1948, la guerre est finie depuis 3 ans mais les souffrances endurées ont difficile à s'effacer. La peur d'une Troisième Guerre mondiale est dans les esprits de certains.
Dès lors, qui refuserait un voyage de 15 jours tout frais compris aux Antilles ?
C'est ce que se disent les 44 vainqueurs d'un simple concours lorsqu'ils reçoivent un courrier leur annonçant leur prix et leur billet d'avion.
Et pas n'importe quel avion ! Le Latécoère 631 ! Le plus grand et luxueux hydravion réservé à l'élite la plus riche.
Un voyage et un séjour de rêve !
Pourtant ses vainqueurs n'auraient-ils pas un dénominateur commun ? Cette liste est-elle un simple hasard ?
Augustin Vanel, vieux monsieur vivant avec son chat, Rose une prostituée rêvant de vacances, Constance Aimée et sa sœur Colette, Bernard Frigolin, ... Que des "anonymes", de petites gens "comme tout le monde" mais qui n'attendent (plus) rien de leur avenir !
L'équipage ? Marceau Renard ex-commandant de l'Armée de l'Air française dont le premier béguin s'appelait Rose. Victor, son co-pilote, ancien camarade d'escadrille.
Paul Faure et son épouse Alice qui a été son infirmière à la sortie de la guerre.
Pour eux un nouveau conflit mondial est loin de n'être qu'une hypothèse ...
© Manini - Chevereau - Grand Angle 2024
Cependant tout commence idéalement. Du bâtiment d'Air France, Esplanade des Invalides à Paris, un bus pour la gare d'Austerlitz, un trajet en train-couchette vers le sud, puis nouveau bus jusqu'à Biscarrosse et le 6 avril 1948, à 4h02 précise, décollage vers Fort-de-France.
Idyllique me direz-vous ? Mais là commence l'imprévu !
Le lendemain, à 12h09, l'hydrobase des Hourtiquets reçoit un appel de détresse désespéré de Roméo India, indicatif de cet hydravion mythique ! Puis plus rien ! Silence radio !
A 16h15, le Latécoère 631 F-BDRI est officiellement porté disparu avec son équipage et ses 44 passagers !
Que lui est-il arrivé ? A-t-il disparu en mer ? Accident ? Panne ? Sabotage ? Ou ... ?
Mystère total !
© Manini - Chevereau - Grand Angle 2024
Un savant mélange de polar, de bons sentiments, de complot et d'intrigue politico-humaniste. A moins que tout ceci ne soit qu'une façade cachant ... ?
Jack Manini nous offre ici un pur délice de saveurs multiples autour du bonheur simple. Alors que chacun des principaux protagonistes pourrait apparaître comme le "héros" de cette aventure, ceux-ci ne seraient-ils pas que des seconds rôles derrière le véritable ciment de l'ensemble : cet hydravion légendaire qu'était le Latécoère 631 ?
Un petit dossier bien documenté clôt d'ailleurs l'album. Richement illustré, il nous présente aussi bien ce "monstre" volant que le rêve qu'étaient à cette époque ces vols transocéaniques.
© Manini - Chevereau - Grand Angle 2024
Un scénario sans violence ou tension si ce n'est : qu'est-il réellement arrivé à l'équipage et à ses passagers ?
L'intrigue démarre innocemment par le départ des vainqueurs d'un concours dont le prix est 15 jours de vacances aux Antilles. Aucun indice n'est offert aux lecteurs qui lui permettraient d'échafauder la suite. Ces derniers apparaissent au fur et à mesure par des chapitres flashbacks semblant être totalement indépendants les uns des autres et présentant certains personnages, événements passés anodins et disparates, ... Un peu comme différentes pièces d'un puzzle qu'on assemblerait au hasard et dont l'image finale ne se dévoilerait qu'à la fin.
Une maîtrise du rythme scénaristique des plus agréables à la lecture, créant à la fois suspense et envie de savoir où cela va nous mener.
© Manini - Chevereau - Grand Angle 2024
Le trait graphique de Michel Chevereau, dont on connaît l'amour des avions ("La pin-up du B-24", également avec Jack Manini au scénario), fait ici merveille, tout comme son découpage des planches ou encore ses angles de vue ! Soutenant cette structure narrative un rien "déconstruite", son style réaliste et dynamique fait la part belle aux visages et ... au Latécoère !
Entre détails aéronautiques et expressions, un travail soigné pour un résultat garanti !
Jack Manini renforce l'atmosphère de son scénario par une palette de couleurs tantôt sepia - ogre, tantôt bleutée. Soulignant ainsi les changements d'époque, il crée une ambiance vintage, genre vieux films, années '40-'50 ?
Bref, "Bon Voyage ?" est un bol d'air plaisant en cette période de vacances pour certains, de morosité ou d'angoisse du futur pour d'autres. Une invitation à se rappeler qu'une autre vision est parfois possible ... à certaines conditions !
Un de mes coups de cœur de l'année !
Thierry Ligot
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Titre : Bon voyage ?
