Entretien avec Henri Reculé pour les Milles et autres Nuits
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Entretien avec Henri Reculé pour les Milles et autres Nuits

Un magicien caché derrière un nom et des pouvoirs mystérieux, la belle Shéhérazade tombée en disgrâce dix ans après la mille et unième nuit, Ali Baba ruiné après avoir dilapidé tout son trésor, et le prince Ahmed finalement rejeté par la fée Pari-Banou, font équipe, des caravansérails de Damas aux profondeurs des déserts d’Arabie, pour retrouver une pierre précieuse légendaire. Le joyau de la Mère, qui fit partie d'un collier merveilleux forgé par un djinn maléfique. Le collier qui transformait n'importe quelle femme en la créature la plus extraordinaire du monde.

 

Bonjour Henri Reculé,
 

Bonjour BD-Best.

Comment allez-vous ? C’est toujours un événement lorsqu’un auteur revient avec une nouvelle série n'est-ce pas? Quel est votre sentiment à la sortie des Mille et autres nuits ?

Après une dizaine d’années sur Cassio, quitter notre cher romain vers des contrées plus exotiques a été un vrai plaisir. Il s’agit de créer des nouveaux personnages, bien sûr, mais aussi de se réinventer dans la manière d’aborder l’histoire, les cadrages, la couleur aussi. Je suis très content que cette série soit enfin en librairie. On a dû commencer en 2012-2013, je pense. Ça prend du temps, mine de rien.

C’est toujours un exercice particulier de reprendre des personnages qui ont déjà été créés par d’autres que vous et qui même sont devenus légendaires, qu'en pensez-vous?


Vous faites certainement allusion à Shéhérazade, Ali Baba et le prince Ahmed, personnages des contes des Mille et Une Nuits et qui font partie de nos héros des « Mille et Autres Nuits »… Je pense qu’il est bien plus difficile de reprendre un personnage de bande dessinée avec un code graphique déjà marqué. Dans ce cas-ci, ces personnages existent depuis tellement longtemps dans l’imaginaire collectif qu’on a finalement bien plus de liberté qu’on ne le croit.

Comment vous y êtes-vous pris ?


L’idée, dans ce cas précis, a été de se focaliser sur le scénario qui, soit dit en passant, n’est pas une « relecture » des « Mille et Une Nuits », mais bien une histoire originale se passant bien après les célèbres contes. A partir de là, sans s’inspirer de rien en particulier il a été assez simple de créer des personnages qu’on espère intéressants.

Comment est née cette idée de reprendre ces héros après leur temps de gloire ?


Stephen Desberg voulait faire la série dans cet univers des Mille et Une Nuits et assez naturellement lui est venu l’idée que la présence de ces personnages serait plus intéressante s’ils n’étaient plus ce qu’ils étaient du temps des contes originaux. Le titre de la série « Les Mille et Autres Nuits » est venu assez tard, je dois dire, mais il réflète bien cette différence avec les contes que l’on connaît.

Le héros de l’histoire, Jaisalmer, entretient une relation avec une génie, qu’en est-il de ce personnage?

A première vue, c’est un magicien, mais assez vite on comprend que les choses ne sont pas ce qu’elles semblent être. Pour nous, il fallait un personnage original ne faisant pas partie des contes pour mener l’histoire. Mais ce personnage cache bien des choses et nous en saurons beaucoup plus au tome 2.

 

 

 

 

En plus, Ali Baba, Shéhérazade, le prince Ahmed, il fallait leur donner une cohérence graphique afin de les faire évoluer en adéquation avec leur nouvel univers, non ?


