« - Sinon, quand j’y pense… A défaut de jeux olympiques, ça te dirait que je te prépare pour les olympiades féminines qu’Alice Milliat va organiser ? Il reste encore quatre mois, on aurait le temps de bien travailler. Si elle les a créées, c’est bien pour montrer des performances et pas un concours de sportives du dimanche !
- Je rêve ou tu viens de me traiter de sportive du dimanche ? Tu veux savoir à quoi je voudrais vraiment m’entraîner ?... »
Années 20, dans les allées du vélodrome municipal, Violette Morris et Raoul Paoli terminent leur séance de sports. Course, lutte, tout est bon pour se confronter, se stimuler, se dépasser. Double champion de France poids lourd, porte drapeau aux jeux olympiques d’été de 1912 à Stockhlom, champion de France en lancer de poids et de disque, ainsi qu’en lutte gréco-romaine, Paoli a aussi tâté du rugby et de l’aviron. Violette a trouvé en lui un compagnon d’entraînement à sa hauteur. Mais un autre sport chatouille l’athlète : le sport automobile. Et quand Violette décide de s’engager dans une discipline, elle se donne tous les moyens pour gagner.
1942, en pleine guerre, l’ancienne camarade d’école de Violette Morris, Lucie Blumenthal, vie l’angoisse des premières rafles dont sont victimes ses parents. « Tout ira bien, c’est l’affaire de quelques heures, un ou deux jours, tout au plus. », lui dit son père médecin embarqué pour le Vél d’Hiv.
Décembre 1945, Lucie enquête sur ce qui s’est réellement passé le 26 avril 1944, jour de l’exécution de Violette Morris dans un guet-apens de maquisards.
Violette Morris est une femme, mais Violette Morris a des couilles. Personnalité osée, gonflée, controversée, Violette Morris est un butor. Le duo Kris/Galic raconte sous la forme d’une enquête imaginaire la vie de cette femme étonnante dans tous les sens du terme. Après un premier tome ultra efficace, les auteurs s’attardent sur sa carrière sportive. L’histoire de Lucie permet de contextualiser ce qui deviendra le côté sombre de Violette. Ce deuxième volet est moins dans l’action que le premier mais creuse plus en profondeur les personnalités des « héroïnes » principales. Violette Morris semble souffrir dans son corps de femme et se dépasse physiquement. Lucie Blumenthal est meurtrie par les cicatrices que lui cause la guerre et qui ne se refermeront pas.
Javi Rey fait du regard de la « hyène de la Gestapo » un puits sans fond de détermination et de celui de l’avocate enquêtrice un cercueil sur lequel on a rabattu violemment le couvercle. Que les personnages soient réels ou fictifs, il travaille tout autant leur (in-)humanité. Les décors et les tons de couleurs contribuent à l’ambiance des époques, que ce soient les années folles plutôt pastels ou la guerre et ses douleurs, aux ambiances faussement sépias dans certaines scènes.
Marie-Jo Bonnet, biographe de Violette Morris (Violette Morris, Histoire d’une scandaleuse, éditions Perrin, 2011) clôture encore une fois l’album avec un dossier historique passionnant. Axé principalement sur le sport féminin, on y apprend entre autres le rôle déterminant d’Alice Milliat dans son développement et son institutionnalisation.
Si l’on devait comparer Violette Morris à un personnage de fiction, c’est certainement du Joker de Batman dont elle se rapproche le plus, aussi bizarre que cela puisse paraître : une volonté sans faille, une énergie insatiable qui cache une cruauté incompréhensible, et puis, surtout, un destin qui bascule.
Laurent Lafourcade
Série : Violette Morris, à abattre par tous les moyens
Tome : 2 - Deuxième comparution
Genre : Polar historique
Scénario : Kris & Galic
Dessins & Couleurs : Rey
Dossier historique : Bonnet
Éditeur : Futuropolis
Nombre de pages : 72
Prix : 16 €
ISBN : 9782754827577
©BD-Best v3.5 / 2024 |