Scénario - couleurs : Jack Manini
Dessin : Michel Chevereau
Editeur : Bamboo
Collection : Grand Angle
Parution : 2 mai 2024
Page : 80
Format : 24,3 x 32 cm
ISBN : 978 2 8189 9500 6
Prix : 16,90 €
Alors que les JO 2024 sont sur le point de se clôturer, que nous sommes en plein milieu des vacances mais que la rentrée scolaire pointe déjà petit à petit son nez, intéressons-nous à une "catégorie" de collègues un rien à part : les profs de sport ou plus français, les profs d'EPS !
Car entre le "c'est mou tout ça Boudini" et la véritable origine des Jeux olympiques ... euh des "Jeux au limpide", ils en connaissent des péripéties. Les gags s'enchaînent dans ce "Best or" des astuces d’Éric pour rendre ses cours plus efficaces, originaux, ...
Il faut avouer qu'il ne manque pas d'idées pour faire grimper à la vitesse de l'éclair à la corde ce Boudini ou encore pour motiver ses élèves à nager plus vite que Léon Marchand, voire trouver des stratégies pour qu'enfin ses collègues gagnent le match de foot "profs-élèves", ...
D'accord, il a aussi tendance à énerver ses fameux collègues. A vouloir jouer au "vrai" prof", à n'avoir que des avantages (pas de corrections, plaire aux filles, être en tenue relax, ...), parfois la météo ou les imprévus leur rendent justice.
© Pica & Léturgie / Erroc & Sti - Bamboo Edition 2024
Il aurait été dommage que ce "Best Or des Profs" n'ait pas sa touche "didactique". Donc un "dossier ludique" le clôture intelligemment. Rempli d'infos surprenantes et d'anecdotes "authentiquement authentiques", Éric nous étale son savoir olympien. Nous y trouvons un rappel de quelques sports originaux ayant fait partie des JO mais ayant disparus depuis, comme le polo à bicyclette ou le ski-jöring.
Éric ne serait pas Éric, prof d'EPS, s'il ne nous proposait pas quelques idées de nouvelles épreuves. Parmi elles, le lancer de thon, le pillow fight ou l'effrayant orteil de fer.
Un petit mot sur la balade de la flamme et vous saurez tout sur les JO 2024. Enfin presque tout !
© Pica & Léturgie / Erroc & Sti - Bamboo Edition 2024
Bref, les zygomatiques font clairement se muscler avec Erroc et Sti au scénario.
37 gags plus désopilants les uns que les autres mettant en scène Éric, ses collègues (des "vrais" profs), les Boudini, Boulard et autres Nitchinsky !
Côté dessin, aucune surprise. Le trait de Pica ou de Simon Léturgie reste efficace et parfaitement dans le ton "comique - humour".
© Pica & Léturgie / Erroc & Sti - Bamboo Edition 2024
Un album de vacances tout public, relaxant pour les longues heures de voiture, de train ou d'avion à ne pas oublier dans ses bagages.
Thierry Ligot
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Série : Les Profs - Les Best Or
Album : Eric, prof de sport
Scénario : Erroc & Sti
Dessin : Simon Léturgie & Pica
Couleurs : J. Guénard
Éditeur : Bamboo Edition
Genre : humour
Parution : 26 juin 2024
Page : 48
ISBN : 979 1 0411 0331 7
Prix : 9,95 €
"Je me suis souvent demandé, comme rescapée de la Shoah, à quoi avait servi toute cette souffrance. A présent, je le sais : témoigner.
Pendant de longues années, ma mémoire a occulté délibérément les horreurs de la guerre ... Mais sans qu'on s'en rende compte, avec l'âge, la parole se libère et les émotions s'apaisent.
Le tout peut devenir un discours constructif pour les générations suivantes.
A 88 ans, j'ai ressenti comme un devoir de raconter ce qui s'est passé il y a plus de quatre-vingts ans.
Pour aller au bout de ma démarche, il m'a semblé indispensable de partir sur les lieux de mon histoire.
J'étais angoissé à l'idée de retourner en Pologne et en Ukraine, après tant d'années.
Mais peut-être cette décision allait-elle apaiser les chagrins qui m'habitent toujours aujourd'hui ..."
Gisèle Genia Flachs
C'est ce parcours d'une enfant juive de 4 ans que raconte ce triptyque ! Un parcours violent, brut, noir, ... comme l'époque.
Sombre ici et pourtant à la fois tendre et plein d'espoir là !
Une narration sans garde-fou qui frappe par sa sincérité et son vécu. Sans esprit de vengeance ou de haine, simplement le regard d'une enfant juive perdue dans un monde d'adultes qu'elle ne comprend pas vraiment ... au début et où elle n'est qu'un fétu de paille emporté dans une tourmente destructrice sans fin.
Un tourbillon de haine pour noyer une innocence !
© Peeters - Flachs - Lamiroy 2024
Difficile, de part certains lieux de ne pas faire des parallélismes avec l'actualité géopolitique. Même pays, mais les uniformes ont changé, les "excuses et raisons" adaptées à aujourd'hui !
Quand une petite fille se voit confrontée, sans explication au départ puisqu'elle ignorait elle-même qu'elle était "juive" et ce que cela signifiait, à tant de violence, comment ne pas imaginer sombrer dans la folie, l'incompréhension, la peur ? Pourtant Gisèle Flachs, à travers sa narration ne semble pas perdre pied, ni raison.
Si, à la lecture de ce témoignage poignant, nous la suivons dans son voyage à la recherche de son passé, elle le fait simplement, avec une certaine douceur dans ses mots, une impression d'intériorisation apaisante dans sa démarche courageuse.
