Rencontre avec Guardino et Canalès
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Rencontre avec Guardino et Canalès

Dans les rues de La Nouvelle Orleans, alors que la fête de Mardi Gras bat son plein, Blacksad arpente le bitume à la recherche d’un homme parti sans laisser d’adresse. Cet homme s’appelle Sebastian. Il est pianiste de jazz et, accessoirement, consommateur de drogues. Son producteur, un certain Faust, s’inquiète de ne pas avoir de ses nouvelles et confie ses craintes à Blacksad. La mort de Sebastian serait un rude coup porté à la musique et mettrait en péril l’avenir de sa maison de disques. Mais Faust dit-il la vérité, toute la vérité ? Avec un nom pareil, il y a de quoi se poser des questions…

la sortie de Blacksad est toujours un événement en soi. Christian Missia à donc profité de l'occasion et rencontré les auteurs afin de vous éclairer sur ce cinquième opus.

Christian Missia : Cinq ans se sont écoulés depuis la parution du dernier Blacksad. Pourquoi si longtemps ?

Guarnido : En fait, on n’a pas chômé. On a fait énormément de choses. Moi, j’ai fais des albums de Sorcelleries, les couvertures de Voyageur. J’ai retravaillé dans le dessin animé. Mon scénariste il a continué, lui, de travaillé dans le dessin animé et en plus, il gérait son propre studio avec des associés… ça a été une époque assez mouvementée, même au niveau personnel pour nous deux (rires). J’ai déménagé plusieurs fois. Lui (Canales), il a eu un jeune enfant. Enfin, il était déjà né mais il est toujours jeune (rires). Donc, voilà… même au niveau personnel ça a pas mal bougé mais bon, nous voici (rires).

Canales : C’est vraiment ça. Je dirais que l’on n’a pas arrêté de travailler mais dans d’autres projets. Dans mon cas il y avait aussi d’autres projets bédé comme la série d’humour (les Patriciens, ndr) que j’ai sorti chez Glénat avec un autre dessinateur espagnol qui s’appelle Cabor. Et puis, il y a un scénario que j’ai préparé pour une série mais qui n’est pas sorti encore mais qui sortira, si tout va bien, l’année prochaine et je travaille toujours dans l’animation et tin tin tin !

 

C M : Quel est le pitch de ce nouveau Blacksad ?

Guarnido : Un musicien a disparu… Un producteur musical engage Blacksad pour retrouver un musicien disparu à la Nouvelle Orléans.

 

C M : Revenons à la genèse de Blacksad. Pourquoi avoir choisi des animaux anthropomorphes pour raconter vos histoires ?

Canales : Ce que l’on avait envisagé c’était une sorte d’expérience narrative. C'est-à-dire que l’on a voulu mélanger un truc très ancien mais en même temps très accepté dans notre culture occidentale, c’est celle des fables ave un genre plutôt moderne comme le polar. Et voilà… ça a marché apparemment.

 


 

C M : Comment définissez-vous le casting des personnages ? Qu’est ce qui fera que par exemple, tel personnage sera un coq, tel autre un bouc, etc ?

Guarnido : Bon, disons déjà que ce n’est pas moi qui fais la plupart des castings parce que c’est déjà prévu dans le scénario. On en discute et on va dire, 15, 10 % maximum du casting est refait selon les discussions parce que j’ai envie de dessiner un autre animal ou celui-ci que je ne trouve pas assez intéressant ou pas trop adapté au rôle, mais de toute façon on échange énormément. Et pour le choix, effectivement il y a plusieurs critères. Les critères sont multiples. C’est soit le rôle de l’animal dans les fables. Soit le rôle de l’animal dans la culture contemporaine, dans l’acquis culturelle des gens. La présence de l’animal dans des ouvrages. Dans des ouvrages littéraires. Même dans des expressions verbales courantes. Son simple physique, aspect physique, qu’il soit (rire) un animal drôle, un animale gros, un animal costaud, un animal maigrichon, beau, moche, etc. Voilà, tous ces critères, ou même le fait de prendre ces critères à rebrousse-poil pour donner un effet un peu contrariant, étrange, choquant. Chez le lecteur, tout ces critères se valent et s’entremêlent d’ailleurs.

 

C M : Comme Barbucci et Canepa, les auteurs de Sky Doll, vous êtes des purs produits Disney. Est-ce pour cela que vous aimez autant dessiner des animaux ?

Guarnido : Non, en fait… quand j’ai découvert les premières bédés de Blacksad que Juan (Canales) avait dessiné lui-même. Ca date de l’époque où l’on s’était rencontré, autour de 1990. Je ne travaillais pas encore chez Walt Disney… mais j’avais déjà un gout certain pour l’animalier. Mes bédés de jeunesse, 80% c’est de l’animalier. Quand j’ai vu ce projet que Juan avait dessiné lui-même, j’ai eu envie de le reprendre… de reprendre le rôle du dessinateur avec cette idée car ça me semblait être une idée fantastique, surtout pour moi. C’était une source potentielle de plaisir et de recherche, de personnages, de textures de poils. De développer quelque chose de très intéressant, de très stimulant.

