Palescandolo qui sont tout simplement magnifiques. Elles illuminent de manière aquarellée cette histoire flamboyante, démontrant que les coloristes sont bien des auteurs à part entière prenant part intégrante aux œuvres auxquelles ils participent.

 

 

 

 

© Critone, Gipi - Casterman

 

 

Une route semée d’embûches, tel est le concept de la geste d’Aldobrando. Un album indispensable, telle est la définition d’Aldobrando.

 

 

Laurent Lafourcade

 

 

One shot : Aldobrando 

 

Genre : Conte moyenâgeux. 

 

Dessins : Luigi Critone 

 

Scénario : Gipi 

 

Couleurs : Francesco Daniele & Claudia Palescandolo

 

Traduction de l’italien : Hélène Dauniol-Remaud 

 

Éditeur : Casterman

 

Nombre de pages : 204 

 

Prix : 23 €

 

ISBN : 9782203166677

 



Publié le 16/01/2020.


Source : Bd-best


Derrière les masques, la magie d’une ville et celle de la musique.  Mausart 2 - Mausart à Venise

« - Venise, m’sieurs dames, tout le monde descend ! Et on n’oublie rien à l’intérieur, surtout pas ses déchets qu’on jettera aux endroits prévus à cet effet !

- Monsieur Mausart ? Monsieur Mausart, enfin ! Quel honneur de vous accueillir et de vous rencontrer. Je me présente : Lopar, pour vous servir. Mon cousin Ligo m’a dit la plus grand bien de votre personne et m’a promis les foudres de l’enfer si je ne prenais pas soin de vous comme de la prunelle de mes yeux de chat.

- Bonjour, Monsieur Lopar. Ce que j’ai vu des portes de la ville m’éblouit et me fait frétiller les moustaches. Je suis déjà conquis ! Et puis… Je vais découvrir ce que c’est que d’être choyé « aux petits oignons » !

- Vous n’avez pas idée, Monsieur. Permettez que je prenne votre bagage... »

 

 

 

 

 

            En concert en Italie, Mausart, souriceau de son état, fait escale à Venise. La Sérenissime est prête à l’accueillir à bras ouverts, mais d’autres s’apprêtent à lui ouvrir leurs crocs. En plein carnaval, le musicien va jouer les dernières notes de sa tournée. Seront-ce les dernières de sa vie ? Chat reste à voir !

 

 

 

 

© Smujda, Joor - Delcourt

 

 

En prenant Venise pour décor, Thierry Joor permet à son dessinateur de se transcender. La place Saint-Marc et le pont des soupirs, entre autres, éclatent de beauté sous les pinceaux de Gradimir Smujda.

 

 

 

 

© Smujda, Joor - Delcourt

 

 

Avec grâce, les auteurs multiplient les scènes magiques. Dans un dessin pleine page, une foule dense de carnavaliers défie le lecteur à la manière d’un « où est Charlie ? ». Sous les gondoles, le spectacle continue. Poissons et crustacés emmènent l’orchestre dans une Venise sous-marine. Les frontières entre la réalité et la fiction se floutent dans une rencontre avec Stradivarius le plus grand luthier du monde, pendant qu’une souris gitane danse sous un arbre qui joue du violon. Même en cuisine, c’est un art, culinaire celui-là, qui est mis en avant, mais Ratatouille n’est pas là pour sauver les souris qui en auraient besoin. Il va falloir se débrouiller autrement.

 

 

 

 

© Smujda, Joor - Delcourt

 

 

On dit toujours qu’on ouvre une bande dessinée pour son dessin et qu’on en poursuit la lecture pour son scénario. Si le récit ne suit pas, on arrêtera en route. Ce Mausart à Venise ne rentre pas dans cette catégorie. L’album est somptueux et il y a une réelle histoire. Magnifique.

 

 

 

 

© Smujda, Joor - Delcourt

 

 

            Si certains se demandent encore si la BD est un art, c’est qu’ils n’ont jamais lu d’albums de Gradimir Smujda.

 

 

Laurent Lafourcade

 

Série : Mausart

 

Tome : 2 - Mausart à Venise

 

Genre : Tranche animalière d’une vie d’artiste 

 

Scénario : Thierry Joor 

 

Dessins & Couleurs : Gradimir Smudja 

 

Éditeur : Delcourt

 

Nombre de pages : 38

 

Prix : 14,50 €

 

ISBN : 9782413016915

 



Publié le 18/12/2019.


Source : Bd-best


2019 au pied du sapin. La sélection de l’année par BD-Best.

 

 

            Comment choisir 10 albums sur une année de lecture de plus de 300 titres ? Forcément, le résultat est subjectif, mais il est là. Choisir, c’est renoncer. Voici donc, sans classement, la sélection des dix albums retenus pour vous et qu’il est encore temps de déposer au pied du sapin.

 

 

 

 

 

 

 

 


Comment une jeune fille de 15 ans a modifié l’Histoire de l’Amérique.

Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin

 

            Claudette Colvin a 15 ans. Comme tous les jours, elle a pris le bus pour rentrer chez elle. Il s’est rapidement rempli. Une femme blanche lui a demandé de lui céder son siège. Claudette a refusé. Le chauffeur est alors descendu pour interpeller deux policiers. Ils ont frappé l’adolescente et l’ont évacuée du bus. C’est comme cela que Claudette Colvin s’est retrouvée quelques jours plus tard devant une cour de justice de l’Alabama. Elle plaide non coupable et entame ainsi un combat national aux côtés de Rosa Parks, Jo Ann Gibson Robinson et Martin Luther King.

De sa naissance à l’abolition de la ségrégation, on suivra les pas de Claudette Colvin, encore vivante aujourd’hui, et l’on apprendra pourquoi son nom a quasiment disparu des tablettes.

            Alors que tout le monde connaît l’histoire de Rosa Parks, celle de Claudette Colvin est beaucoup plus méconnue. Cette biographie dessinée les fait se croiser et démontre le rôle primordial de la seconde dans l’évolution du changement des mentalités dans une Amérique raciste.

            A l’heure où les montées de partis politiques extrémistes progressent comme des armées de démons, la vie de Claudette Colvin donne un coup de pied dans la fourmilière. Ce livre témoignage montre d’où l’on est parti, du gouffre qu’on dû franchir les comportements pour devenir tout simplement « civilisés ». Il invite à ne pas revenir en arrière, avec quelque communauté que ce soit.

            Le graphisme d’Emilie Plateau est fin, délicat, minutieux, sensible. Son album n’est pas une bande dessinée classique. Il n’y a justement pas de bandes. Il n’y a pas de cases. Il y a, certes, plusieurs dessins par page. Ils sont effectués dans un minimalisme efficace. Sur fond blanc, une fois le lieu installé, les personnages réagissent dans des situations dépouillées de tout le superflu. Quelques scènes sur fond noir rappellent le désarroi de Claudette dans un monde xénophobe où l’on veut la faire passer du rôle de victime à celui de coupable.

            Le trait d’Emilie Plateau, c’est quelques lignes de finesse dans un monde de brutes. L’autrice est admirative du travail de Claire Brétécher. On y retrouve le désir d’aller directement et uniquement à l’essentiel. Pour synthétiser, si on effectue un grand écart, le style graphique de Noire, c’est un peu Agrippine à Persépolis.

            Noire est l’adaptation du roman éponyme de Tania de Montaigne. Emilie Plateau se l’approprie pour le transformer en biographie dessinée dans un style inédit, efficace et percutant. Indispensable.

 

 

One shot : Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin 

Genre : Biographie

Scénario, Dessins & Couleurs : Emilie Plateau

Éditeur : Dargaud

Nombre de pages : 136

Prix : 18 €

ISBN : 9782205079258

 

 

 

 

 

Une série qui redéfinit la notion de super-héros. 

Irena 4 - Je suis fier de toi

 

            Varsovie, février 1944. Après son évasion, Irena a trouvé refuge chez sa mère. Aujourd’hui, après trois mois d’enfermement, la résistante a hâte de reprendre les affaires. Mais dans la clandestinité, ça va être encore plus compliqué. Le fidèle Antoni est toujours là pour lui donner un coup de main. Ensemble, ils ravitaillent les juifs cachés dans les endroits les plus improbables comme le zoo de Varsovie ou les sous-sols des bars. Irena croisera d’autres héros comme le jeune Martin, qu’elle soigne dans un hôpital de fortune, et qui a bravé tous les dangers, pris tous les risques pour vivre et survivre en se lançant dans un trafic de marché noir pour faire rentrer de la nourriture dans le ghetto.

            Parallèlement, en 1983, Irena raconte sa vie au mémorial de la Shoah à Yad Vashem à Jérusalem, dans l’allée des Justes.

 David Evrad varie les découpages comme jamais. On y trouve un dessin de Varsovie bombardée sur une double page, incrusté de plans rapprochés. Il y a deux planches se faisant face dont l’une est composée uniquement de cases horizontales et l’autre de cases verticales. Leur écho est puissant. On profite même d’images pleines pages. Le tout est mis en scène dans le graphisme rond et enfantin de David Evrard qui, contre toute attente depuis le début de l’aventure, a décuplé l’impact émotionnel d’un scénario comme celui-ci.

 Jean-David Morvan et Séverine Tréfouël nous immergent dans la Pologne de 1944, au plus près d’Irena, de son courage, de ses craintes, de ses peurs, de ses doutes. Irena est altruiste et philanthrope. Dans cet épisode, les scénaristes creusent un peu plus ses sentiments. Irena y parle pour la première fois de la dépression, de la culpabilité de survivre jusqu’à l’acceptation d’avoir survécu.

 La série redéfinit la notion de super-héros. Ce n’est pas avec des super-pouvoirs que l’on sauve le monde, mais avec une âme.

 « Je suis fier de toi. » murmure le fantôme du père à sa fille Irena. « Nous sommes fiers de vous. » pouvons nous murmurer aux auteurs de cette indispensable biographie dessinée à ranger à côté du Maus d’Art Spiegelman.