Retourner sur les lieux de son enfance, de son exode entre familles et amis pour la cacher, la protéger, tenter de l'extraire de cette interminable et sanglante "chasse aux Juifs", à ces pogroms haineux et aveugles.
© Peeters - Flachs - Lamiroy 2024
Côté graphisme, celui de David Peeters est à la fois frappant et contrastant avec cette "confession". Noir, sombre, violent, il semble exprimé toute la noirceur et la dureté que les paroles de Gisèle Flachs gardent en elles.
Entre présent et flashback, ce dessin en noir et blanc, dans une mise en page complètement explosée, mettant l'accent clairement sur les expressions des visages, des attitudes, rend à sa manière hommage à la "survivance" de cette enfant de 4 ans !
Contraste violent également entre les pages du "présent" et celles du passé, noyées dans le noir de leur fond comme l'époque.
© Peeters - Flachs - Lamiroy 2024
Trois années de travail, d'écoute, d'échanges entre cette "vieille dame" qui décide de se souvenir et d'enfin partager et cet auteur anderlechtois hors norme, ont été nécessaire pour faire de ce projet une réalité ! Réalité sous la forme d'une trilogie afin qu'elle ne se perde pas dans les méandres de l'Histoire.
A l'heure où les extrêmes ressurgissent avec force, où les leçons du passé semblent s'effacer face aux populismes faciles, un petit rappel est plus qu'utile.
Non, ce n'est pas une fiction ! L'extrême-droite, le fascisme, l'antisémitisme, la banalisation de chacune de ces notions ne sont pas de simples idées abstraites, mais bien des plaies de notre Histoire qu'il est indispensable de rappeler afin d'éviter d'y resombrer demain.
Un album de la mémoire émouvant et prenant, un témoignage de premier plan d'une rescapée de la Shoah, à la fois héroïne et victime de sa propre histoire !
Clairement impatient de découvrir le tome 2 ("Camp") ainsi que le 3 ("Sous terre") qui pourraient se résumer à ces 2 mots-clés : témoigner et transmettre !
David Peeters répondait à quelques questions lors du récent double anniversaire de la Librairie Brüsel à Waterloo, samedi 25 mai dernier.
David Peeters est "Derrière la palette"
Témoignage Gisèle Flachs, Mémorial de la Shoah - Paris, 4 février 2024 :
Thierry Ligot _______________________________________________________________________________________ Série : Sous terre pour survivre Tome : 1 - Pogrom Scénario - dessin : David Peeters D'après l'histoire de : Gisèle Flachs Éditeur : Lamiroy Genre : témoignage, histoire Parution : 3/4/2024 Page : 107 Format : 30 x 21 x 1,4 cm ISBN : 9782875959201 Prix : 24 €
DON ... titre donné avec respect à un membre éminent de la Costa Nostra et porté notamment par tous les Parrains de la mafia sicilienne, les capifamiglia !
Mais sous la plume de Charles-Henri Dewisme, ou de son pseudo de Jacques Colombo, DON voudrait plutôt dire "Danger, érOtisme et violeNce" !
11 titres publiés entre 1983 et 1986. 11 titres pour se défouler du trop "gendre idéal" de sa casquette "Henri Vernes" qu'était son héros mythique, Bob Morane !
Et ce "Café no ! Marimba si !" en est clairement le parfait exemple.
Mer des Caraïbes, un puissant schooner de 25 m, le "Lesbos", fend langoureusement les flots en direction de la Jamaïque. A son bord, Linda Dupont-Blair, splendide créature de 35 ans, son richissime époux Ronald Dupont-Blair, un pétrolier du Texas et Jo Kosinski, sorte d'homme à tout faire et accessoirement garde du corps.
Pour les servir, dans tous les sens du terme et à tous points de vue, 3 hommes vigoureux mais qui sont remplacés à chaque escale ...
L'appétit débordant de la maîtresse de bord, certaines tendances "extravagantes" de son époux les incitent à renouveler fréquemment les hommes ou femmes d'équipage.
© Henri Vernes - André Taymans - Éditions du Tiroir 2023
A Kingston, dans une chambre miteuse du "Paradise", Jan Kaes, Jill Dain et sa femme, Dédée Lecompte sont devant un grave dilemme. Petites crapules sans réelles envergures, héroïnomanes à leurs heures et des coups tordus, n'étant au besoin pas à un ou deux meurtres lucratifs près, sont à court de moyens. Ils cherchent à enfin en réaliser un gros coup qui les mettrait à l'abri du besoin pour longtemps ! L'idée : s'emparer un bateau pour se rendre en Colombie, y embarquer une cargaison de marimba (marihuana en colombien) et la livrer aux States !
Ailleurs dans la ville, dans un autre hôtel de 5e catégorie, se cache Don des tueurs de la Mafia. Petit-fils du vieux Don Giovanni Mazzini, le capo di tutti capi de la Pieuvre, il est la cible des membres de la Commissionne qui craignent qu'il prenne la suite de son grand-père, bien que cela ne l'intéresse absolument pas ! Mais dans le doute, ils préfèrent être "prudents" et le voir mort au plus vite !
