« - Je suis heureux que la guerre soit finie, que tout le monde soit libre à nouveau. Mais en fait, personne n’est jamais vraiment libre, n’est-ce pas ? Votre mari a malheureusement été très clair. Il refuse de divorcer. Lisez attentivement ce papier. Mais je vous conseille de bien réfléchir avant de le signer. Il s’agit pourtant du seul moyen de retrouver votre liberté. »
Paris, quelques mois après la Libération, Monique veut divorcer de Francis. Celui-ci est prêt à accepter à la seule condition qu’elle renonce à ses droits sur leur fille Nicole. Amoureuse d’un officier américain rencontré dans la capitale, elle décide de tout quitter par amour pour lui. Monique revient sur ces années de guerre, de son arrivée dans Paris occupé en 1941 à son idylle avec Francis, des boîtes de jazz clandestines à la représentation du Tristan et Isolde de Wagner à l’Opéra. Le bruit des bottes cadence la vie des parisiens, résistants ou collabos, jusqu’à l’arrivée des sauveurs venus de l’autre côté de l’Atlantique.
© Desberg, Van Der Zuiden, Alquier - Bamboo
Stephen Desberg romance la vie de sa mère, aujourd’hui disparue, en essayant de comprendre ce qui l’a amenée à laisser sa sœur aînée à son père et redémarrer une nouvelle vie avec celui qui deviendra son père à lui. Il ne cherche jamais à justifier ses actes. Il ne la juge pas. On n’aurait jamais pu penser qu’un tel récit puisse être objectif, et pourtant il l’est. Les témoins de l’époque n’étant plus de ce monde, le scénariste avoue et assume le côté romanesque de son récit, avec notamment les personnages de Ginny Pinkerton, homosexuel noir et juif, pianiste caché, et Manon, courtisane imperméable à l’Occupation, couchant avec l’ennemi, juste pour offrir à son fils ce dont il aurait besoin.
© Desberg, Van Der Zuiden, Alquier - Bamboo
Après les anges d’Auschwitz, Emilio Van Der Zuiden poursuit son duo avec Stephen Desberg. Son dessin ligne claire est de la même famille que celui d’un Javi Rey (Violette Morris). La netteté et la pureté de son trait contrastent avec la violence des uniformes nazis qui symbolisent tant d’ignominie. Cela axe un peu plus le récit, très émouvant, sur les personnages et sur leurs âmes, qu’elles soient indécises ou déterminées. Van Der Zuiden les utilise comme des marionnettes dont il tire les ficelles pour leur faire jouer leurs rôles respectifs au mieux.
© Desberg, Van Der Zuiden, Alquier - Bamboo
La Seconde Guerre Mondiale est un des sujets de prédilection du neuvième art. On ne peut que saluer la qualité de certaines productions : Maus évidemment, mais aussi Irena, ou encore Si je reviens un jour. Avec cette romance sur fond de braise, Desberg et Van Der Zuiden contribuent à ce devoir de mémoire avec tous les avantages que peut apporter la bande dessinée.
Laurent Lafourcade
Version luxe
One shot : Aimer pour deux
Genre : Drame
Scénario : Stephen Desberg
Dessins : Emilio Van Der Zuiden
Couleurs : Fabien Alquier
Éditeur : Bamboo
Collection : Grand Angle
Nombre de pages : 80
Prix : 16,90 €
ISBN : 9782818978177
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