 

Série : Irena

Tome : 4 - Je suis fier de toi

Genre : Drame historique 

Scénario : Morvan & Tréfouël 

Dessins : Evrard 

Couleurs : Walter 

Éditeur : Glénat

Nombre de pages : 72 

Prix : 14,95 €

ISBN : 9782344031117

 

 

 

 

 

 

Le dernier western. 

Hollywood Menteur

 

            Mapes Hotel, juillet 1960. Arthur Miller et Marylin Monroe viennent d’arriver à Reno. Le tournage des Misfits, les « paumés », traduit en France par Les désaxés, va débuter. Miller en a signé le scénario, Marilyn en est la star. Ils ne se doutent pas encore que le projet va se transformer en chant du cygne d’un âge d’or. Avec des acteurs encore plus torturés que les personnages qu’ils jouent, la réalisation du film va s’avérer complexe. Le metteur en scène John Huston devra jongler avec les états d’âme de chacun. Il apprendra que les chevaux s’apprivoisent plus facilement que les acteurs. Entre une Marilyn Monroe dépressive, un Clark Gable alcoolique et un Montgomery Clift ayant dû mal à faire accepter son homosexualité, The Misfits rentrera à peine dans ses frais et mettra des années à devenir le film culte qu’il est aujourd’hui.

            Clark Gable mourra quelques jours après la fin du tournage. Marilyn Monroe n’achèvera pas son film suivant. Montgomery Clift quittera quelques années plus tard Hollywood pour New-York à cause du regard de l’industrie cinématographique sur ses penchants. Seul Eli Wallach tirera son épingle du jeu, avec à la clef une belle carrière couronnée par un Oscar d’honneur en 2011 et par son rôle du truand dans Le bon, la brute et le truand.

            Luz semble enfin sorti du drame Charlie Hebdo pour retrouver son statut d’auteur « libre », si tant est que cela soit possible. Toujours est-il qu’on le sent immergé dans cette histoire de l’histoire d’un film. Projet à la base prépublié dans Les Cahiers du Cinéma, Luz a lié les séquences pour en faire un récit fluide.

            Hollywood Menteur fait figure de tragédie antique. Il y a du Racine dans ce drame. Mais Luz n’oublie pas qu’il est humoriste. Paula Strasberg, la dame de compagnie et coach de Marilyn, est finalement la meilleure actrice parmi les stars de l’époque. Elle apporte un comique réaliste et crédible, assénant des vérités et des sentences aussi courtes que transparentes. Elle est finalement la seule à dire la vérité, à être la vérité.

            Luz fait des yeux de Marilyn le miroir intime d’une femme perdue, comme si elle était déjà morte. Sa pupille et son iris se transforment en disque microsillon sur lequel se jouent les dialogues du film qu’elle regarde se tourner de l’intérieur comme si quelqu’un d’autre agissait à sa place.

            La post-face de Virginie Despentes apporte un éclairage et une justification au récit. Intitulée Sainte Marilyn, vierge des désirs défoncés…, elle montre comment Luz a ouvert le capot de l’usine à rêves. On y assiste à la crucifixion des mythes, à la chute des anges et à l’auto-destruction d’un monde en carton-pâte.  Despentes, avec tout son talent littéraire, compare Marilyn à une adolescente d’aujourd’hui, encore plus photographiée qu’une instagrammeuse addict.

            En ajoutant Hollywood menteur à sa bibliographie, Luz s’installe définitivement comme un futur grand prix potentiel du festival international de la BD d’Angoulême.

            « Rouler en décapotable avec la clim à fond, ça, c’est le rêve américain. » Mais de l’autre côté du rêve, la face cachée recèle les tourments.

 

One shot : Hollywood Menteur

Genre : Drame 

Scénario & Dessins : Luz 

Éditeur : Futuropolis

Nombre de pages : 112

Prix : 19 €

ISBN : 9782754824224

 

 

 

 

 

Le jeu d’une vie qui n’en est pas un.                                  

Le fils de l’Ursari

 

            En combattant contre un ours sur les places des villages, Lazar Zidar pensait affronter le plus grand danger qu’il pouvait rencontrer. Il ne se douter pas que lui et sa famille allaient devoir faire face à des individus beaucoup plus sauvages. Les Roms sont considérés comme des voleurs de poules dans ces pays de l’Est qui tentent de se racheter une conduite. La famille est exfiltrée vers la France. Ciprian, sa grande sœur et son grand-frère, sa mère et son père, vont se retrouver dans un camp de migrants, un bidonville en banlieue parisienne. Forcés à payer des sommes astronomiques à des malfrats profitant de leur situation, ils vont devoir vivre de ferraille, de mendicité et de rapines. C’est en jouant les pickpockets au jardin du Luxembourg que Ciprian va se mettre à observer deux personnes se retrouvant pour des parties d’échecs et se prendra de passion pour ce jeu. Cip, le fils de l’Ursari, l’enfant du montreur d’ours, ne sera plus le même.

            Du camp de réfugiés au jardin du Lusquembourg, comme dit Ciprian, le petit Rom navigue de l’enfer au paradis. Du racket des monstres des bas-fonds aux parties de « Lézéchek », l’enfant devra devenir adulte plus vite que prévu. Réussira-t-il à garder son innocence tout en réalisant un « Tchéquématte » ?

