« - Messire Ferrucio. Quel bon vent vous amène ?
- La dîme, Messire. L’auriez-vous oubliée ?
- Heu… Certes non. Mais n’est-ce pas un peu tôt ?
- J’en conviens, mais avec les tensions qui règnent à San Giminiano, nos réserves s’épuisent. Nous, les Salvucci, refusons de suivre la famille Ardinghelli qui nous provoquent depuis des générations et ont pris le parti du Pape. Des affrontements sont à craindre et dès lors nous recrutons… C’est pourquoi nous avons impérativement besoin de victuailles. »
Juillet 1274. Sigwald et Gisella vont voir leur vie de fermier troublée par les conflits de nobliaux qui sèment la zizanie dans la région. Pendant ce temps, au château de Crozenc, Dame Mahaut entretient une liaison avec Jocelin, un paysan, vivant dans une cabane dans les bois, jusqu’au jour où elle le retrouvera grièvement blessé. Cette relation fait jaser et jalousies.
Sigwald, le fermier de San Giminiano, redeviendra-t-il chevalier ? Sa sœur Mahaut réussira-t-elle à s’extraire des intrigues de cour et à sauver son amour ?
Sans faire de bruit, à pas de loup, Les Aigles Décapitées tiennent bon la barre depuis 33 ans et font figure de Survivor de la mythique collection Vécu des éditions Glénat. Ce n’est pas par hasard qu’on franchit les époques et les turbulences éditoriales. Les Aigles ont quelque chose de magique qui les rapprochent des séries à la Jacques Martin, et de Jhen en particulier. Créée par Kraehn au dessin et Pellerin au scénario, celui-là même de L’Epervier, le graphisme sera pris en main par Michel Pierret au tome 5 avec Kraehn, puis Arnoux au scénario. Pierret en deviendra l’auteur complet à partir du dix-neuvième épisode : Le jugement du roi.
Michel Pierret fit, entre autres, les beaux jours du journal Tintin avec deux séries qu’il mena successivement pendant plusieurs années : Papilio, puis Max et Cati. Du futurisme du premier, au fantastique contemporain des deuxièmes, il s’imbriquera par surprise dans cette série historique dont plus d’un lecteur a cru qu’il y avait une faute d’orthographe dans le titre : Les aigles décapitées. Mais dans cette série, il ne s’agit pas des rapaces, mais des emblèmes héraldiques, terme féminin.
Le trait classique de Pierret ratisse large. Sobre et sans fioriture, juste et précis, il plaît à toutes générations de lecteurs. Ses histoires sont linéaires : une situation de départ, une problématique, une résolution. Des héros que l’on aime retrouver, mais qui évoluent, vieillissent, jusqu’à ce que l’on suive une deuxième génération, transformant la série en saga. Qui plus est, une ou deux scènes aux seins nus par album (à une époque, on disait que c’était dans le cahier des charges de la collection Vécu), et tout un chacun y trouve son compte. Voilà une des analyses de la longévité de la série.
En continuant sur cette voie et en pariant sur l’effet madeleine de Proust que commence à avoir la série pour une génération de lecteurs, Les Aigles Décapitées ont encore quelques années à briller sur les drapeaux, les écussons et dans les bacs des libraires.
Laurent Lafourcade
Série : Les Aigles décapitées
Tome : 29 – Retour à Crozenc
Genre : Histoire Moyenâgeuse
Scénario & Dessins : Pierret
Couleurs : Pierret (Maxime), Thiry & Caryn
Éditeur : Glénat
Collection : Vécu
Nombre de pages : 48
Prix : 13,90 €
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