 

 

Canales et Guardino

 

C M : Canales, vous avez, un jour, déclaré que si Blacksad était adapté en film d’animation, vous souhaiteriez que ce soit un studio japonais qui le fasse. Pourquoi ?

Canales : Parce que l’univers de Blacksad est très réaliste et je pense que les seuls capable d’avoir une approche très réaliste, vraiment réussie dans le dessin animé ce sont les japonais.

 

C M : Vous ne pensez pas que les studios européens ou américains peuvent faire ce travail ?

Canales : C’est difficile, il n’y a pas beaucoup d’exemples. Par contre, il y en a plein dans les dessins animés (japonais, ndr). Notamment dans le DVD de Satô Shikon que je trouve magnifique. C’est vraiment dommage car il aurait donné une touche très intéressante à Blacksad je pense.

 

C M : Dévoilerez-vous un jour le passé de John Blacksad ?

Canales : Oui euh… non. C'est-à-dire que l’on a à priori planifié de dévoiler complètement le passé de Blacksad. Chaque fois que l’on a mis des éléments biographiques de Blacksad c’est parce que cela avait un lien avec l’histoire et l’on va continuer comme cela. Sinon ce ne serait pas intéressant pour le récit. On aura des informations mais à part ça, ça restera caché parce que on cherche ce côté réaliste de la narration.

 


 

C M : En lisant Arctic-Nation, bien que les personnages soient anthropomorphes, on réalise que John Blacksad serait un homme de couleur s’il avait été humain. 

Guarnido : Je pense que nous même avons pris conscience de sa négritude lors du deuxième (album, Arctic-Nation, ndr) parce que sur le premier des gens nous demandaient si Blacksad représentait un homme noir. Je disais : « non, pas forcément », je ne me posais pas la question. Dans le deuxième, effectivement, il est noir avec une touche de blanc, un peu café au lait. Qui est ce personnage ? Ca ne correspond pas forcément. Les Blancs, les animaux blancs dans Blacksad 2 ne correspondent pas aux Blancs. Ca ne correspond pas aux personnes de race blanche, ça correspond aux extrémistes. C’est un reflet, une caricature. Dans le même sens… mais effectivement, Blacksad… du coup, il est devenu, par son rôle très marqué par cette histoire il est devenu dans notre image intérieure un personnage noir.

Canales : C’est vrai. C’est un peu un exemple de ce que je dis sur la biographie de Blacksad. Il y a des choses qui prennent forme au fur et à mesure que l’on développe la série. Le truc racial de Blacksad c’est un bon exemple. On n’a jamais pensé à ça pendant le premier tome mais dans le deuxième tome il est devenu métis. Il a prit conscience en même temps que nous qu’il était Noir avec une touche de blanc.

 

C M : Pouvez-vous nous dire quel sera le thème de la prochaine histoire et quand sortira-t-il ?

Canales : C’est difficile à dire…

Guarnido : C’est exclu qu’il sorte dans cinq ans. Il sortira dans deux ou trois ans. On essaie… dans l’avenir, on va essayer de se rapprocher du rythme de sortie des trois premiers tomes. C’est un accident qui s’est produit, qui a retardé la sortie du 4ème.

Canales : Et côté du sujet du prochain album, le scénario n’est pas encore développé mais on a déjà décidé que ce serait une sorte de road movie.

 

C M : Parlez nous de vos prochains projets.

Canales : Oui, j’ai déjà un autre projet avec Jose Luis Munuera, l’ancien dessinateur de Spirou. C’est un diptyque prévu pour l’année prochaine. Donc si tout va bien, on aura cette histoire prête pour l’année prochaine, toujours chez Dargaud.

Guarnido : Moi, j’ai le dernier numéro de la série Voyageur que je dois dessiner très prochainement. Après ce sera le troisième tome de Sorcelleries… et après, plus que probablement, je me mets tout de suite au cinquième Blacksad. Il y a un projet de one-shot aussi que je ferai immédiatement… j’avais envisagé de le faire avant le cinquième Blacksad mais ça le reporterait à trop loin donc je ne peut pas faire autrement que… ce one-shot, je le ferai immédiatement après. Ce sera entre le Blacksad cinq et six. C’est un projet que je vais faire avec un scénariste français, un de mes préférés et je pense que ce sera un bel album.

 

C M : Qui est ce scénariste ?

Guarnido : (Rires) Je ne le dirai pas car il y a déjà eu un autre projet de one-shot avec un autre grand scénariste français et bon copain mais qui, finalement, est tombé à l’eau parce que justement mon planning s’est chevauché et lui il s’est dit que ce projet ne pouvait pas être supprimé. Il m’a demandé si cela me dérangeait qu’il le fasse avec quelqu’un d’autre, je lui ai répondu qu’il avait carte blanche. C’est dommage mais bon, l’envie nous reviendra de travailler ensemble. C’est vrai que je ne peux pas non plus faire la gaffe de le nommer et que après, par malheur les circonstances nous empêche de… je ne veux pas trop m’avancer surtout qu’il n’est même pas encore en chantier.

 

Interview : © Christian Missia & Graphivore 2010

Photos d'auteurs : © Christian Missia 2010


Images et extraits d'albums : © Dargaud 2010



Publié le 23/09/2010.


Source : Graphivore

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