            En adaptant le roman de Xavier-Laurent Petit, Cyrille Pomès signe l’un des plus beaux albums de l’année. L’histoire est émouvante et passionnante. Les personnages sont redoutables ou attachants. Ça, c’est grâce à Xavier-Laurent Petit. Le découpage est ultra efficace. Les planches sont dynamiques. Le graphisme est original. Ça, c’est grâce à Cyrille Pomès. Les couleurs sont tantôt inquiétantes et angoissantes, tantôt apportent la lumière et l’espoir. Ça, c’est grâce à Isabelle Merlet. On dit souvent que 3 est le chiffre parfait. L’association de ces trois auteurs fait un strike inattendu. Et quand des albums qu’on ouvre parce qu’ils nous tombent sous la main et qu’on ne les avait pas vraiment vu venir procurent cet effet là, on atteint une extase de lecture.

            Pomès a un style de dessin qui n’appartient qu’à lui. Il déforme les membres de ses personnages pour mieux accompagner la lecture de chaque action. Leurs grands yeux vecteurs d’émotions nous immergent au cœur de leurs âmes. Entre les planches dites « classiques », le dessinateur propose des compositions jamais vues comme ce dessin où le corps de Ciprian traverse l’image en renversant les pions d’un échiquier à l’effigie de sa famille et de ses ennemis. Une tour Eiffel en toile de fond surplombe la scène soutenue par un ours chapeauté ouvrant les bras. Ma-gni-fique.

            L’histoire a également le mérite de mettre sur le devant de la scène les héros du quotidien qui aident les immigrés à s’intégrer dans un monde étranger et hostile. Ainsi, Louise, l’institutrice qui apprend à lire aux enfants, symbolise leur espoir.

            Par certains côtés, « Le fils de l’Ursari » adopte la méthode « Irena » en dépeignant des événements dramatiques dans un graphisme plus enfantin que l’ambiance sombre de l’histoire racontée. D’autre part, l’ours emprunte son allure aux superbes représentations animales de René Hausman.

            Avec cet album, Cyrille Pomès change inéluctablement de catégorie d’auteurs pour entrer dans celle des grands créateurs de bandes dessinées.

 

One shot : Le fils de l’Ursari

Genre : Aventure

Scénario : Petit

Dessins : Pomès

Couleurs : Merlet

Éditeur : Rue de Sèvres

Nombre de pages : 130 

Prix : 16 €

ISBN : 9782369817802 

 

 

 

 

 

Hollywood a trouvé sa vedette. 

El Chipo

 

            El Chipo est comédien. M. Gottferdom le reçoit en entretien d’embauche. En effet, c’est la panique dans les bureaux californiens de la Subway Indian Meyer TM. L’acteur principal de la nouvelle superproduction en tournage est en garde à vue pour détention, usage et promotion de stupéfiants. Le réalisateur, quant à lui, vient d’être arrêté pour attentat à la pudeur. Et pour le reste de l’équipe de production, ce n’est pas la panacée non plus. Toujours est-il que pour l’instant, il est urgent de trouver l’acteur qui pourra remplacer la vedette. Et pour cela, qui mieux que El Chipo pourrait faire l’affaire ? El Chipo, est une saucisse, c’est une doublure confirmé. A son tour à présent d’être dans la lumière.

            Il y a des OVNI qui tournent dans le ciel et il y a les OVNI qui se lisent. El Chipo est de ceux là. Voici un album qui ne ressemble à aucun autre, à rien de ce qu’on avait pu lire jusqu’ici. Voilà une histoire avec un héros formidable, épatant, exceptionnel : une saucisse, autrement dit une chipolata, mais tout le monde l’appelle El Chipo.

            Witko signe un album jouissif, l’un des plus drôles de ces dernières années. L’auteur promène sa saucisse tout au long de son aventure. C’est si bien fait qu’on en oublie sa condition… jusqu’au moment où, par un émouvant flash-back, l’auteur raconte comment son héros en est arrivé là. Et l’on y croit ! On le prendrait même au sérieux, le bougre.

            Les gags en quatre cases forment un récit qui se déroule et met en boîte non seulement l’industrie cinématographique, mais aussi l’Amérique des soixante dernières années, de la guerre du Vietnam à la moumoute de Donald Trump.

            Des tableaux parodiques mettent en scène El Chipo sur des couvertures d’albums ou des affiches de cinéma. L’indien des Village People, c’était lui. Sur le célèbre tableau Nighthawks d’Edward Hopper, c’était aussi lui. Sur le lit de Pulp Fiction et sur le banc de Forrest Gump, encore lui. Et les affiches publicitaires de Monsieur Propre ou de Banania? Toujours lui.

            Avec El Chipo, la collection Pataquès des éditions Delcourt propose un barbecue de franche rigolade. Attention à ne pas faire tomber la saucisse entre les grilles.