Et justement ayant été repéré, un de leurs tueurs s'apprête à l'occire dans sa chambre. Réussissant à s'en débarrasser, Don doit à nouveau fuir et trouver un moyen discret de quitter Kingston.
© Henri Vernes - André Taymans - Éditions du Tiroir 2023
C'est ainsi que par une troublante coïncidence, les premiers sont engagés comme nouvel équipage à bord du "Lesbos", tandis que Don décide d'y embarquer comme "passager clandestin".
En pleine mer, alors que certaines "réjouissances" agrémentent la croisière de Linda, Don est découvert, perturbant ainsi le plan de Jan, Jill et Dédée. Ces derniers passent ainsi à l'acte en mettant leur sinistre projet à exécution ! Mais Don est pire qu'un grain de sable ...
Une rencontre explosive et sanglante s'en suit mettant Don en position plus que périlleuse. Profondément dégoûté par les événements, celui-ci se voit pousser à se lancer, s'il s'en sort, à leur poursuite pour une vengeance qu'il veut aussi terrible et sans pitié que fût leur première confrontation !
© Henri Vernes - André Taymans - Éditions du Tiroir 2023
Roman de sang et de sexe extrêmes comme Jacques Colombo pouvait se le permettre sans "corrompre" l'image d'Henri Vernes et de son Bob Morane, ce 7e des 11 romans de la série, est publié en 1984 chez "Fleuve Noir".
Les Éditions du Tiroir dans leur volonté de nous faire (re)découvrir certaines œuvres oubliées de Charles-Henri Dewisme en font une réédition illustrée par André Taymans.
Dans le pur style des romans noirs des années '80, ce thriller captivant (à plein de points de vue) se lit aisément. Avec parfois force détails et descriptions, nous sommes entraînés sans ménagement dans la violence de l'univers de Don. Pas beaucoup de sentimentalisme (sauf dans certains passages plus "intimistes"), des scènes hard à profusion, clairement à ne mettre qu'entre des mains averties !
Entre rebondissements et scènes d'action, pas moyen de s'ennuyer. De toute façon, l'ensemble est ainsi ponctué de tout ce que Bob Morane ne pouvait se permettre dans ses propres aventures.
Le Ying et le Yang de l'imagination débordante et incroyable de ce maître belge du suspense d'action.
Un cocktail parfait et original de SAS et de San Antonio venant de la part d'un homme qui écrivit avec quasi autant de pseudos et noms d'emprunt que Don lui-même !
© Henri Vernes - André Taymans - Éditions du Tiroir 2023
Si comme pour d'autres romans d'Henri Vernes réédités par les Éditions du Tiroir, une version BD est possible, André Taymans (puisqu'il est "attitré" les DON) risque d'avoir quelques "soucis" de transposition afin de conserver toute l'ambiance de violence et de dépravation du roman initial. Un sacré travail l'attend donc !
Rien à voir avec les illustrations (même si déjà parfois fort suggestives et osées) enrichissant cette réédition !
Alors qu'approche le 3e anniversaire de son décès, voici un excellent thriller vintage à lire en vacances ... nous prouvant une fois de plus tout le talent et la maîtrise littéraire de l'homme aux quelque 230 romans !
Thierry Ligot
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Série : DON
Titre : Café no ! Marimba si !
Tome : 3
Auteur : Charles-Henri Dewisme dit "Henri Vernes" sous le pseudo "Jacques Colombo"
Illustrations : André Taymans
Éditeur : Les Éditions du Tiroir
Collection : Henri Vernes
Parution : juin 2023
Pages : 216
Format : 21 x 14 cm
ISBN : 9782931027974
Prix : 18 €
"-Maman, qu'est-ce qu'on a fait de mal ?...
-Tu n'as rien fait de mal, Chaïm… Tiens-moi fort la main. Je suis là.
-Adieu Salomea…
-Adieu Szymon. S'il vous plaît, commencez par mon fils… Je ne veux pas qu'il me voie…
-Comme tu veux."
1942, près de Lublin, en Pologne, des soldats allemands ayant envahi le pays raflent la population juive. Les hommes sont déportés dans des camps de travail. Les femmes, les enfants et les vieux sont priés de se déshabiller et de descendre dans une tranchée creusée en pleine forêt par les nazis. Ils y sont abattus comme du bétail avant d'être recouverts de terre. Une horreur innommable. Aujourd'hui, des témoins racontent les massacres qu'ils ont vus, comme Maria, quatre-vingts ans, dix ans à l'époque, qui a vu tant de personnes abattues sous ses yeux. Passé sous silence dans les programmes scolaires, c'est l'histoire de la Shoah par balles. Ce livre en est le témoignage.
© Saint-Dizier, Girard – Editions du Rocher
En 2022 et 2023, des étudiants d'Albi et leurs professeurs sont partis en Pologne. Grâce à l'association Yahad-In Unum, ils ont rencontré des témoins de la Shoah par balles et des historiens. C'est de ces rencontres que découlent les faits relatés dans cet album. Les étudiants travaillent sur l'héritage historique européen et la réflexion citoyenne à travers l'étude de cet événement tragique à l'Est de l'Europe. La Shoah par balles est beaucoup moins connue que les chambres à gaz et les fours crématoires. Elle a pourtant fait deux millions de victimes. Malgré le temps qui a passé et le poids des années, les derniers témoins racontent l'indicible.
