Voici un coup de projecteur sur Philippe Zytka, un auteur tres prometteur dont un album tres intéressant sur le paras de la seconde guerre mondiale est sortit en novembre 2010 aux éditions du triomphe. Jean-Jacques Procureur est allé à sa rencontre afin d'en savoir plus sur l'artiste et sa carrière.

 

Jean-jacques Procureur : comment en es tu arrivé à devenir auteur de bande dessinée?

Philippe Zytka :  Houla !! C'est le genre de question qui semble simple et qui en fait se révèle compliquée à répondre. J'ai toujours aimé lire et aussi loin que je me rappelle il y a toujours eu des livres autour de moi. Il y avait par contre peu de BDs, mais mon père à l'époque était un grand fan d'Astérix et il ne loupait pas un album, je me souviens parfaitement du dimanche matin où il est rentré à la maison avec son Journal du Dimanche et l'album "Obélix et Compagnie", interdiction de le lire avant lui … !! On m'achetait alors "Yakari "et plus tard j'avais droit à un album de Tintin lorsqu'on partait en vacances. Il y a quelques temps ma mère a retrouvé des cahiers dans lesquels j'avais fait des BD, déjà à l'époque ça me titillait. A la même époque, lors de mes vacances chez mes grands-parents, j'écumais le rayon BD de la bibliothèque municipale de Villers-Bocage et c'est là que j'ai eu mes premiers chocs en découvrant "Blueberry", "Barbe Rouge", "Les Chevaliers du Ciel", "Comanche", "Chevalier Ardent" et j'en passe. C'est à cette époque que j'ai découvert qu'il y avait des gens qui écrivaient et d'autres qui dessinaient. Et puis j'ai eu une sorte de dark age où les seules BD que je lisait étaient les albums en N&B demi-format du genre "Captain Swing", "Guam", "Blek", etc…, toute cette BD populaire et surtout très accessible avec l'argent de poche limité dont je disposais. Par la suite, j'ai découvert à mon retour du service militaire des séries comme Louis la Guigne, XIII, Thorgal, Jérémiah,… Finalement je me rends compte que j'ai une culture BD très classique. Bref ! Il y a quelques années, alors que j'étais plutôt passé du côté de la vidéo, j'ai eu envie d'écrire des histoires pour la BD. Ça a été comme un déclic, une évidence, à une époque où j'avais un tournant professionnel à prendre. J'ai décidé de consacrer une grande partie de mon temps à l'écriture de BD. Après un premier scénario catastrophique j'ai pris du temps pour lire de la BD et étudier son mode de narration particulier. J'ai la chance d'avoir une femme qui m'a soutenu dans ce projet. Ensuite, c'est le parcours classique, tournée des festivals BD pour essayer de faire lire mes histoires à des professionnels établis, pour avoir des conseils et puis petites annonces sur les forums internet pour dénicher des dessinateurs.

Peux tu nous dresser en quelques mots une petite biographie ?

PZ:  Je suis né en Normandie, ce qui explique certainement mon goût pour l'Histoire (pas seulement celle de la seconde guerre mondiale). J'ai fait des études de photographie en région parisienne et à cette époque j'ai commencé à réaliser des courts-métrages en Super8. Je suis arrivé sur Lille il y a 14 ans après avoir rencontré ma femme et j'ai monté une société de production de films institutionnels. C'est lorsque j'ai fermé cette société que j'ai pris la décision de me mettre à l'écriture de BDs. Aujourd'hui, en parallèle à cette activité, j'interviens en établissements scolaires ou centres de loisirs où j'anime des ateliers vidéo de manière ponctuelle ou sur des projets à l'année.

 

 

Philippe Zytka

 

Comment a démarré ta collaboration avec  Gerardo  balsa pour cette nouvelle série ?

PZ:  Gerardo m'a contacté suite à une annonce passée sur un forum pour un projet qui s'appelle "Frontière Jaune". A l'époque il habitait en Argentine et je trouvais vraiment qu'il y avait du potentiel dans les planches qu'il m'avait envoyé. Nous avons donc décidé de faire un essai en montant ce projet qui n'a pas abouti. A l'époque, Corinne Bertrand qui venait d'arriver chez Quadrant avait trouvé que l'histoire pouvait rentrer dans son catalogue mais elle trouvait que le dessin de Gerardo n'était pas suffisant techniquement. D'autres éditeurs n'ont pas eu la même correction et n'ont jamais répondu à l'envoi de dossier. Maintenant je sais que c'est monnaie courante dans ce milieu. Après l'essai avorté de "Frontière Jaune", Gerardo est parti de son côté démarcher des éditeurs et faire quelques essais tandis que moi je continuais à développer des histoires. Au bout de quelques mois, il m'a envoyé un message pour me dire qu'il aimerait bien remonter un projet avec moi. Comme je n'avais rien à l'époque qui pouvait correspondre à son style graphique, je lui ai demandé ce qu'il avait envie de faire. Quand il m'a répondu qu'il ferait bien une histoire sur la seconde guerre mondiale avec des avions, j'ai immédiatement pensé que nous étions à deux ans des commémorations du 65^ème anniversaire du Débarquement de Normandie et qu'il y avait peut-être quelque chose à faire. Comme c'est en plus un sujet que je connais particulièrement bien pour avoir réalisé un documentaire avec des témoignages inédits des vétérans des troupes aéroportées anglaises, le travail de documentation était plus facile. Nous avons donc monté le projet qui a été refusé par tous les éditeurs avant d'être accepté par un petit éditeur normand - dont je tairais le nom - qui a essayé de nous faire faire l'album pour rien. Finalement, plusieurs mois après j'ai découvert dans un musée des albums édités par le Triomphe. Comme on n'avait de toute façon rien à perdre, j'ai envoyé un dossier. Didier Chalufour, le patron des Editions du Triomphe a été très réactif et l'affaire s'est réglée en 48h.