 

One shot : El chipo

Genre : Humour déjanté

Scénario, dessins & couleurs : Witko

Éditeur : Delcourt

Collection : Pataquès

Nombre de pages : 104

Prix : 9,95 €

ISBN : 978243012429

 

 

 


 

 

Le fils de Captain Biceps et de Shrek. 

Raowl 1 - La belle et l’affreux

 

La petite princesse enfermée dans le donjon ne va pas faire la difficile bien longtemps. Pour la sauver de l’invasion des trolls et des barbares qui assiègent le château, elle n’a pas d’autre choix que de se laisser embarquer par Raowl.

 Une fois libérée, le sauveur va la ramener chez son père. Mais la belle est exigeante. La « jeune et belle » veut de la passion et du merveilleux. Elle ordonne à Raowl de lui trouver un prince charmant. Mais des fois on va chercher à des lieux des choses que l’on a sous les yeux.

Raowl n’en restera pas là. Il trouve une deuxième belle princesse sur son chemin et ne compte pas la laisser prisonnière au milieu d’un château en plein océan.

Shrek peut aller se rhabiller. Le nouveau héros des contes de fées détournés moyenâgeux, c’est une sorte de gros matou barbare : Raowl. Prêt à tout pour défendre les princesses esseulées, il ne faut surtout pas l’énerver. Ah, non, surtout pas ! Et quand il éternue, c’est la « métamorphose ».

Le papa de ce matou tout punch, c’est l’homme qui faisait caca dans les cases de l’atelier Mastodonte : le grand, le seul, l’unique, le formidable Tebo.

Tebo apporte un vent de fraîcheur dans la BD moyenâgeuse tout public. Quand Captain Biceps va faire un tour chez Johan et Pirlouit, ça donne quelque chose comme Raowl. Les personnages disproportionnés de Tebo (grosses têtes petit corps) sont les acteurs d’une comédie hilarante dans laquelle l’auteur fait la part belle au dessin. Tebo soigne les décors et s’étale dans de grandes cases, allant jusqu’à des doubles pages comme celle où le héros pourfend un dragon ou un combat contre un monstre marin.

Au niveau du scenario, Tebo aborde des thèmes contemporains. Il a lu Lisa Mandel et présente une nouvelle approche de thèmes chers à l’autrice. N’est pas prince charmant de qualité supérieure qui veut.

Raowl n’est pas un simple butor. Il est aussi fleur bleue. Il possède un bucolique jardin enchanté et rêve de bisous, fatalement baveux, pour réveiller des princesses.

Avec Raowl, les coups déboulent et l’amour se déroule...

 

Série : Raowl

Tome : 1– La belle et l’affreux

Genre : Aventures humoristiques moyenâgeuses

Scénario, Dessins & Couleurs : Tebo

Éditeur : Dupuis

Nombre de pages : 72 

Prix : 12,50 €

ISBN : 9791034730384

 

 

 

 

 

 

Sensible et émouvant, un album touché par la grâce. 

Les fleurs de grand frère

 

            Une famille unie, un père, une mère, deux frères. Un jour, des fleurs ont poussé sur la tête de grand frère. Après avoir voulu les couper, il décide de les appréhender, les toucher, les sentir. Il s’en inquiète, mais comme tout le monde dans sa famille les trouve belles, il s’en accommode. Parfois même, elles lui parlent. Mais il va y avoir une épreuve à passer : celle de la rentrée et du regard des autres.

            Gaëlle Geniller livre un récit tout en sensibilité, en délicatesse et en émotion, une belle histoire d’amour comme on n’en avait pas lue depuis longtemps, et surtout d’un genre qu’on n’avait tout simplement jamais lu. Fable sur le passage de l’enfance à l’adolescence, c’est aussi une histoire de deuil, celui du garçon qui doit dire au revoir au petit enfant qu’il était. L’autrice emploie tout son talent à dédramatiser la situation, à mettre en évidence la tolérance, non seulement des autres, mais aussi de soi pour soi.

            Aucun personnage n’a une once de méchanceté. Le monde est uni pour aider grand frère à affronter ses fleurs et en filigrane sa puberté, et avec elle les tourments associés. Gaëlle Geniller montre que chacun a les cartes en main pour décider de son destin et qu’il ne faut pas avoir peur ni de ses choix, ni du regard des autres.

            Dans un graphisme en couleurs directes, le dessin est aussi émouvant que l’histoire. Quand grand frère cauchemarde, voulant arracher les fleurs qui l’envahissent, on ressent une angoisse oppressante. Quand maman serre grand frère dans ses bras, il y a tellement d’amour qui transparaît du trait que ça fait quelque chose aussi dans le cœur du lecteur.

            Signer un tel premier album à 23 ans à peine propulse Gaëlle Geniller au rang de meilleur espoir de l’année pour la bande dessinée.