© Saint-Dizier, Girard – Editions du Rocher
Pierre-Roland Saint-Dizier et Christophe Girard apportent un livre-témoignage choc, indispensable œuvre de mémoire. La nature ayant repris ses droits, il ne reste plus que les récits des survivants pour raconter ce qu'ils ont vu. Il n'y a pas d'archives. Il était urgent de recueillir les témoignages avec la question cruciale : Quelle valeur donner au témoignage d'un enfant 80 ans après les faits ? Pour être le plus objectif possible, le journaliste raconteur remonte aux origines de l'invasion de la Pologne par le troisième Reich. Les 10 % de la population juive polonaise se sont trouvés au cœur de la politique exterminatrice nazie. En fin d'album, un cahier pédagogique concrétise encore plus le drame. Les travaux de l'association Yahad-In Unum, organisme de recherche et d'enseignement des génocides et des crimes de masse, et ceux des étudiants chercheurs sont illustrés par les photos de vestiges et des témoins âgés dont les rides sont creusées par le cauchemar.
© Saint-Dizier, Girard – Editions du Rocher
"Il a vu les nazis, le massacre des juifs, les balles dans la nuque à bout portant, les enfants traînés comme des chiens, la fosse commune se remplir, la terre bouger au-dessus des cadavres." Cette phrase glaçante résume le propos. "Je n'ai pas oublié…" Histoires de la Shoah par balles est à ranger à côté d'œuvres majeures comme Maus ou Visages-Ceux que nous sommes.
Laurent Lafourcade
One shot : "Je n'ai pas oublié…" Histoires de la Shoah par balles
Genre : Histoire
Scénario : Pierre-Roland Saint-Dizier
Dessins & Couleurs : Christophe Girard
Éditeur : Editions du Rocher
ISBN : 9782268109558
Nombre de pages : 150
Prix : 19,90 €
"-Je vois que Monsieur n'est pas un grand bavard. Tu veux bien me donner ton nom, au moins ? Notre rencontre est sans doute un signe du destin. Je te ferai l'honneur de le retenir.
-Akira.
-Enchantée. Moi, c'est Nelia. Je me souviendrai de ton nom jusqu'à la fin de tes jours. Profites-en, ça ne devrait pas durer plus d'une trentaine de secondes."
Est-ce le dernier combat pour Akira ? Face à Nelia, guerrière aguerrie aux lames composées de métal liquide, le chasseur de reliques semble en bien mauvaise posture. Sa combinaison a perdu une partie de ses fonctions. Alpha, son ange gardien, tente de la piloter malgré tout, mais pour pouvoir y arriver, il va falloir gagner du temps, chose que Nelia n'est pas du tout disposée à laisser. Sans spoiler le récit, Akira va se sortir de ce mauvais pas, Nelia aussi, mais pas dans le même état. Si Akira, pris pour un pilleur de reliques, va être arrêté par les forces de défense de la cité de Kugamayama, Nelia est interrogée par un certain Yanagisawa qui cherche à en savoir plus sur le fameux Caïn, qui serait à la tête d'un groupuscule nationaliste de voleurs de reliques.
© Kirihito Ayamura 2022 © Nahuse 2022
© 2024, Editions Dupuis, pour l’édition française
Episode de transition pour Akira qui va se trouver proposer une nouvelle mission alors qu'il sort juste d'une passe bien complexe à gérer. Si les combats sont bien mis en scène, l'intrigue avance à petits pas. Comme on l'a dit dans la chronique du tome précédent, on aimerait à présent que l'intrigue se recentre sur les reliques, pour que les lecteurs en aient une vision plus concrète.
© Kirihito Ayamura 2022 © Nahuse 2022
© 2024, Editions Dupuis, pour l’édition française
C'est avec une certaine virtuosité que Kirihito Ayamura met en scène le face-à-face ouvrant le volume. Il serait presque musical, chorégraphié par un metteur en scène de spectacle. Plus loin, le mangaka montre qu'il est capable de passer d'une tendresse presque érotique à un massacre virtuel, mais massacre quand même.
Une adaptation anime a été annoncée. Rappelons qu'à l'origine Rebuild World est un web novel écrit par Nafuse en 2017. Le roman a après été adapté en light-novel, illustré par Gin. Il est prépublié dans le Dengeki Bunko de ASCII Media Works. 11 tomes sont déjà parus au Japon.
© Kirihito Ayamura 2022 © Nahuse 2022
© 2024, Editions Dupuis, pour l’édition française
Sans révolutionner le genre, Rebuild the world est une valeur sûre du paysage shonen du moment. Divertissant.
Laurent Lafourcade
Série : Rebuild the world
Tome : 8
Genre : Shonen Survival
Roman d’origine : Nahuse
Dessins : Kirihito Ayamura
Design des personnages : Gin
Design de l’univers : Yish
Design des machines : Cell
Éditeur : Vega Dupuis
ISBN : 9782379503665
Nombre de pages : 178
Prix : 8,35 €
"-S… Sam ?!!
-Bula, mon pote ! Ça veut dire bonjour en fidjien !
-Mais… Mais qu'est-ce que tu fous là ?
-Je voulais te voir avant Biarritz !
-Merde, j'arrive pas à le croire !
-Direct les câlins ? T'as pas baisé depuis longtemps, toi ! Moi aussi j'suis content de te voir, petit frère."
