« - Bonjour, madame ! Les affaires des enfants sont prêtes ?
- Bonjour madame ! Oui, elles sont dans la case, je vais les chercher !
- Ah ah ! T’en as un drôle de chapeau, toi !
- Donnez-moi tout ça, on va les mettre à l’arrière, avec eux ! Vous êtes tout beaux, dites donc ! Vous allez en voir plein, des enfants, là où on va, ne vous inquiétez pas ! Vous allez vous faire plein d’amis… et apprendre beaucoup de choses ! »
La Réunion 1965. Jean et sa petite sœur, comme de nombreux autres enfants, sont enlevés à leur famille. Alors que Didi est confiée à des religieuses dans la pension des « Filles de Marie », Jean est envoyé en France pour vivre une vie meilleure. De foyers en familles d’accueils, Jean le déraciné n’aura de cesse de retrouver ses sources, jusqu’à revenir plus de quarante après sur son île. Mais après le passage d’un rouleau compresseur administratif ayant tout dévasté sur son passage, réécrire son histoire et retrouver les siens va s’avérer fort complexe. Qui plus est, le temps est passé par là. Le destin lui donnera-t-il un p’tit coup de pouce ?
© Tehem - Steinkis
De 1962 à 1984, ils furent ainsi autour de 2000 enfants arrachés à leurs familles et envoyés en métropole, essentiellement en Creuse, soi disant pour leur bien, soi disant pour lutter contre la misère sociale gangrénant l’île de la Réunion. Réparer la misère en creusant des cicatrices dans les cœurs, était-ce la solution ? Tehem ne tente pas de répondre à la question mais se contente de relater des faits, de façon romancée certes, mais objective. Epaulé par Gilles Gauvin, historien membre de la commission d’information sur les enfants dits de la Creuse, le dessinateur, lui-même d’origine réunionnaise et y ayant longtemps habité, rend un hommage poignant à ces enfants sacrifiés. Tehem ne fait pas un reportage. Il raconte une histoire dans un cadre historique plausible. Et comme dans toute bonne histoire, il faut un bon méchant. Ici, le monstre s’appelle l’Aide sociale dont les plaies des dysfonctionnements administratifs sont encore béantes aujourd’hui.
© Tehem - Steinkis
L’album s’ouvre par l’arrivée d’un adulte à l’aéroport Roland Garros à la Réunion. Cet homme, c’est Jean. Il vient retrouver l’enfant qu’il était. Tehem navigue tout au long du récit entre les époques marquées par des tons de couleurs. Entre chaque chapitre, une page intitulée La gazette de la Réunion donne des clefs historiques permettant de comprendre la situation vécue par les principaux protagonistes de l’histoire.
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Les enfants oubliés de Piments zoizos ne sont au final pas si éloignés que ça des enfants perdus de Peter Pan. Les contes prennent souvent leurs sources dans des drames. Piments zoizos n’est au final qu’un conte de la réalité.
Laurent Lafourcade
One shot : Piments zoizos, les enfants oubliés de la Réunion
Genre : Drame historique
Scénario & Dessins : Tehem
Supervision historique : Gilles Gauvin
Éditeur : Steinkis
Nombre de pages : 160
Prix : 18 €
ISBN : 9782368463260
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