 

One shot : Les fleurs de grand frère

Genre : Chronique familiale 

Scénario, Dessins & Couleurs : Geniller 

Éditeur : Delcourt

Nombre de pages : 64

Prix : 14,95 €

ISBN : 9782413012436 

 

 

 

 

 

« Les obscurantismes recèlent en eux-mêmes les mécanismes qui les mènent à leur perte. » 

La fin du monde en trinquant

 

            1774, à Saint-Petersbourg, l’astronome Nikita Pétrovitch vient de découvrir qu’une météorite va s’écraser sur le territoire soviétique faisant des milliers de morts. À la chancellerie de l’académie et de l’université des sciences, le chancelier Nikolaï Troubeskoy n’a pas l’air de se sentir concerné par la catastrophe annoncé. Pétrovitch a sous son aile, comme assistant, Ivan, le fils de la maîtresse de Troubeskoy. Le jeune chien fou a pour ambition d’embrasser une carrière scientifique, mais en a-t-il seulement les capacités ? Toujours est-il que l’apprenti et son maître vont traverser le territoire de l'impératrice Catherine II de Russie jusqu’aux alentours de Vanavara pour alerter la population locale de la chute de la météorite sur leur tête. Mais tout ne va se passer comme prévu et les deux compères vont être kidnappés et retenus prisonniers dans un village d’autochtones peu civilisés.

            Krassinsky a obtenu ses lettres de noblesse dans la bande dessinée avec Les cœurs boudinés, paru en 2005 chez Dargaud. Il est également connu pour sa participation à Fluide Glacial, mais aussi à Spirou avec la série trop vite arrêtée Sale bête.

            Dans un graphisme enlevé et en couleurs directes, Krassinsky signe un one shot animalier décapant. Les personnages sont tout sauf politiquement corrects. Les grandes affaires se règlent au lit et chacun avance pour sa pomme. Tous pourris. On se croirait presque dans un épisode de Canardo au siècle des Lumières. Le dessinateur, comme dans une pièce de théâtre, insiste sur les personnages et se soucie peu des décors, souvent esquissés, en jouant sur les tons.

            Macherot, chantre du récit animalier en bande dessinée, aurait certainement adoré cette version de la fin du monde dans laquelle il est montré que c’est en humanisant les animaux qu’on les rend plus cruels qu’ils ne le sont. À méditer.

One shot : La fin du monde en trinquant 

Genre : Tragédie animalière 

Scénario, Dessins & Couleurs : Krassinsky 

Éditeur : Casterman

Nombre de pages : 232 

Prix : 25 €

ISBN : 9782203161610

 

 

 

 

 

Comme si Basil Rathbone était de retour. 

Dans la tête de Sherlock Holmes 1– L’affaire du ticket scandaleux

 

            Un bobby londonien amène chez Holmes et Watson un quidam qui errait dans la rue. Celui-ci prétend connaître Watson. Le docteur approuve, il s’agit bien d’un confrère à lui. Victime d’une amnésie de quelques heures, il ne sait pas ce qui lui est arrivé. Analysant indice sur indice avec une précision scientifique, Sherlock Holmes remonte le trajet de l’individu. Le ticket de spectacle d’un « Amazing Magician » un certain Wu-Jing, va les entraîner dans une enquête complexe que le fin limier va tenter de démêler avec tout son savoir-faire.

            Cyril Liéron signe un scénario méthodique que n’aurait certainement pas renié Sir Arthur Conan Doyle. Loin d’une enquête conventionnelle, les différents rebonds font du mystère une impressionnante toile dont le scénariste se tire avec rigueur. L’ambiance londonienne, brouillard du soir et lune éblouissante, immerge le lecteur dans ce polar fin XIXème. Holmes y est dépeint sans concession, avec les failles qu’on lui connaît concernant la consommation de stupéfiants. Watson, la tête sur les épaules, suit son modèle qu’il idolâtre.

            Le graphisme anguleux de Benoît Dahan rappelle l’époque cinématographique dans laquelle le personnage était incarné par le grand Basil Rathbone. L’homme qui endossa onze fois le trench coat du détective, plus une douzième avec la voix de Basil détective privé dans le dessin animé des studios Disney, restera à jamais le meilleur interprète du résident de Baker Street. Sans vouloir copier ses traits, Dahan donne à son personnage l’âme de l’acteur. Les décors minutieux de la capitale anglaise sont aussi fins et précis que l’est l’enquête d’Holmes.

            Outre un scénario en béton et un dessin pointilleux, c’est par un remarquable découpage hors du commun que se distingue cette série. Tout est dit dans le titre : Dans la tête de Sherlock Holmes. Ce n’est pas une métaphore. Quand Sherlock réfléchit, le personnage navigue de case en case dans une planche cadrée dans sa tête. La collecte des informations se fait dans son esprit comme s’il était une machine dans laquelle on entre des données qui en ressortent une fois analysées. Quand Sherlock est sous l’effet de la cocaïne, son rêve est une maison déstructurée.

            Aucune planche ne ressemble à une autre. Les mises en scène mettent en avant les indices que trouve le détective et à partir desquels est construite toute l’architecture de la double page. Les déplacements dans les différents quartiers s’effectuent sur fond de cartes de la ville.

            Cette « affaire du ticket scandaleux » nous laisse en plein suspens dans l’attente d’un tome 2 pour conclure l’enquête. Elle est une des grandes bonnes surprises de l’année. Comme quoi, il est encore possible d’étonner avec un personnage et un thème battus et rebattus, tout cela grâce à un traitement complètement inédit du genre. Elémentaire !