Vincent, la trentaine, a tout pour être heureux. Il s'apprête à acheter un appartement en plein Paris avec sa compagne. Il bosse dans une start-up dans la billetterie avec son beau-père qui est prêt à leur prêter de l'argent. Bref, l'avenir s'annonce radieux. Pourtant, l'homme est empreint de mélancolie. Il aurait préféré s'installer à Biarritz, où il a grandi avec son frère Samuel, parti aux îles Fidji. Vincent est nerveux, impulsif. Il va même passer une nuit en garde à vue après avoir balancé une bouteille sur une voiture de flics. Il est sous anti-dépresseur. Il a changé, mais sa chérie n'a pas l'intention de le laisser tomber. Ce ne sera pas réciproque, parce qu'au retour de Sam, il va tout plaquer pour faire avec lui un road trip jusqu'à Biarritz.
© Cano, Goux, Pinchuk – Delcourt
Si vous voulez lire une histoire qui ne ressemble en rien à tout ce que vous avez pu ingurgiter jusqu'à présent, cet album est fait pour vous. Fidji est avant tout une histoire de fraternité. Deux frères se retrouvent après un an de séparation où tous leurs codes ont été déstructurés. On ne peut pas dire que leur route sera semée d'embûches, puisque ce sont eux qui les mettront. Entre intrusion illicite, rapine de commerce et rencontres opportunes, Sam et Vincent vont se retrouver, se chercher,… Iront-ils jusqu'à se perdre ? Les auteurs, en tous cas, n'aident pas les lecteurs à s'y retrouver. Mais tout ça est parfaitement conscient.
© Cano, Goux, Pinchuk – Delcourt
Jean-Luc Cano prend le prétexte d'un road trip pour un récit d'introspection au plus profond des âmes tourmentées de deux frères. Le scénariste malin n'indique jamais au lecteur vers où l'intrigue va les mener. On s'attend à un récit psychologique. On attend la problématique. On cherche le thriller. Il ne vient vraiment jamais. A quoi bon les Fidji ? A quoi bon Biarritz ? Simplement parce que l'un est de l'autre côté de l'océan de l'autre ? Cano, lui, sait très bien ce qu'il fait. Bien futé celui qui le devinera avant la fin, poignante à arracher des larmes. C'est dans la dernière scène que le lecteur peut ajouter la pièce qui tient l'ensemble du récit et comprendre tout ce qu'il s'est passé jusque-là. Une mise en scène incroyable.
Bien loin des Nains des Guerres d'Arran, Pierre-Denis Goux s'empare de ces destins singuliers, cachant dans les regards les secrets, les angoisses, les joies et les doutes de la fratrie et des personnages qui gravitent autour, comme des dommages ou des sauvetages collatéraux. Le découpage, avec de nombreuses grandes cases, des planches muettes, donne un rythme singulier. L'album doit également beaucoup aux couleurs de Julia Pinchuk qui ouvre et clôt le récit avec un coucher de soleil qui en dit très long. Chaque scène est habillée d'un ton qui marque le moment. C'est dans les livres comme celui-ci que ceux qui douteraient encore peuvent s'assurer qu'une ou un coloriste est un auteur au même titre que les autres.
© Cano, Goux, Pinchuk – Delcourt
Fidji est de ces albums où l'on n'est plus tout à fait le même après les avoir lus. Il démontre que la fraternité est plus importante que toute liberté et toute égalité. Encore plus poignant qu'on ne s'attend pas du tout au final.
Laurent Lafourcade
"Puisqu’on ne sera toujours
Que la moitié d'un tout
Puisqu'on ne sera jamais
Que la moitié de nous
Mon frère....
Bien sûr que rien ne pourra jamais nous l'enlever
Bien plus que tout ce que la vie peut nous accorder
L'amour sera toujours cette moitié de nous qui reste à faire
Mon frère ..."
(extrait de la chanson Mon frère, dans Les 10 commandements)
One shot : Fidji
Genre : Emotion
Scénario : Jean-Luc Cano
Dessins : Pierre-Denis Goux
Couleurs : Julia Pinchuk
Éditeur : Delcourt
Collection : Mirages
ISBN : 9782413085409
Nombre de pages : 160
Prix : 22,95 €
"-Nous vous prions de bien vouloir nous excuser mais ces délibérations ont duré plus longtemps que prévu. Comme tous ces duos étaient très bons, les membres du jury ont débordé d'enthousiasme ! Bref, passons sans plus attendre à l'annonce des résultats !
-Merci ! Voici donc le bulletin avec le nom du vainqueur. Le duo qui remporte ces éliminatoires du 2ème groupe de la région du Kantô pour participer à la phase finale de l'édition 2022 du Kôshien du rire est…"
Azemichi Shijima et Taiyô Higashikata attendent impatiemment les résultats du concours d'humour lycéen auquel ils viennent de participer. Taiyo a réussi à rebondir sur le trou de mémoire de son complice. Mais cela suffira-t-il à passer les éliminatoires du Kôshien du rire ?
