« - Elle a été violée. Une petite fille sans défense, vous vous rendez compte ? Et ce monstre l’a déchirée, il n’y a pas d’autres mots. Battue à mort. Etranglée. C’est sûrement un de ces nègres.
- Suffit, Gunther Kruger ! A l’heure où nous parlons, vos compatriotes se laissent entraîner par un tyran dans une guerre alors que nous avons tous prié pour qu’elle n’advienne jamais. Des milliers, des millions de gens, peut-être, vont mourir… Tout ça à cause des allemands !
- Pas tous les allemands, Madame Vaughan…
- Et pas tous les noirs, Monsieur Kruger. Voilà précisément où je voulais en venir. Il ne s’agit pas d’une question de nationalité, et encore moins de couleur ou de religion… Juste d’une question d’hommes.
- Elle n’a pas tort, mon vieux. A ceci près que dans l’affaire qui nous occupe, le qualificatif « d’homme » me paraît hautement exagéré... »
Ça fait deux mois mois que l’Allemagne a déclaré la guerre au reste du monde lorsque, en plein cœur de la Georgie, aux Etats-Unis, le corps d’une fillette est découvert. Toute la petite ville d’Augusta Falls est en émois. Joseph a douze ans. Il était épris d’Alice Ruth Van Horne. Un mystère immaculé les liait, un sentiment dont ils ne connaissaient ni le nom ni la nature. Il leur semblait qu’un jour, devenus adultes, ils songeraient avec nostalgie à ces images indélébiles de l’enfance. Alice était l’innocence incarnée. Elle a été sauvagement assassinée. Elle ne sera que la première victime d’une longue série. Le meurtrier est introuvable. La police reste impuissante.
© Guérineau, Colin, Ellory - Philéas
Ce n’est pas la première fois que le scénariste Fabrice Colin adapte R.J. Ellory qu’il connaît personnellement. L’auteur lui avait proposé de lire son recueil de nouvelles. Colin en a tiré Chicagoland, publié en 2015 chez Delcourt, racontant un meurtre sous trois angles de vues différents. Il récidive avec Seul le silence, thriller crépusculaire suivant la vie de Joseph Vaughan qui deviendra un écrivain new-yorkais à succès, dont l’enfance dans un décor à la Tom Sawyer avait plutôt un parfum de Seven. L’enquête ira de rebondissements en rebondissements. On la croira bouclée, elle ne le sera que bien plus tard que prévu. Pour autant, Seul le silence n’est pas qu’une histoire de Serial Killer. C’est aussi le portrait d’une Amérique profonde, bien loin du mythique rêve dont elle porte le drapeau.
© Guérineau, Colin, Ellory - Philéas
Richard Guérineau immerge le lecteur dans une ambiance glauque et un lieu rassérénant. On est dans un oxymore spatio-temporel. La campagne calme et chaleureuse est le théâtre des plus horribles crimes. Le dessinateur pousse le curseur plus loin que ce que l’on aurait pu imaginer. Pour les flash-backs, Guérineau joue avec de nouvelles ambiances beige-marron foncé s’alliant à l’atmosphère sable du cœur du récit. En plus d’être un dessinateur exceptionnel, Guérineau se positionne en coloriste hors pair, faisant de ses tons un élément clé du récit. Le final le prouve. D’album en album, l’auteur démontre l’éclectisme de ses productions. Ses trois derniers albums : Entrez dans la danse, Croke Park et Seul le silence n’ont rien en commun et sont tous très réussis. Mais quand est-ce que des dessinateurs comme lui seront grand-primés à Angoulême ?
© Guérineau, Colin, Ellory - Philéas
Polar hors norme, thriller impitoyable, Seul le silence est une adaptation qui va faire du bruit.
Laurent Lafourcade
One shot : Seul le silence
Genre : Polar
Scénario : Fabrice Colin
Dessins & couleurs : Richard Guérineau
D’après : R.J. Ellory
Éditeur : Philéas
Nombre de pages : 104
Prix : 18,90 €
ISBN : 9782491467111
©BD-Best v3.5 / 2024 |