« - Tiens ? L’âme n’est pas là ?
- Elle ne peut pas bouger.
- Pourquoi ?
- Parce qu’elle dort.
- La malédiction se répand en elle.
- Je pensais qu’elle n’était pas affectée.
- On a écalé sa coquille.
- Elle commence à déborder. On ne pourra pas la rendre à maman.
- Que faire ?
- Voilà des étrangers. »
Des corbeaux discutent sur le toit de la chaumière dans laquelle est caché l’enfant, blessée. Le maudit attend, attablé au devant enneigée de la demeure. Epuisé, il revient d’un combat impitoyable en forêt. Il est inquiet pour l’enfant, non pas à cause du coup d’épée qu’elle a reçu dans le dos. Il est superficiel. Non, un autre mal la ronge, bien plus grave et à l’issue inquiétante.
L’histoire est celle de Sheeva, une petite fille abandonnée, et d’un être cornu qui l’a recueillie et qui auparavant était un humain. Ils survivent dans une zone contaminée par un mal mystérieux qui transforme les personnes atteintes en êtres étranges, bêtes noires élancées. Il paraît que « de l’autre côté », le monde n’est pas contaminé.
Nagabe met le lecteur tour à tour dans la peau du maudit et de celle de l’enfant. Quand on est le maudit, on tente d’échapper à la mort dans un combat dont l’issu aurait tout pour être fatale. Quand on est l’enfant, on tremble de peur mais on survit grâce à l’innocence et au maudit qui nous protège.
Ce septième opus donne quelques clefs quant à la condition de « maudit ». Leurs sons, leurs souvenirs, leurs mots et leurs yeux ne sont que des parties d’une Maman qui les a créés. Ils sont des réceptacles destinés à recueillir des âmes volées. Mais cela, seuls les enfants noirs peuvent le faire. Sheeva n’aura-t-elle pas un destin dirigé ?
Il y a quelque chose d’exceptionnel dans l’histoire de L’enfant et le maudit. Nagabe est un virtuose pour faire avancer son récit. Le mangaka invente les scènes d’action contemplatives. La scène du coup d’épée reçu dans le dos par la petite est un exemple de découpage à étudier dans les écoles de graphisme. De l’impact à la chute du corps en passant par le reflet dans la lame, les pages sont époustouflantes.
Autre scène magnifique, lorsque le maudit marche dans la nuit en plein cœur de la forêt sombre et mystérieuse, les contours des personnages et des décors sont blancs sur un fond noir de Chine.
On ne sait pas si Mylène Farmer a lu L’enfant et la maudit mais Komikku devrait lui envoyer. C’est certain qu’elle adorerait.
Laurent Lafourcade
Série : L’enfant et le maudit
Tome : 7
Genre : Fantastique
Scénario & Dessins : Nagabe
Éditeur : Komikku
Nombre de pages : 196
Prix : 7,99 €
ISBN : 9782372874571
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