 

Série : Dans la tête de Sherlock Holmes

Tome : 1– L’affaire du ticket scandaleux

Genre : Polar 

Scénario : Liéron 

Dessins & Couleurs : Dahan 

Couleurs : Cerise

D’après : Conan Doyle

Éditeur : Ankama

Nombre de pages : 48

Prix : 14,90 €

ISBN : 9791033509721

 

 

 

 

 

Pour le crépuscule des cow-boys, ne vous attachez à personne. 

Jusqu’au dernier

 

            Russel conduit de gigantesques troupeaux pendant six mois à travers les états pour les mener aux abattoirs de Chicago. Jusqu’à il y a peu, la survie de tout l’Ouest dépendait de types comme lui. Mais avec l’avènement et le développement à vitesse grand V du chemin de fer, les rails sur la prairie sont en train de causer la disparition de la profession. « Demain, les cow-boys, c’est fini. » Accompagné de Kirby, vacher comme lui, et de Bennett, jeune homme naïf qu’il a recueilli à la mort de ses parents, Russel va devoir se résoudre à se payer un ranch pour se sédentariser. C’est une toute nouvelle vie qui s’annonce pour le trio, jusqu’à ce qu’une halte dans un village voit leurs destins pulvérisés par un événement irréversible.

            Jusqu’au dernier rappelle les meilleurs films de John Ford et de Clint Eastwood. Le scénario de Jérôme Félix est impitoyable. Paul Gastine a mis trois ans pour dessiner l’album. L’ensemble est… parfait ! Le découpage, les dialogues, tout et rien semble pesé, réfléchi, pertinent. Tout, parce qu’en creusant un peu on descelle tout le travail qu’il y a derrière. Rien, parce que rien ne peut arrêter la lecture de l’album. On se trouve embarqué dans une histoire que l’on ne peut pas quitter avant de l’avoir terminée. Le scénariste et son dessinateur sont dans une alchimie magique intégrant le lecteur.

            Même le titre semble touché par la grâce. « Jusqu’au dernier ». Jusqu’au dernier ? La locution est polysémique et mystérieuse. Jusqu’au dernier cow-boy, la profession vivant ses dernières années ? Jusqu’au dernier survivant ? Jusqu’au dernier train ? Jusqu’au dernier instant ? Au lecteur de le découvrir…

            Le dessinateur n’a pas hésité à recommencer des planches jusqu’à trouver la composition idéale des cases. Jamais dans la démonstration mais toujours dans la justesse, ses images sont à la bande dessinée ce que le cinémascope a été au septième art.

            Aurait-on pu se douter que Russel a failli croiser Lucky Luke ? Oui, oui, avec son troupeau, ils ont hésité à passer par le guet de P(a)inful Gulch pour couper la route, l’endroit même où le plus célèbre cow-boy de la BD a eu à faire avec des « rivaux ». Fermons ici cette (involontaire ?) parenthèse humoristique.

            Félix et Gastine avaient déjà signé ensemble les quatre tomes de L’héritage du diable. Ils ne vont pas s’arrêter là puisqu’ils préparent déjà un deuxième western : A l’ombre des géants.

            Laissez-vous surprendre par le déroulé du récit. Juste un conseil : ne vous attachez à personne, vous risqueriez de ne pas vous en remettre…

 

One shot : Jusqu’au dernier 

Genre : Western 

Scénario : Félix 

Dessins & Couleurs : Gastine 

Éditeur : Bamboo

Collection : Grand angle

Nombre de pages : 72

Prix : 17,90 €

ISBN : 9782818967003

 

 

 

© Le Gall - Delcourt

 

            En choisir dix, c’est en laisser sur le carreau dix autres qui, à un cheveu près, auraient pu se trouver dans cette sélection. Si le Père Noël est généreux, il peut rajouter à la liste ci-dessus les albums suivants qui font partie des albums indispensables de l’année :

 

 

Des leçons de vie de femmes réfugiées : Et pourtant elles dansent…, par Djinda aux éditions Des ronds dans l’O.

 

Deux époques, un passage… On se retrouvera : The Black Holes, par Gonzalez aux éditions Dargaud.

 

Adorablement fou : Saint-Rose, par Micol aux éditions Futuropolis.

 

« C'est la mort que vous réclamez. Pas la justice. » : L’abolition, le combat de Robert Badinter, par Kerfriden et Gloris-Bardiaux-Vaïente aux éditions Glénat.

 

Une « autre » quête : Un putain de salopard 1 – Isabel, par Pont et Loisel aux éditions Rue de Sèvres.

 

L’humour est une maladie attrapée dès l’enfance : Le roman des Goscinny, par Catel aux éditions Grasset.

 

« Le crime en local clos est le seul mystère dont la raison accepte avec plaisir le défi. » : Le Detection Club, par Harambat aux éditions Dargaud.

 

Tout n’est pas perdu quand il reste l’imagination : L’ours est un écrivain comme les autres, par Kokor aux éditions Futuropolis.

