« - Je suis voleuse d’objets magiques et c’est un grand secret.
- Pourquoi tu me le dis, alors ? Y avait un truc dans ton sandwich ?
- Euh… Je sais pas. Parce que je suis lesbienne et je suis amoureuse de toi et je tiens à t’offrir quelque chose de précieux alors je t’offre le secret du Wesh.
- Attends ! C’est beaucoup d’informations d’un coup. Et de toute façon, le secret du Wesh, c’est nul.
- Tu veux que j’organise un vrai truc magique par amour pour toi ? »
Avant de s’appeler Héliotrope, elle était une jeune fille comme les autres… comme les autres, ou presque. Amoureuse d’une de ses copines de classe, elle lui avoue être voleuse d’objets magiques et, pour preuve d’amour, l’emmène dans son immeuble où elle vit avec sa grand-mère. Mémé est très à cheval sur la politesse. Elle a le tromblon facile et n’est pas tout à fait d’accord pour que sa petite fille dévoile à n’importe qui leurs secrets de famille. L’invitée, n’appréciant pas d’être entraînée dans des trucs extravagants, préfère prendre ses jambes à son cou. Qu’importe ! En séchant ses larmes sur un livre de magie, notre héroïne découvre qu’il existe un bijou très rare, immatériel, une couleur dont aucun squelette ne garde trace, bref, quelque chose qui pourrait charmer ses amours. Elle se reprend en mains et part donc trouver Aspirine, vampire se son état. Ensemble, elles vont trouver cette couleur, la plus belle d’entre elles, dans la lampe d’un phare d’Ostende : c’est un bleu nommé Héliotrope. Mais lorsque la main de la petite rousse va se refermer sur la flamme bleuâtre, c’est elle qui va prendre cette couleur et son nom. On ne sait pas comment elle s’appelait mais dorénavant elle se nommera Héliotrope. Sa vie va prendre un nouveau départ.
© Chaud, Sfar - Dupuis
Encore une fois, c’est en faisant croire qu’il fait n’importe quoi que Joann Sfar ne fait pas n’importe quoi. Héliotrope part sur un rythme déjanté où les rebondissements magiques emportent chaque fois l’histoire dans une direction dans laquelle on ne s’attend pas. Comme à la grande époque du Borgne Gauchet ou de Petit Vampire, les personnages secondaires ont une consistance spécifique qui n’appartient qu’à Sfar : ici, un gardien de phare capable de jouer du sabre en téléphonant, une grand-mère prête à tout pour élever correctement sa petite fille, ou encore Aspirine, personnage qui a eu sa série chez Rue de Sèvres. Sfar parle aux enfants devenant ados. Héliotrope est lesbienne et le dit sans retenue, avec naturel, comme ça devrait être le cas dans notre société. Son monde est cruel comme l’est celui des adultes. Il y a même un meurtre de sang froid.
© Chaud, Sfar - Dupuis
Au dessin, on retrouve un as de l’illustration jeunesse : Benjamin Chaud. Le dessinateur a fait relativement peu de bandes dessinées. Il sfarise ici son trait. Il entre dans son univers comme dans des chaussons. Ses images sont fines et détaillées. Héliotrope est un personnage moderne qu’il élance et lance dans l’aventure et dans un univers qui, espérons-le, aura l’occasion de se développer.
© Chaud, Sfar - Dupuis
Les aficionados de Joann Sfar ne pourront pas être déçus par cette série. On connaissait le bleu marine, le bleu azur, le bleu Klein et bien d’autres encore. Il faudra à présent compter avec le bleu Héliotrope.
Laurent Lafourcade
Série : Héliotrope
Tome : 1 - Les voleurs de magie
Genre : Fantastique
Scénario : Joann Sfar
Dessins : Benjamin Chaud
Couleurs : Isabelle Rabarot
Éditeur : Dupuis
Nombre de pages : 64
Prix : 13,95 €
ISBN : 9791034760381
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