Tout à l'air de bien se passer avec les editions triomphe, tu nous confirmes donc plusieurs album ?

PZ :  Ce qui est bien avec le Triomphe c'est qu'ils sont très réactifs, on obtient vite des réponses. Et puis comme leur catalogue BD création est principalement composé de BD historique ou de BD religieuse je ne vais pas aller leur proposer des projets de polar, de S.F. ou de western, alors qu'avec un éditeur peut-être mieux implanté sur le marché on ne sait pas trop de quoi il va avoir envie alors on envoie des choses diverses et on a des réponse du style "vous ne correspondez pas à notre ligne éditoriale !". Et puis, le Triomphe c'est surtout l'éditeur qui m'a donné ma chance en tant que scénariste, qui m'a fait confiance, rien que pour ça je continuerai à lui proposer des choses, même si j'arrive à monter d'autres projets ailleurs, et tant que Didier Chalufour aura envie de travailler avec moi je ferai des albums avec lui. D'autant que ce ne sont pas les idées qui manquent…

Malgré le contexte economique actuel, es tu  toujours aussi enthousiaste pour  continuer à travailler dans ce monde du neuvieme art ?

PZ:  Plus j'avance dans ce "métier" et plus je découvre des choses qui me donnent envie d'aller encore plus loin. Ne serait-ce que les rencontres avec le public lors des salons. Lors d'une dédicace l'année dernière, un monsieur vient me faire dédicacer l'album pour son fils. On discute, je fais la dédicace, le monsieur repart et je le vois revenir une heure et demie plus tard avec son fils. Sur le coup angoisse !!... Est-ce qu'il vient me dire qu'il n'a pas aimé ?!! … En fait, le garçon revenait pour me remercier de la dédicace et me dire tout le bien qu'il pensait de l'album qu'il venait de terminer. Rien que pour ce genre de chose j'ai envie de continuer. Une autre chose qui donne envie de continuer c'est l'accueil des gens qui sont dans ce métier, qui ont la curiosité de venir voir ce qu'on fait. Quand un mec comme François Boucq te dit "ton scénar est vachement bien, bien construit, dynamique", forcément ça fait plaisir et ça donne envie de continuer…

As tu d'autres projets que tu aurais le souhait de réaliser en 2011-2012 ?

PZ: Pourquoi ? Tu es le bon génie qui sort de la lampe et qui possède le don d'exaucer les souhaits ? Sauf à trouver un dessinateur et un éditeur pour monter et sortir un projet en huit mois, je ne devrais pas avoir de nouveauté cette année. Par contre j'ai signé pour un deuxième album au Triomphe dans la même collection. Ce sera donc une BD historique autour du Commando Kieffer, les seuls français qui ont participé au Débarquement le 6 juin 1944. C'est Marcel Uderzo qui dessine cette fois, il a reçu le découpage complet des 46 planches et à l'heure actuelle il est en cours d'encrage des cinq premières planches. L'album est prévu pour le printemps 2012. J'ai bon espoir de signer aussi avec un éditeur nordiste pour un projet plus grand public avec un autre dessinateur qui a déjà fait ses preuves, mais je n'en dirai pas plus tant que rien n'est officiel. "Frontière Jaune" a été repris par Juliette Derenne qui a monté un très beau dossier, c'est vraiment un projet qui me tient à cœur et que j'aimerai vraiment arriver à monter un jour. A côté de ça il y a des tas d'autres projets, des vieux trucs qui n'ont pas trouvé d'éditeur et des histoires que je voudrais terminer d'écrire et proposer à des dessinateurs.

As tu un blog un site te concernant...

PZ: Oui, j'ai créé un blog que j'alimente de manière tout à fait aléatoire. J'essaye de ne pas y parler que de mes projets, mais également de mes coups de cœur en BD, de ce que j'écoute comme musique. L'adresse en est http://blanchespages.canalblog.com

Ta devise ?

PZ: J'aime bien cette phrase de Winston Churchill : "Personnellement je suis toujours prêt à apprendre, bien que je n'aime pas toujours qu'on me donne des leçons.".

 

Interview © Graphivore-Jean Jacques Procureur 2011

Photo : © Jean Jacques Procureur 2011

Couverture : © Editions du Triomphe 2010

 

Publié le 10/04/2011.