 

Un petit manga auto-édité qui a tout d’un grand : Red Flower Stories, par Loui aux éditions Loui.

 

Spirou au cœur de l’histoire par un auteur berlinois : Spirou à Berlin, par Flix aux éditions Dupuis.

 

 

Laurent Lafourcade



Publié le 15/12/2019.


Source : Bd-best


La claque de cette fin d’année.  Blueberry 1 - Amertume Apache

« - Sir !

- Blueberry… Vous venez m’annoncer quelque chose de grave, mh ? Naturellement !... Si vous êtes dans cet état, c’est que vous avez trempé dans quelque catastrophe.

- J’ai été témoin d’un incident qui risque d’embraser la région, Sir…

- Les apaches…

- Amertume, Sir…

- Ouch.

- Et la communauté de la mine de…

- Oui, les dingues, je sais qui c’est. Des dingues contre des sauvages… Lieutenant, je finis par me demander si vous ne portez pas la poisse. »

 

 

 

 


 

            Trois cow-boys, une fille et deux garçons, dont deux sont des enfants du prêcheur polygame R.G.Dahlstrom, viennent d’assassiner sauvagement la fille et femme d’Amertume, guerrier apache. La hache de guerre est déterrée. Blueberry, témoin du double meurtre, vient annoncer la nouvelle au Lieutenant-Colonel Benjamin Tyreen, commandant du Fort Navajo. L’officier voit sa partie d’échec contre un automate perturbée par l’événement qui risque d’embraser la région.

 

 

 

 

© Blain, Sfar - Dargaud

 

 

            Prendre la suite de Giraud et Charlier n’était pas une mince affaire. On attendait Sfar et Blain au tournant, certains se délectant d’avance du costume qu’ils allaient pouvoir leur tailler. Les « hateurs » n’auront pas d’os à ronger. Cet album est une pure réussite.

 

 

 

 

© Blain, Sfar - Dargaud

 

 

            Joann Sfar synthétise tout ce qu’il y avait de meilleur chez Charlier pour sortir un scénario parfait. Son Blueberry est à la fois dans une continuité et une symbiose entre celui de son créateur et Jerry Spring. L’ombre de Jijé, qui planait sur Gir, veille aussi sur Sfar et Blain. Mais un autre grand dessinateur complète la trinité Gir-Charlier-Jijé, c’est Franz, auteur trop tôt disparu qui a signé avec le scénariste Festin la seule reprise de Jerry Spring avec un album oublié, un « incunable » paru au début des années 90, intitulé…. Colère Apache ! De la colère à l’amertume, il n’y avait qu’un pas à franchir, ce qu’a fait Sfar pour son ami Blain. Dans Colère Apache, Jerry Spring tentait de maintenir la paix entre les apaches et les hommes de main du maire de la ville. Dans Amertume Apache, Blueberry occupe exactement la même fonction en servant, ou en tentant de servir, de médiateur entre les différentes parties. Mais devant la violence et la haine, est-il possible d’apaiser des esprits assoiffés de sang ?

 

 

 

 

© Blain, Sfar - Dargaud

 

 

            Christophe Blain n’est pas un novice dans le western. Son premier album, La révolte d’Hop-Frog en 1997, en était déjà un. Vingt-deux ans plus tard, Blain a acquis la maturité qui lui permet de réaliser cette reprise. Il ne joue pas dans la même cour qu’un Ralph Meyer ou un Paul Gastine. Tout en rendant hommage à Giraud, le dessinateur ne trahit pas son trait qui garde sa spécificité. Avec des mises en scène mettant en valeur le média BD comme la sublime planche 50, Blain s’installe définitivement comme un « grandprixmable » à Angoulême.

 

 

 

 

© Blain, Sfar - Dargaud

 

 

            Amertume Apache traite à la fois de sujets classiques de la grande époque du western, mais aussi de préoccupations modernes. Depuis les années 60, la place de la femme dans la société n’est plus la même. Ruthy, la femme du Lieutenant-Colonel, joue à la fois le rôle de l’épouse modèle et de la femme qui cherche à s’émanciper. Pour autant, les femmes n’ont pas toujours la part belle à l’instar de Bimhal, qui n’a ni remords ni regrets sur ses actes irréversibles.

 

            Cet album n’est ni un Blueberry « vu par... », ni un one shot. Il se termine comme à la belle époque en plein suspens, la dernière case annonçant de façon alléchante l’implacable titre de la suite : Les hommes de non-justice. En attendant, goûtez cette amertume qui n’a jamais eu aussi bon goût.

 

 

 

 

Laurent Lafourcade

 

 

Série : Blueberry

 

Tome : 1 - Amertume Apache 

 

Genre : Western 

 

Scénario : Sfar 

 

Dessins : Blain

 

D’après : Giraud & Charlier 

 

Éditeur : Dargaud

 

Nombre de pages : 64

 

Prix : 14,99 €

 

ISBN : 9782205077988

 



Publié le 09/12/2019.


Source : Bd-best


1·2·3·4·5·6·7·8·9·10·11·12·13·14·15·16·17·18·19·20


©BD-Best v3.5 / 2024