A part ça, Taiyo est déchiré entre son père et sa mère qui sont séparés. Malgré tout le temps que ses parents lui ont consacré, il a décidé d'arrêter ses cours d'expression scénique et ses passages à la télévision. Mais ça, c'était avant. Aujourd'hui, la phase finale du concours va être diffusé sur le petit écran. Il décide donc de faire face à sa mère et de lui présenter l’alter ego de leur duo "Aller simple pour les cieux". Alors qu'il craignait sa réaction, elle va être tout autre que ce qu'il imaginait.
Show-Ha Shoten ! © 2021 by Akinari Asakura, Takeshi Obata
© Akinari, Takeshi – Kana 2023
Le cœur de ce quatrième tome de Show-Ha shoten ! est un flashback sur les années de Taiyo qui ont précédé sa rencontre avec Azemichi. On va découvrir les relations qu'il avait avec Kunugi, son ancien partenaire malheureusement décédé. On l'accompagne dans ses derniers jours avec une émotion intense. Ce sont des instants qui ont fatalement forgé Taiyo. C'est avant tout pour lui qu'il cherche à devenir une star de l'humour.
Akinari Asakura etTakeshi Obata passent en phase introspection. Ce n'est pas que le rire fasse place aux larmes. D'ailleurs, bien que la série ayant pour thème le rire, elle n'est pas foncièrement drôle. Et ce n'est pas cela qu'on lui demande. Les parents de Taiyo d'un côté, son premier camarade de scène de l'autre, sont les deux fléaux de la balance qui ont fait du jeune homme ce qu'il est à présent.
Show-Ha Shoten ! © 2021 by Akinari Asakura, Takeshi Obata
© Akinari, Takeshi – Kana 2023
Entre les chapitres, le scénariste raconte son expérience dans le domaine des concours d'humour lycéens. Il explique comment il apprenait le texte et la gestuelle des humoristes professionnels. Il témoigne du fait que dans ses passages, seuls 20 % de ses sketchs ont fait rire le public aux éclats et 10 % étaient des gros flops. Il montre enfin pourquoi il n'est pas devenu un humoriste professionnel. Il remet ainsi les pieds sur terre aux lecteurs qui pourraient penser la tâche aisée.
Show-Ha Shoten ! © 2021 by Akinari Asakura, Takeshi Obata
© Akinari, Takeshi – Kana 2023
Une des forces de ce manga est qu'il reste dans la réalité. Il ne prétend pas dépeindre un milieu facile d'accès où tout le monde peut réussir. Comme dans la vie, il faut se battre, se dépasser, comme dans une compétition sportive. Et on le fait avec les armes qui nous ont forgés dans notre passé. The Show(-ha shoten !) must go on.
Laurent Lafourcade
Série : Show-Ha Shoten !
Tome : 4
Genre : Shonen
Scénario : Akinari Asakura
Dessins : Takeshi Obata
Éditeur : Kana
ISBN : 9782505126478
Nombre de pages : 212
Prix : 7,70 €
"-Ivan ! Regarde ce que j'ai trouvé ! Il ne me manque plus que Aigle Doré et j'aurai tous les justiciers ailés…
-Super ! Alors tu peux les envoyer se battre contre l'homme en noir !
-L'homme en noir n'existe pas…
-Ça va, c'est bon… Je plaisante…"
Mattéo est un petit garçon tout ce qui semble de plus équilibré. Il vit avec ses parents et son chien dans un pavillon de quartier résidentiel de banlieue. Mais ses nuits sont peuplées de noir. C'est toujours le même cauchemar. Il habite dans un immeuble, une de ces tours aux milliers d'habitants anonymes, et un homme en noir s'approche de lui. Ça le perturbe. Quand il se réveille, en règle générale, il a fait pipi au lit. Sa chambre est un sanctuaire. Les figurines de ses super-héros préférés le protègent. Il vient d'en avoir une nouvelle, Super Faucon, dans l'œuf-surprise que lui a offert son père, comme tous les dimanches ou tous les jours où l'on a envie d'offrir un cadeau à son fils préféré. Après l'école, c'est le temps des retrouvailles avec le chien Tommy, l'heure des devoirs, le dîner en famille, quelques dessins animés, le brossage des dents, puis le moment de retourner dans sa chambre pour la nuit… une nouvelle nuit d'angoisse.
© Panaccione, Di Gregorio – Delcourt
L'homme en noir est une histoire qui traite d'un sujet complexe à aborder : l'inceste. Dans les discrets remerciements des auteurs en préface, le scénariste Giovanni Di Gregorio l'annonce : "Cette histoire est librement inspirée de mon expérience personnelle, même si je ne m'en sui rendu compte qu'à la fin." Avec le récit de Mattéo, loin des Sœurs Grémillet, il exorcise un cauchemar de la réalité dont on ne se remet jamais. Il faut une résilience incroyable. Di Gregorio brouille les pistes en nous envoyant dans des directions qui ne mènent pas droit au bourreau. On est même parfois perdus entre la maison pavillon des jours et l'immeuble des nuits, tant et si bien qu'on se demande parfois où vit réellement la famille de Mattéo. A la fin, comme lui, on assemble toutes les pièces du puzzle pour comprendre la métaphore.
