« - Mais qu’est-ce que vous foutiez ? Ça fait une heure que je me débats en plein surréalisme ! Pour résumer, on a : un casse dans une boutique de luxe, 250 000 euros de sacs et montres dérobés, un groupe de patients atteints d’Alzheimer, complices malgré eux, utilisés pour faire diversion, et un spectacle offert ensuite à ce même groupe dans un cabaret parisien.
- Il y avait aussi des hommes.
- Des hommes ?! Combien étaient-ils ? Décrivez-les moi !
- Ils étaient quatre. Grands, tatoués, bien bâtis.
- Oui c’est ça, quatre ! Et ils étaient nus.
- Nus ?! Qu’est-ce que c’est encore que ce délire ? »
Recueillir les témoignages de témoins troisième âge d’un braquage qui ont terminé la soirée avec un spectacle de Chippendales, ce n’est pas forcément évident, surtout quand on sait qu’elles sont dans l’unité Alzheimer de l’EHPAD Bernadette Chirac.
« La retraite de sa mère, elle ne l’avait pas calculée... » Camille est inspectrice à la brigade de répression du banditisme. Quand elle découvre que sa mère Sonia, ex-OAS, est le cerveau des opérations de hold-up, ou « old-up » comme on pourrait dire, ça fait désordre dans la famille… et au boulot.
A mi-chemin entre Les vieux fourneaux et La casa de papel, ce polar troisième âge n’est pas si improbable que ça. De même que chaque album mettant en scène un petit peuple est comparé aux Schtroumpfs, chaque album mettant des vieux au premier plan est forcément mis en réseau avec Les vieux fourneaux.
Serge Guérin, auteur du récit à l’origine du scénario, est sociologue spécialiste de la question des âges et de l’intergénération. Il forme les directeurs des établissements de santé. Il cherche à rajeunir le regard sur les anciens pour asseoir les fondations d’une société de la longévité réussie. Cet album y contribue fortement.
Philippe Perié s’est emparé de la thématique. Il met les vieux (appelons un chat un chat) en valeurs au détriment parfois des flics, mais toujours de ces animateurs télés insolents. qui prennent leur auditoire pour un ensemble de crétins.
C’est un Jean-Philippe Peyraud beaucoup plus dynamique qu’à l’accoutumée que l’on retrouve. C’est aussi pour lui une seconde partie de carrière. Les amoureux de son trait « Peynet » de ses débuts seront peut-être un peu décontenancés, mais le dynamisme assumé qu’il utilise ici sied à merveille au récit emballé et emballant. Seconde partie de carrière est de ces types de récits à 100 à l’heure que l’on ne peut refermer qu’une fois qu’on l’a terminé.
La couverture d’apparence simpliste est en fait très réussie. A la manière d’une affiche de cinéma, les personnages principaux sont présentés en « V ». Camille, flic sous médocs pour pouvoir résister aux pressions professionnelles et familiales, s’envoie un cacheton. Elle est adossée à sa mère qui, d’un regard malicieux, observe sa fille pour mieux la berner. En arrière plan, Pierre-François Vraif, animateur et producteur de l’émission Forever Young, apparaît arrogant et faux. De l’autre côté, deux ombres de mamies braqueuses montrent leur détermination masquée.
Seconde partie de carrière a la classe et le punch des grandes comédies cinématographiques.
Laurent Lafourcade
One shot : Seconde partie de carrière
Genre : Polar décalé
Scénario : Périé
D’après un récit de : Serge Guérin
Dessins : Peyraud
Couleurs: Peyraud & De la Serna
Éditeur : Futuropolis
Nombre de pages : 128
Prix : 2 1 €
ISBN : 9782754825016
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