« - Les bourgeois de la City ne viennent plus s’encanailler… Ils ont peur de finir dans la Tamise.
- A qui on va faire les poches s’il n’y a plus que des pauvres dans nos pubs ?
- A Whitechapell, on commence à rire en parlant de nous.
- Trois morts en un mois ! cinquante vaches de perdues !
- Des vaches honnêtement volées, si c’est pas honteux !
- Certains bateaux en sont à envisager de changer de quais de déchargement.
- Adieu le malt, l’orge et notre cher gin frelaté !
- Blackchurch est en train de perdre sa réputation de place où il fait bon investir quand on est une canaille… ça ne peut pas continuer ainsi ! »
La pègre de Whitechapell est en émois. Depuis que la Mystérieuse veille sur le quartier, on n’a jamais vu un truc pareil ! Elle aurait plus de cent ans et se balade dans son vaisseau fantôme, n’hésitant pas à faire enlever ceux qui lui déplaisent. Les morts se multiplient. De ce fait, les bourgeois volages ne fréquentent plus le quartier et la racaille n’a plus rien à se mettre sous la dent.
Lord Harold, le fils de bonne famille, né avec une cuillère d’argent dans la bouche, qui vient d’intégrer la brigade de police du quartier, est bien décidé à éclaircir les bas-fonds. Mais dans la haute société, des manigances se trament et un complot sourd.
© Fourquemin, Charlot, Canthelou - Vents d’Ouest
Surfant, ou plutôt glissant sur la frontière du fantastique laissant le lecteur s’interroger pour savoir si on va y aller ou pas tout comme Harold glisse sur les tuiles des toits londonniens, les auteurs se rangent dans la digne lignée des grands auteurs de littérature policière que sont Arthur Conan Doyle ou Gaston Leroux. La science démêlera-t-elle le vrai du faux ?
Tout autant qu’une enquête, le thème principal du récit est la lutte des classes. Les manteaux de velours et les pauvres et malandrins s’affrontent dans une conquête urbaine comme on peut en voir de nos jours. (Sur ce sujet et dans un tout autre style, je ne saurais que trop vous conseiller la lecture de Moi, Miiko et Annikki, bande dessinée finlandaise de Tiitu Takalo parue aux éditions Rue de l’échiquier et prix Artemisia 2021).
© Fourquemin, Charlot, Canthelou - Vents d’Ouest
Le duo Charlot/Fourquemin est une des valeurs sûres de la bande dessinée classique d’aujourd’hui avec toute la noblesse que l’on peut donner à ce terme. Avec les enquêtes de Lord Harold, ils tiennent une série au long cours dont le premier cycle, ou plus simplement la première histoire, se conclue avec ce deuxième volume. Philippe Charlot insère le charme british nécessaire pour être persuadé se trouver de l’autre côté du Channel. Xavier Fourquemin, aidé par les couleurs crasseuses de Simon Canthelou (ceci est un compliment) finalise l’immersion.
© Fourquemin, Charlot, Canthelou - Vents d’Ouest
D’une efficacité redoutable, la composition de la couverture, dynamique, géométrique presque, est un exemple à suivre. En un dessin, le décor est planté et on y lit la détermination du héros, car Harold en est un dans tous les sens du terme, ainsi que le recul de ses collègues qui à la fois l’encouragent mais aussi le laissent aller au front.
Lord Harold est peut-être le douzième du nom dans sa lignée, mais premier dans la liste des enquêteurs fouineurs sur lesquels la BD va devoir compter.
Laurent Lafourcade
Série : Les enquêtes de Lord Harold, douzième du nom
Tome : 2 – Trois petites souris
Genre : Polar
Scénario : Philippe Charlot
Dessins : Xavier Fourquemin
Couleurs : Simon Canthelou
Éditeur : Vents d’Ouest
Nombre de pages : 56
Prix : 14,50 €
ISBN : 9782749309354
©BD-Best v3.5 / 2024 |