© Panaccione, Di Gregorio – Delcourt
Qui aurait pu se douter que le graphisme de Grégory Panaccione pouvait dégager autant d'émotion ? Avec un dessinateur réaliste, il aurait été facile de tomber dans le pathos et le larmoyant, mais sans forcément du recul. Avec le semi-réalisme de Panaccione, on atteint une autre dimension, faussement rassurante pour les jours, étonnamment terrorisante pour les nuits. Les double-planches posent des scènes suspendues. La porte qui se referme sur la chambre vide de Mattéo le matin ou la chute virtuelle au milieu des tours sont des images infiniment puissantes, comme celle, glaçante, de Mattéo, dont on voit les yeux écarquillés dans le reflet de la vitre, apercevant par la fenêtre l'homme en noir debout sur le toit de la maison voisine, tel un croque-mitaine, cigarette à la main, qui lui fait coucou. La couverture synthétise à elle seule le concept d'emprise : le bourreau écrase l'enfant de tout son poids en éteignant son mégot.
© Panaccione, Di Gregorio – Delcourt
L'homme en noir est un album témoignage qui peut aider à délier des langues. L'inceste est un crime qui a tendance à culpabiliser les victimes. Si l'album peut aider, même des années après, ne serait-ce qu'une seule personne à dénoncer, il aura atteint son but. Au-delà du message, le livre est scénaristiquement et graphiquement remarquable. Indispensable.
Laurent Lafourcade
One shot : L'homme en noir
Genre : Emotion
Scénario : Giovanni di Gregorio
Dessins & Couleurs : Grégory Panaccione
Éditeur : Delcourt
Collection : Mirages
ISBN : 9782413082729
Nombre de pages : 128
Prix : 19,99 €
"-Tu as gagné au loto ?
-Beaucoup mieux que cela !... J'ai une grande nouvelle à t'annoncer. Têtaclic, la boîte qui m'emploie vient de prendre la décision qu'on attendait tous…"
Paris, quatorzième arrondissement. Mais quelle est donc cette nouvelle que Gorka vient annoncer à sa compagne Manon, bouteille de champagne en mains ? Non, non, non, il ne vient pas la demander en mariage. Non, non, non, il n'a pas gagné au loto. Son patron s'étant rendu compte que le télétravail marchait très bien, il a vendu les locaux du siège social. Comme Manon est traductrice et peut donc travailler de n'importe où, Gorka a décidé qu'ils allaient déménager définitivement à Bayonne dans son Pays Basque natal. Le moins que l'on puisse dire, c'est que sa blonde n'est pas enchantée. Réussira-t-elle à s'y faire ? Gorka va tout faire pour qu'elle s'y sente bien. Entre le marché des halles et le stade Jean Dauger, le mal de la capitale ne va pas tarder à rattraper Manon. Elle, supportera-t-elle le retour à Paris sans son chéri ? Lui, vivra-t-il sa vie de rêve de bayonnais ?
© George, Viollier – Atlantica
Bien évidemment et pour notre plus grand plaisir, non. Les amoureux ne vont pas pouvoir se passer l'un de l'autre. Manon revient. Gorka organise une visite culturelle du vieux Bayonne. C'est en lisant un livre consacré à l'histoire de la ville acheté dans une vieille librairie que le couple découvre, collé entre la couverture et les pages de garde, une lettre d'époque signé Antoine VII, duc de Gramont, pour sa bien aimée Marie-Henriette. Commence alors pour Manon et Gorka une enquête historique. Qui était-il ? En quoi était-il lié à l'histoire de Bayonne ? C'est parti pour un voyage de plus de deux-cent cinquante ans dans le temps.
© George, Viollier – Atlantica
Jean-Yves Viollier et Pierre George délaissent momentanément les forces de l'ordre représentées par Manzana et Patxaran pour un voyage empreint d'émotion à Bayonne. L'album se divise en deux parties distinctes : celle de l'arrivée au Pays Basque, avec ses traditions et sa culture, sa multiculture même, puis celle sur l'histoire de la ville au XVIIIème siècle. Connaissant les auteurs, ne vous attendez pas à une histoire trop didactique. L'humour n'est pas oublié. Le basque est libéré et décomplexé. N'est-ce pas Gorka ? Et quel plaisir tout au long de l'histoire de retrouver les lieux familiers. Le marché de Noël et la grande roue, le petit Bayonne, le Musée basque, le trinquet Saint-André, la rue Pannecau, jadis célèbre pour un certain commerce, la librairie de la Rue en pente et ses critiques acerbes pas forcément nécessaires, le Château-Neuf et le cabaret de la Luna Negra : l'immersion est totale. On apprend même des choses. Saviez-vous que Saint-Esprit était à l'origine une ville à part ?
© George, Viollier – Atlantica
La prochaine fois que vous arpenterez les rues de Bayonne, ou même si vous le faites pour la première fois, allez-y avec cette BD en mains. Ça vaut mieux que n'importe quel guide touristique. Et si pour un prochain album les auteurs proposaient le pendant pour Biarritz, dont on apprend dans ce livre la différence avec Bayonne ? Maïder Arosteguy, la mairesse, ne serait certainement pas contre. Le vrai trésor, ce sont les albums de Jean-Yves Viollier et Pierre George.
Laurent Lafourcade
One shot : Le vrai trésor, c'est Bayonne
Genre : Visite historique
Dessins & couleurs : Pierre George
Scénario : Jean-Yves Viollier
Éditeur : Atlantica
ISBN : 9782758805809
Nombre de pages : 52
Prix : 18 €
©BD-Best v3.5 / 2024 |