Bien sûr. Ali Baba est venu assez facilement. Son côté roublard et sans gêne appellent un graphisme assez direct entre le pirate et le voleur. Shéhérazade, elle, m’a été inspirée par les peintures Orientalistes mais elle devrait encore évoluer par la suite. Le Prince Ahmed moins connu du grand public se devait d’être plus sobre et élégant. Il a un look plus indien. Il faut savoir que les contes des Mille et Une Nuits englobent une aire géographique qui va de l’Egypte jusqu’en Chine. La réalité historique des contes des Mille et Une Nuits est assez floue et les contes les plus connus, tels Aladin et la lampe Merveilleuse, Sinbad le marin et même Ali Baba, me semble-t-il, sont parfois plus anciens de un ou deux siècles. Notre but n’est pas de jouer les historiens mais plus de nous laisser porter par le souffle de l’aventure, du mystère et de l’exotisme que ces contes éveillent en nous. La rencontre réelle de Shéhérazade et des personnages dont elle a conté les aventures en sont une preuve… On n’est qu’au début.

Avez-vous rencontré des difficultés à mettre en images ce récit ? Et, à l’opposé, quelles sont les choses qui vous ont plu ?


Pas de difficulté particulière mais plus l’envie de ne pas faire du Cassio, éviter certains automatismes que je peux avoir. La palette des couleurs a mis un certain temps à se mettre en place… Créer des nouveaux personnages et des nouvelles ambiances m’a beaucoup plu.

Avez-vous grandi avec ces héros que vous dessinez aujourd’hui ? Les contes ?


Je connaissais les contes pour les avoir lu dans une édition assez ancienne, celle de Mardrus. Il m’était déjà venu à l’idée d’adapter un conte ou l’autre, mais il y a longtemps. Des nouvelles traductions plus respectueuses du texte original nous permettent aussi de voir toute la modernité que ces contes ont encore aujourd’hui.

Où en êtes-vous dans la suite ? Et que pouvez-vous nous en dire ?


Le tome 2 est déjà commencé et devrait sortir l’année prochaine. Il sera forcément question du second joyau et nous verrons évoluer la relation entre nos personnages…On ne peux pas dire plus.

 

 

 

 

Finalement, avec Stephen Desberg, vous formez un duo inséparable. Jamais lassé ? Qu’est-ce qui explique votre longévité à tous les deux ?


On s’entend bien déjà. J’apprécie son travail et je pense qu’on partage l’idée que ce qui est avant tout important dans une histoire ce sont les personnages.

Comment se passe votre collaboration ? À distance ? Beaucoup d’échanges ?


On discute beaucoup au téléphone surtout, avant, pendant et après les albums. Habituellement, je reçois un scénario complet qui peux changer selon qu’on soit d’accord ou pas sur certains points. A partir de là, je fais un découpage/crayonné et on en rediscute. J’encre et on en reparle… avec toujours à l’esprit l’idée qu’on doit être juste dans le texte et le dessin.

Est-ce que le fait de vivre en Amérique du Sud a influencé votre manière de faire de la BD ? Vous a apporté des choses qui ont nourri votre dessin ?


Je ne sais pas, j’y suis né et y ait vécut jusqu’à mes 14 ans. J’ai toujours aimé dessiner mais je n’avais jamais eu l’idée de devenir dessinateur de BD. C’est venu un peu par hasard. J’ai mis très longtemps a trouver un style plus personnel. J’y travaille encore.

Quel est votre regard sur le monde actuel de la BD ?


Je pense qu’il y a de plus en plus de gens qui ont du talent mais de moins en moins de place pour montrer ce talent. Quand j’ai commencé un album pouvait rester un mois en vitrine et faire son chemin. De nos jours il faut que ça plaise tout de suite, à sa sortie. Le bouche à oreille devient presque indispensable. Mais ce n’est pas inhérent à la BD. C’est à tous les niveaux.

Quels sont vos projets ?


Dans un premier temps, c’est le tome 9 de Cassio, parution en septembre 2015. Ce sera la fin de la série. Les noirs et blancs sont finis, il ne reste plus que les couleurs. J’en suis déjà très content. Je trouve qu’on a fait une belle fin. Je travaille déjà sur le tome 2 des « Mille et Autres Nuits ».

Et vos envies ?


Que mon prochain album soit mieux que le précédent ;-)

 

Propos recuillis par Alexis Seny

 

Interview © BD-Best 2015

Images © Le Lombard 2015

Photo © Jean Jacques Procureur 2015



Publié le 23/03/2015.


Source : Bd-best

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